AIDE HUMANITAIREComment les Convois vers l’espoir continuent de se mobiliser pour l’Ukraine

Guerre en Ukraine : « Quand vous avez vu ce qui s’y passe, c’est facile de rester mobilisé »

AIDE HUMANITAIREUn an après le début de l’invasion russe en Ukraine, l’association lyonnaise des Convois vers l’espoir continue de se mobiliser pour apporter du matériel médical à la frontière avec l’Ukraine
Depuis un an, l'association lyonnaise des Convois vers l'espoir se mobilise pour ramener du matériel médical à la frontière avec l'Ukraine
Depuis un an, l'association lyonnaise des Convois vers l'espoir se mobilise pour ramener du matériel médical à la frontière avec l'Ukraine  - Convois vers l'espoir / 20 Minutes
Elise Martin

Elise Martin

L'essentiel

  • Un an après le début de la guerre en Ukraine, « 20 Minutes » est plus que jamais mobilisé pour vous informer sur le conflit. Du 22 au 28 février, la rédaction vous propose des reportages, analyses, témoignages, vidéos, podcasts pour rendre compte du quotidien des civils, de la situation militaire sur le terrain, du jeu diplomatique.
  • A Lyon, l’association des Convois vers l’espoir s’est montée dès le début du conflit pour aller aider les Ukrainiens en apportant du matériel médical.
  • Plus de 150 expéditions plus tard, cette association continue de se mobiliser et a besoin « plus que jamais » de soutiens, notamment financiers pour acheter de nouvelles ambulances.

A l’origine, il est simplement professeur de mathématiques à Lyon. François Bompard a désormais « un deuxième travail ». Depuis bientôt un an, il est le président de l’association des Convois vers l’espoir qu’il a créée pour venir en aide aux Ukrainiens. Une vingtaine de bénévoles se mobilisent pour envoyer des camions avec du matériel médical jusqu’à la frontière de l’Ukraine toutes les six semaines. Une activité qui lui prend « [sa] vie entière », comme dirait sa femme. « Et je continuerai tant qu’il le faudra, lance-t-il. Quand vous avez vu ce qu’il se passe là-bas, vous ne pouvez pas rentrer chez vous et vous caler tranquillement dans votre canapé comme si de rien n’était. »



En un an, l’association a envoyé des centaines de tonnes de matériel médical, d’alimentation, de matériel de première nécessité et a également ramené 500 réfugiés dans la région lyonnaise. « Au début, on partait chaque semaine. C’était très facile d’obtenir des dons, il y avait énormément de générosité de tous les côtés, de la part des entreprises comme des particuliers », se souvient ce prof.

Puis, « c’est devenu compliqué ». A partir du mois de mai, « le paysage médiatique a changé, la générosité avec, le nombre de convois humanitaires a été divisé par 10 », souligne-t-il. L’élection présidentielle est devenue le centre de l’attention et la guerre en Ukraine a peu à peu « fondu sous d’autres actualités ». « Peut-être que la situation militaire sur le terrain a évolué mais ce qui est sûr, c’est que la situation des gens, elle, elle n’a pas évolué », s’exclame le fondateur de l’association.

« La guerre n’est pas finie »

Pour continuer de mobiliser, François Bompard, et la vingtaine de bénévoles toujours actifs, font des actions de communication, lèvent des fonds et investissent les outils numériques. « Aujourd’hui, c’est difficile de faire comprendre aux gens que la guerre n’est pas finie, que les Ukrainiens ont toujours besoin d’aide et qu’il y en a qui meurent parce qu’ils n’ont pas de soins médicaux », souffle-t-il.

Le dernier convoi est parti le 27 janvier avec, en plus du matériel médical, des poêles à bois et des groupes électrogènes à destination d’orphelinats et de l’hôpital pédiatrique de Lviv. L’objectif de la prochaine expédition, prévue le 10 mars, est de livrer une ambulance qui servira de centre médical d’urgence pour l’est de l’Ukraine, en particulier la région de Kramatorsk. En contact avec les hôpitaux ukrainiens, ce sont les représentants médicaux qui mettent à jour la liste des besoins et qui viennent récupérer les dons à Zamość.

