SMACK... OU PASComment le coronavirus a chamboulé la bise à la française

Coronavirus : « Seulement à ma famille », « Plus jamais aux collègues »… Comment la pandémie a contaminé la bise à la française

SMACK... OU PASLa pandémie de coronavirus est pour certains l’excuse parfaite pour ne plus avoir à faire la bise autour de soi
Dans le monde d'avant la pandémie, même Tom Cruise et Victoria Beckham se faisaient la bise.
Dans le monde d'avant la pandémie, même Tom Cruise et Victoria Beckham se faisaient la bise. - JMA/WENN.COM/SIPA / SIPA
Anissa Boumediene

Anissa Boumediene

L'essentiel

  • Depuis le début de la pandémie de coronavirus, tout le monde est appelé à respecter les gestes barrières pour tenir le virus à distance.
  • La bise, habitude très française, a été abandonnée par beaucoup. Au grand dam de certains, en manque de ce geste affectueux.
  • Mais pour d’autres, ne plus faire la bise à tout va est une bénédiction.

«Salut ! (muah) Tu (muah) vas (muah) biennnnn ? ». Les fans des Inconnus l’auront reconnu, c’est un extrait du clip Auteuil, Neuilly, Passy, dans lequel les trois compères caricaturaient la bise à la française. Une coutume abandonnée par beaucoup depuis le début de la pandémie de coronavirus. Désormais, c’est plutôt : « Je ne te fais pas la bise, hein ! » On se souhaite bien le bonjour de loin, consentant au mieux à un check du coude.

Mais pour combien de temps ? Alors que la vaccination progresse, que la situation sanitaire s’améliore et que la vie sociale reprend, ce geste barrière en chef résistera-t-il ? Etes-vous pressés d’embrasser vos proches comme du bon pain ? Et si au contraire, beaucoup s’accommodaient de ne plus avoir à bisouiller leurs collègues et les relous de leur entourage ? Alors, quand la pandémie aura (enfin) disparu et que la bise sera revenue, ses opposants s’en trouveront-ils fort dépourvus ?

« Une tradition française qui crée du lien »

Incongruité totale hors de nos frontières, « la bise est une tradition française qui crée du lien, estime Antoine, qui a répondu à notre appel à témoignages. J’avais l’habitude de la faire avant et depuis le Covid-19, je ressens moins de proximité avec les gens ». « Je le vis comme une absence de convivialité et de spontanéité, renchérit Véronique. Cela crée des barrières invisibles et ne facilite pas le relationnel ». Un avis partagé par Poutrick : « C’est un usage qu’il ne faut pas perdre, un geste de proximité et de chaleur humaine ». Pour lui, « une société où l’on se saluerait d’un signe de tête à plusieurs mètres de distance serait tellement fade. Et ce serait cautionner un impossible retour à la normale ».

La grève actuelle – subie ou consentie – de la bise est en effet le signe que la pandémie pèse encore sur notre quotidien. C’est précisément pour cette raison que « j’ai hâte que tout redevienne comme avant, indique Noémie, quand faire la bise sera le signe d’une bonne santé générale. Il y en a assez de cette vie bizarre ! »

« Un signe d’affection »

D’autant que « c’est un signe d’affection envers la personne qu’on embrasse », estime Lionel. Alors certains, à l’instar d’Emmanuel, n’ont pas changé leurs habitudes : « Moi et mon entourage n’avons jamais cessé de la faire. Que ce soit la plupart de mes amis ou ma famille, nous avons continué à vivre normalement, sans peur ».

La peur du coronavirus, c’est pourtant ce qui a poussé une majorité de Françaises et de Français à renoncer à ces embrassades chaleureuses, qu’ils rêvent d’échanger à nouveau. « Ça me manque les bisous et les accolades. Depuis que je suis privé de ces simples gestes affectueux, je fais une dépression », confie Louis. C’est la raison pour laquelle Marie a « hâte de faire [sa] deuxième injection de vaccin. Comme ça, je pourrai embrasser ma famille comme avant ! » Bah oui, « quand on est vacciné, pourquoi ne pas embrasser sa famille ? », s’interroge Françoise, qui subit cette période comme « un crève-cœur ».

