escroquerieHuit interpellations dans la plus grosse « arnaque au président »

Huit personnes interpellées en France et en Israël dans la plus grande « arnaque au président »

escroquerieIls sont soupçonnés d’avoir blanchi plus de 38 millions d’euros
Illustration de la police nationale
Illustration de la police nationale - A. Robert/SIPA / /SIPA
20 Minutes avec AFP

20 Minutes avec AFP

C’est la plus grosse affaire d'« arnaque au président » en France. Huit personnes soupçonnées d’avoir blanchi plus de 38 millions d’euros ont été interpellées en région parisienne et en Israël, selon le parquet de Paris. L’enquête a nécessité une importante coopération européenne. « L’arnaque au président » est une escroquerie dont le mode opératoire consiste à usurper l’identité du dirigeant d’une entreprise pour convaincre un salarié de réaliser un faux ordre de virement.

Les six suspects interpellés en France, en juin 2022 et janvier dernier, ont été laissés libres sans poursuites à ce stade, selon le parquet de Paris. Concernant les deux arrestations en Israël, aucune demande d’extradition n’a été formulée à ce stade, d’après une source proche du dossier. Au total, 3,9 millions d’euros d’avoirs criminels, dont 700.000 euros en cryptomonnaies, ont pu être saisis, selon une source policière française.

Usurpation d’identité

L’affaire démarre en décembre 2021, quand le comptable du promoteur immobilier parisien Sefri-Cime reçoit un appel. Au bout du fil, un homme qui se fait passer pour un avocat d’un grand cabinet. L’escroc prétexte « une opération confidentielle de rachat de sociétés », le tout avec l’accord du président de l’entreprise, explique à l’AFP le commissaire Vincent Kozierow, chef de la Brigade des fraudes aux moyens de paiement (BFMP) de la police judiciaire parisienne.

Pour crédibiliser davantage le scénario, le comptable reçoit dans la foulée un courriel usurpant l’identité du PDG qui lui confirme que l’opération est réalisée à sa demande. Au total, plus de 40 virements vont être effectués en quelques semaines pour un montant total de 38 millions d’euros, un record en France. La direction finit par déceler l’escroquerie et dépose plainte au commissariat du 14e arrondissement de Paris, siège du groupe.

A la même période, une société de métallurgie de Haute-Marne est également victime d’une « arnaque au président » pour une perte de 300.000 euros. Le mode opératoire est similaire : un homme usurpant l’identité du patron de l’entreprise appelle le comptable et lui demande de faire un virement sur un compte hongrois pour une opération financière secrète. L’escroc « avait insisté auprès du comptable pour qu’il n’en parle à personne et ainsi l’isoler », rapporte à l’AFP le colonel Jean-Paul Douviers, commandant de la section de recherches de Reims, chargée de l’enquête après la plainte de l’entreprise.

Deux affaires en une

Les gendarmes et les policiers comprennent très vite, grâce aux exploitations des lignes téléphoniques, qu’ils ont affaire à une même équipe. Leurs deux affaires sont alors réunies dans une seule enquête pour escroquerie en bande organisée et blanchiment d’escroquerie en bande organisée notamment, sous l’autorité de la section financière de la Juridiction nationale de lutte contre la criminalité organisée (Junalco).



Les investigations sur les flux bancaires font voyager les enquêteurs dans une bonne partie de l’Europe, notamment en Espagne, au Portugal, en Croatie et en Hongrie où les fonds ont transité sur différents comptes bancaires ouverts sous de fausses identités et au nom de sociétés fictives. Les polices de ces différents pays, notamment portugaises et espagnoles, se joignent aux policiers et gendarmes français, sous l’égide d’Europol, et mènent un travail de fourmi.

Pour démasquer ces « mules bancaires » cachées derrière des noms d’emprunt, les enquêteurs ont eu recours à un logiciel de reconnaissance faciale pour les identifier dans un fichier de police - le TAJ, traitement d’antécédents judiciaires –, les escrocs ayant souvent laissé leurs vraies photos sur les faux papiers. « C’est un dossier significatif par le préjudice très fort et son importante dimension internationale », souligne le chef de la BFMP, ajoutant que l’enquête n’est pas terminée.