Extrême droiteQui se cache derrière le nouveau groupuscule « La Bastide bordelaise » ?

Qui se cache derrière le nouveau groupuscule « La Bastide bordelaise » ?

Extrême droiteActive depuis quelques mois, la Bastide bordelaise réunit de jeunes militants d’extrême droite et fait parler d’elle depuis la dissolution de Bordeaux nationaliste
Le 12 juin dernier, les membres de la Bastide bordelaise ont déployé une banderole pendant la marche des fiertés.
Le 12 juin dernier, les membres de la Bastide bordelaise ont déployé une banderole pendant la marche des fiertés. -  Twitter / Twitter
Nelio Da Silva

Nelio Da Silva

L'essentiel

  • Fondée en septembre dernier par deux anciens militants de Génération Z, la Bastide bordelaise réunit désormais entre 40 et 45 militants d’extrême droite.
  • Les deux membres fondateurs se sont rencontrés en marge d’opérations militantes pendant la campagne des dernières élections présidentielles.
  • Ils se défendent d’être « dans la continuité de Bordeaux nationaliste » bien qu’ils aient récupéré le même local et qu’au moins un membre ait fait partie du groupe dissout en février dernier.

Un mercredi après-midi ensoleillé à Bordeaux, Yanis ouvre le grand portail surplombé de fils barbelés qui délimite l’entrée d'une bâtisse proche de la barrière de Bègles. Celle-ci accueillait Le Menhir et Bordeaux nationaliste jusqu’à sa dissolution. « C’est un pur hasard, tempère ce cadre de la Bastide bordelaise. Je ne savais même pas que c’était l’ancien local de BN. Je connaissais le propriétaire, alors je l’ai démarché pour trouver un local. Au début, on devait en avoir un à Saint-Michel, mais on s’est dit que ce serait compliqué. »

Clément*, l’autre fondateur de la Bastide, vit à Paris pour suivre ses études. Si Yanis se trouvait sur le banc des prévenus pour des violences en réunion commises à Saint-Michel en juin dernier, tous les deux étaient présents à l'audience du 7 avril dernier. Violences volontaires avec armes, injures publiques ou encore incitation à la haine ou à la violence étaient les charges retenues contre les neuf individus ce jour-là qui avaient visiblement pour projet de semer la pagaille lors de la marche des fiertés.

C’est d’ailleurs après cette action qu’est venue l’idée de créer cette « section ». Le but ? « Se retrouver entre gens qui ont les mêmes idées », lance Clément à l'écran, depuis son canapé dans la capitale. Et Yanis de renchérir : « C’est aussi pour sensibiliser la population bordelaise qui est réputée pour être assez bourgeoise, et qui ne pourrait pas forcément voir le danger arriver ».

En cause, « l’insécurité et l’immigration »

De quel danger parlent-ils ? Clément prévient que « ça ne va pas tarder à partir en live ». En cause, « l’insécurité et l’immigration », selon ces deux anciens militants de Génération Z. « Je me suis toujours dit qu’une ville comme Bordeaux ne pouvait pas tomber aussi bas qu’elle l’est maintenant », ajoute le plus jeune des deux. Et Yanis d’ajouter : « aujourd’hui, même si les médias n’en parlent pas, les conflits sont déjà civilisationnels. Il y a une civilisation qui est en train d’en remplacer une autre ». Eux, se défendent d’avoir recours à la violence et ne revendiquent que des « actions pacifiques ». Leur dernier passage au tribunal démontre le contraire. Mais ils ripostent en pestant : « la violence, elle est toujours venue d’abord d’en face. »

L’accès à ce contenu a été bloqué afin de respecter votre choix de consentement

En cliquant sur« J’accepte », vous acceptez le dépôt de cookies par des services externes et aurez ainsi accès aux contenus de nos partenaires.

Plus d’informations sur la pagePolitique de gestion des cookies


Si, au départ, ils étaient huit à penser à l’avenir du groupe, ils sont désormais « 40 ou 45 militants » et les fondateurs affirment recevoir des demandes « tous les jours, même si l’objectif n’est pas d’être le plus possible ». « Et on n’a pas envie d’avoir des mecs qui ne réfléchissent pas et nous mettent dans la sauce », explique Clément qui admet avoir encore « du boulot à faire » : « il faut qu’on arrive à tenir nos militants. » Et pour cause, Yanis a été jugé pour « violences avec arme » pour avoir jeté des graviers sur des participants à la marche des fiertés et plusieurs mois de sursis ont été requis contre les deux fondateurs.

Si Clément, 23 ans, a grandi à Bordeaux, Yanis est originaire de Chambéry (Savoie) et n'a rejoint la capitale girondine qu’en 2018. A 26 ans, il se définit comme un « italien fasciste » : « Je n’ai pas honte de le dire, le fascisme est une belle chose. Il n’a prôné aucune idéologie haineuse. » C’est de son père que lui viennent ses convictions. « J’ai été une racaille, puis j’ai eu mon premier enfant très jeune et mon père est revenu vivre en France. Les planètes se sont alignées », analyse Yanis. Selon lui, le racisme est « une invention de la gauche, dont elle se sert pour justifier sa méconnaissance de l’histoire. Moi, je suis métis et c’est ce qui emmerde les gauchistes. »

D’ailleurs, Yanis affirme « n’avoir jamais autant connu le racisme » que dans son quartier de Chambéry et, aujourd’hui, il a trouvé sa place parmi les militants de la « section » : « Je suis un peu leur grand frère. »

« On n’est pas dans la continuité de Bordeaux nationaliste »

De son côté, Clément est plus jeune et est passé par divers groupes de militants avant d’intégrer Génération Z lors des dernières élections. Optimiste, il se réjouit que « de plus en plus de personnes soient en train de se rendre compte des problèmes de la France ». « D’ailleurs, on le voit aux élections, je pense qu’un jour on gagnera », poursuit celui qui se défend d’avoir « quelque chose à voir avec Bordeaux nationaliste ».



Reste que l'un des hommes qui accompagnaient Clément et Yanis au tribunal le 7 avril dernier était identifié comme un militant du groupe récemment dissout. « On n’est pas dans la continuité de BN, explique encore Clément. On n’est pas nationalistes, on est identitaires. C’est un plan beaucoup plus large dans lequel on défend la triple identité : locale, nationale et européenne. On a des camarades au Portugal, en Angleterre, en Espagne, etc. Partout. Si demain il y a un conflit armé ou économique grave qui va pousser les gens à sortir dans les rues, ce qu'on n'espère pas, alors il faudra bien qu’on se trouve des alliés. Quand on voit ce qui se passe en Ukraine, on se dit que ce n'est pas impossible. »

En attendant, les membres de la Bastide bordelaise se préparent en se réunissant près d’une fois par semaine à l'occasion d'un atelier de sport de combat, en plus des sessions de stickage. Le groupe ne compte pas s’arrêter là : « On va bientôt reprendre de plus belle, se réjouit Clément. Dès que les travaux du local seront terminés, on va pouvoir organiser des conférences et des soirées pour se retrouver. »