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« Ne plus faire la bise aux collègues, c’est que du bonheur ! »

En revanche, « ne plus faire la bise aux collègues, c’est que du bonheur ! Si je peux maintenir ce geste barrière au travail, je le ferai », promet Laurence. Il faut dire que « la faire à une quarantaine de collègues chaque jour, c’était long ! », abonde Christelle, qui « réserve ce geste à la famille, maintenant qu’on est tous vaccinés ». Comme elles, Betty continuera « à garder [ses] distances avec les collègues », elle qui en avait marre de la faire « par politesse ».

Cécile ne l’a d’ailleurs jamais aimée. « Cela impose une proximité physique dont on n’a pas nécessairement envie, pour ne pas être perçue comme malpolie. Le Covid-19, c’est une bonne excuse pour refuser ». Odile, elle, se souvient, « longtemps avant la pandémie, d’une première réunion où je ne connaissais personne. J’ai subi les deux bises d’accueil de certains collègues, et j’ai ressenti ça comme une incivilité. L’arrêt de la bise au travail, c’est une délivrance pour beaucoup de femmes ! » Comme Amélie, qui se sent « libérée d’une sacrée corvée ». Mais aussi pour les hommes. Comme Jean-Marc, pour qui c’est « une bénédiction ».

« Maintenant, je checkerai du poing tous ceux que je ne connais pas »

Et il n’y a pas que les collègues que certains sont ravis de ne plus embrasser. « Avant, je me sentais forcée de faire la bise, surtout aux inconnus qu’on rencontre en soirée, explique Camille. Depuis la pandémie, c’est fini, et pourvu que ça dure ! » Parce qu'« en tant que fille, faire la bise à tout le monde sous prétexte que ce sont des amis d’amis, cela m’a toujours dérangée, raconte Julie. Maintenant, je checkerai du poing tous ceux que je ne connais pas ».

Un sentiment partagé par Elisa, qui n’a « jamais apprécié ces manifestations baveuses en soirée ». Originaire de Suisse, « j’ai été très surprise en venant en France quand des inconnus me faisaient la bise », se souvient Béatrice.

Un contact « sans échange de fluides »

Pour certains, la bise ne fera pas son retour même dans la sphère familiale. « Je n’ai pas besoin d’embrasser ma famille pour qu’elle sache mon affection », indique Marig. Pareil pour Brigitte, qui n’y voit qu’un « geste de convenance. J’ai toujours préféré une étreinte : un vrai partage d’affection avec un contact très chaleureux, mais sans échange de "fluides" ».

Isabelle, elle, a tranché : « C’est une coutume ridicule : on s’en fait quatre en Bretagne, deux dans l’Aude – mais trois à Montpellier, et selon d’où l’on vient, on tend d’abord la joue droite, ou la joue gauche ! Avec à la clé des baisers sur la bouche accidentels… Alors c’est terminé, et je ne me cache même pas derrière le prétexte du virus. Je préfère un bon signe de tête à ceux que je rencontre pour la première fois, et une accolade réconfortante à ceux que j’aime et qui m’aiment ».

« Je n’ai pas été malade une seule fois »

Enfin pour beaucoup, au-delà d’un prétexte, la peur du coronavirus est une vraie motivation. « Souvent l’hiver, les gens vous font la bise même malades, et quand on a des anticorps un peu faiblards, on chope tous les virus ! », nous dit Camille. Or, arrêter les embrassades s’est révélé être un geste barrière d’une redoutable efficacité. « Depuis mars 2020, je n’ai pas été malade une seule fois alors qu’en temps normal, j’ai une rhinopharyngite deux fois par an », constate Alexandra.

Véronique, pour qui l’absence de bise signifiait absence de convivialité, reconnaît qu’elle a « pu éviter cet hiver les gastros et sinusites » auxquelles elle n’échappe pas en temps normal. Même constat pour Gaëlle : « La bise aux gens dont je ne suis pas proche, c’est définitivement terminé. Merci les gestes barrières ! »