Quelles espèces choisir pour manger du poisson sans mettre les espèces en danger

CONSOMM'ACTEURS Les ressources halieutiques ne sont pas infinies. Avant de manger poisson, apprenez à le choisir avec discernement…

Marc Ricard
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La question à se poser avant tout est : l’espèce que je souhaite consommer est-elle menacée?
La question à se poser avant tout est : l’espèce que je souhaite consommer est-elle menacée? — Sipa

La maman des poissons, elle est bien gentille, mais elle ne pond pas des milliards de rejetons chaque année. Conséquence logique : les ressources halieutiques ne sont pas inépuisables. « 31 % des stocks de poissons sont surexploités. En Méditerranée, ce chiffre grimpe à 93 % », rapporte l’association WWF dans un rapport de 2017. Alors comment concilier son appétit pour le poisson et son envie de ne pas nuire à la survie des espèces ? En adoptant quelques réflexes très simples…

Privilégier la consommation d’espèces « secondaires »

Tout d’abord, il convient de se débarrasser d’un certain nombre d’idées reçues. Le fait qu’une espèce de poissons est vendue sur tous les étals n’est pas la preuve que ses ressources sont inépuisables. C’est même souvent le contraire. « Le bar, la lotte ou encore le cabillaud, que l’on consomme beaucoup en France, sont régulièrement touchés par la surpêche », indique Alain Biseau, biologiste des pêches à l’Institut Français de Recherche pour l’Exploitation de la Mer (Ifremer). La question à se poser avant tout est : l’espèce que je souhaite consommer est-elle menacée ? Et une rapide recherche sur le Net permet d’obtenir une première réponse.

Si tel est le cas, à l’instar du thon rouge, des poissons de grands fonds (le sabre noir, la lingue bleue, etc.) ou encore le requin, il est recommandé de s’abstenir. « L’idéal est d’adopter une consommation raisonnée et diversifiée pour limiter la pression sur les stocks disponibles », explique Alain Biseau. En se tournant notamment vers les groupes de poissons dits « secondaires » moins courtisés par les consommateurs : « le chinchard, le maquereau, le lieu noir ou le tacaud ​ ».

Origine, espèce et lieu d’habitat : des éléments à considérer

Néanmoins, d’autres critères sont à prendre en compte au moment de jeter son dévolu sur un produit de la mer. D’abord, l’indice de saisonnalité, qui correspond à la période durant laquelle les poissons d’une même espèce sont en nombre suffisant pour assurer leur renouvellement. Ensuite, « l’état du stock de l’espèce, la technique de pêche utilisée pour l’obtenir et son impact sur l’habitat », énumère Alain Biseau. Evaluer le stock permet de s’assurer que la pression de la pêche exercée sur une espèce n’altère pas sa capacité de reproduction.

Puisque certaines méthodes de pêche, comme le chalutage de fond, génèrent d’importants dégâts sur l’écosystème marin, il convient de favoriser l’achat de poissons issus de pratiques durables comme la pêche à la ligne ou le casier qui contribuent à en diminuer l’impact. « Bien que cela ne soit pas un gage de pêche totalement durable », nuance Alain Biseau. Par ailleurs, certaines espèces peuvent être consommées sans danger si elles proviennent de certaines régions du monde mais doivent être évitées si elles sont pêchées dans d’autres.

Par exemple, « la sole de mer du Nord est victime de surpêche donc à proscrire à l’achat. En revanche, il est éthiquement correct de consommer de la sole de mer Baltique car les stocks sont plus importants et la pêche moins intensive ».

La question des labels

Depuis le 1er janvier 2002, le mode de production et l’origine de l’espèce doivent obligatoirement être mentionnés sur l’étiquette d’un produit à base de poisson. Pour les plus distraits, il est encore possible de s’y retrouver grâce aux labels (« Pavillon France », « Pêche Durable MSC », « Label Rouge », etc..) destinés à renseigner le consommateur sur les conditions de production et de capture des espèces ainsi qu’à distinguer les organismes de pêches qui travaillent de manières durables.

Cependant, « les labels ne sont pas parfaits. Aucun ne fait l’unanimité car ils ne prennent pas en compte tous les critères nécessaires. Mais ils sont une bonne indication et incitent le consommateur à faire lui-même son enquête », souligne Alain Biseau. Plusieurs ONG ont mis au point leur « guide des espèces » qui permettent de savoir si la consommation de certains poissons est ou non sans danger pour l’espèce. Enfin, demander simplement à son poissonnier ou son commerçant demeure une option parfaitement envisageable.