Pourquoi faut-il se méfier des chenilles processionnaires ?
ça gratte•Cet insecte, qui sévit au printemps, peut provoquer d’importantes réactions
Anissa Boumediene
L'essentiel
- Chaque année au printemps, les chenilles processionnaires sortent de leur cocon.
- Avant de se transformer en papillons, ces insectes, couverts de poils urticants, peuvent représenter un risque sur la santé humaine et animale.
- 20 Minutes vous explique comment les reconnaître, s’en prémunir et réagir en cas de contact.
On les reconnaît à leurs longs poils, qui leur donnent un aspect duveteux. Et à leur façon de se déplacer en longue file indienne. Comme chaque année au printemps, les chenilles processionnaires sont de retour. Mais ne vous fiez pas à leur allure inoffensive et gardez vos distances : avant qu’elles ne deviennent papillons, ce sont des insectes redoutables, en raison de leurs poils extrêmement irritants.
Les risques d’en croiser sont-ils élevés ? Quels types de réactions peuvent-elles provoquer ? Comment s’en protéger et comment réagir en cas de contact ? 20 Minutes vous explique tout.
Où et quand les chenilles processionnaires sévissent-elles ?
Il en existe de deux types : « Les chenilles processionnaires du pin, d’un brun orangé, et celles du chêne, d’un gris argenté, indique l’Anses. Elles mesurent jusqu’à 4 cm de longueur à la fin de leur croissance ».
Au départ présentes dans le sud de l’Hexagone, elles ont colonisé l’ensemble du territoire à la faveur du réchauffement climatique. « La chenille processionnaire du pin est présente sur une très large partie du territoire, essentiellement dans le Sud, le centre et l’ouest de la France. On la croise majoritairement entre janvier et mai, détaille l’Anses. La chenille processionnaire du chêne est essentiellement présente dans le Nord-Est, la région parisienne et le nord-ouest de la France, et peut être présente dans des régions du sud. On la croise majoritairement entre avril et juillet ».
Quels risques représentent-elles sur la santé ?
Les chenilles processionnaires sont couvertes de « poils (ou soies) urticants, qui peuvent entraîner des réactions inflammatoires notamment sur la peau, les yeux ou les voies respiratoires, parfois graves chez les personnes qui y sont exposés », prévient l’Anses. Des poils « microscopiques », tels des « aiguilles ou des harpons, illustre l’agence sanitaire. Ils se détachent très facilement du corps de la chenille lorsqu’elle se sent menacée ».
Et il n’est même pas nécessaire d’être en contact direct avec l’insecte pour présenter des symptômes, car « ses poils se détachent et sont transportés très facilement sous l’effet du vent, ajoute l’agence sanitaire. L’analyse des données des centres antipoison a montré que, dans un cas sur deux, les personnes exposées n’avaient pas vu de chenilles. Elles ont été exposées à des poils déposés par le vent sur leurs habits, le pelage d’animaux, du matériel de jardinage ou sur une terrasse ».
C’est là que le grattage guette. « Les chenilles processionnaires sont urticantes, au même titre que les orties, rappelle le Dr Madeleine Epstein, allergologue. Il s’agit d’une réaction non allergique : 100 % des personnes qui vont toucher une chenille processionnaire vont faire une réaction, qui se manifeste par l’apparition de petits boutons rouges et des démangeaisons ». La plupart du temps, « une exposition aux soies urticantes se traduit par une simple démangeaison accompagnée de boutons qui disparaissent au bout de deux ou trois jours, abonde l’ARS des Hauts-de-France. Parfois, la réaction va jusqu’à l’œdème. Et dans certains cas très rares, au maximum 2 à 3 % de la population, cette exposition peut conduire à un choc anaphylactique, une réaction allergique exacerbée nécessitant une hospitalisation ». Mais « c’est très peu fréquent, je n’en ai jamais observé, et le réseau d’allergo-vigilance où nous déclarons tous les chocs anaphylactiques ne fait quasiment pas état de cas, rassure le Dr Epstein. Et dans nos cabinets, ce n’est pas un motif de consultation très fréquent ».
Le risque sanitaire représenté par les chenilles processionnaires a toutefois été jugé suffisamment sérieux, puisqu’elles ont été ajoutées à la liste des espèces dont la prolifération est nuisible à la santé humaine par décret, publié en avril 2022 au Journal officiel.
Sont-elles dangereuses pour les animaux ?
Ils sont « les premières victimes de cette contamination (chiens, chats, chevaux, moutons et vaches), répond l’ARS des Hauts-de-France. Curieux, ils ne manqueront pas de coller la truffe ou la langue sur une belle procession de chenilles. L’inflammation et l’œdème de la langue ou de la muqueuse buccale résultant peuvent les empêcher de se nourrir ou de s’abreuver ».
Dans les cas les plus graves, « l’envenimation peut aller jusqu’à des nécroses sur toute la région buccale, et les ablations de la langue ne sont pas rares dans ce cas, alerte l’agence sanitaire. Nombreux sont les vétérinaires ayant dû sacrifier des animaux gravement blessés par la chenille processionnaire ».
Comment se protéger et comment réagir en cas d’exposition ?
En premier lieu, il ne faut logiquement « pas toucher les chenilles, leur nid ou les arbres porteurs de nid et garder les enfants éloignés, recommande l’Anses. Si l’on vit à proximité d’arbres infestés, éviter de faire sécher le linge à l'extérieur et lavez les fruits et légumes cueillis ».
En cas de contact, la marche à suivre dépend de la réaction développée. Ainsi, « en cas de signes d’urgence vitale (détresse respiratoire, réaction allergique grave) : appelez le 15 ou le 112 », recommande le ministère de la Santé. Ou « consultez aux urgences », ajoute l’Anses. « En cas d’autres symptômes (rougeur, démangeaisons), appelez un centre antipoison ou consultez un médecin, poursuit le ministère. En cas de suspicion d’exposition : prenez une douche et changez de vêtements ». Et lavez-les à haute température pour neutraliser leur toxine.
Si la réaction est modérée, « on prescrit toujours des antihistaminiques, qui vont soulager les symptômes de l’urticaire, indique le Dr Epstein. Et pour apaiser le feu de l’inflammation et des démangeaisons, on peut aussi mettre un linge mouillé à l’eau froide. S’il y a eu contact oculaire, en cas de réaction conjonctivale, un collyre antihistaminique soulagera. Si c’est une réaction au niveau de la peau des paupières, que les yeux sont enflés et fermés, un antihistaminique par voie générale est recommandé ».
A ce jour, rappelle l’Anses, « il n’existe aucune solution unique ni définitive. Il n’est pas possible d’éradiquer ces deux espèces » de chenilles processionnaires.