Des besoins toujours « urgents »

« On a surtout besoin de soutiens financiers. Notamment, pour le transport parce que l’humanitaire est aussi touchée par l’explosion du prix de l’essence. Mais aussi pour acheter les ambulances, développe le membre de l’association. Ça coûte 17.000 euros. Pour le matériel médical, on récupère des invendus des pharmacies et les hôpitaux nous donnent ce dont ils ne se servent plus. On n’a jamais eu vraiment de manque ou de mal à en obtenir. Et les Ukrainiens ne sont pas difficiles là-dessus. Quand on n’a rien, on n’est pas en situation de l’être. »


Selon l'association lyonnaise des Convois vers l'espoir plus de 2.500 ambulances ukrainiennes ont été détruites depuis le début du conflit, elle lève alors des fonds pour en acheter de nouvelles et les amener à la frontière (Illustration)
Selon l'association lyonnaise des Convois vers l'espoir plus de 2.500 ambulances ukrainiennes ont été détruites depuis le début du conflit, elle lève alors des fonds pour en acheter de nouvelles et les amener à la frontière (Illustration) - Des Convois vers l'espoir

L’enseignant rappelle que « les besoins sont toujours urgents ». Il expose : « A l’est, des villes sont bombardées tous les jours, il y a des morts quotidiennement. Depuis un an, la quasi-totalité de la population de l’est de l’Ukraine a bougé à l’ouest. Aujourd’hui, des villes ont pratiquement doublé en termes d’habitants avec un système de santé qui était déjà mal en point avant la guerre. Depuis, les hôpitaux ont moins de matériel et doivent gérer deux fois plus de personnes. En plus, les centrales électriques sont la plupart hors-service, avec une à deux heures d’électricité par jour, forcément, c’est compliqué. Sans oublier que l’hiver, il fait jusqu’à moins 17 °C. ».

« Ils meurent et nous, on fait des flashmobs »

Finalement, le « triste fait » que ce soit l’anniversaire de l’invasion russe permet aussi de remettre en avant ce qu’il s’y passe. Il espère alors « un regain de mobilisation », notamment auprès des collectivités. « Ce n’est pas normal que l’aide humanitaire repose sur des bénévoles. On a contacté toutes les communes de la région lyonnaise, on n’a reçu aucun retour positif. Il faut que ces mairies se saisissent du sujet et agissent », interpelle François Bompard.

Avant d’ajouter : « Eux [les Ukrainiens], ils meurent et nous, la réponse qu’on leur donne ce sont des communiqués et des flashmobs. C’est bien mais ce n’est pas l’enjeu. Que les municipalités expriment leur solidarité et qu’elles condamnent ce qu’il se passe, d’accord. Mais maintenant, il faut que ce soit assorti à des actes concrets. Notre soutien moral là-bas, ils n’en ont rien à faire. Ce n’est pas ça qui leur permettra de mettre quelque chose dans leur casserole le soir ou d’avoir de quoi se chauffer ou de quoi se soigner. »


NOTRE DOSSIER SUR LA GUERRE EN UKRAINE

C’est d’ailleurs ce qui l’a poussé à agir dès les premiers bombardements en Ukraine. « Je me sentais impuissant en regardant la télé. Je me suis dit que ce n’était qu’à 2.000 km et que je pouvais essayer de faire quelque chose ». Il assure : « Une fois que vous y êtes allés, ce n’est pas compliqué de rester motivé pour aider. »

Les Convois vers l’espoir, une association qui en fédère plusieurs

Les Convois vers l’espoir regroupent plusieurs associations, de l’Isère en Haute-Loire, en passant par Toulouse et même Bordeaux. « On fédère plusieurs petites associations dans toute la France mais notre but est de rester à taille humaine avec des bénévoles qui ont des métiers à côté. On veut éviter d’avoir des frais de fonctionnement, des salariés et des lourdeurs administratives », développe le président François Bompard. C’est aussi la force de l’association lyonnaise pour continuer de mobiliser à travers les mois.