INTERVIEW«Easy endo facilite la prise en charge des femmes victimes d’endométriose»

Bordeaux : « Faciliter la prise en charge des femmes victimes d'endométriose pour qu’elles aient un suivi adapté, le plus rapidement possible »

INTERVIEWDeux médecins ont créé un site pour mieux dépister et prendre en charge l’endométriose, en délivrant des conseils au quotidien et en proposant le recours à une équipe pluridisciplinaire
Plus d'une femme sur dix souffrirait d'endométriose.
Plus d'une femme sur dix souffrirait d'endométriose. - JAUBERT/SIPA
Elsa Provenzano

Propos recueillis par Elsa Provenzano

L'essentiel

  • L’endométriose est une maladie chronique qui se manifeste par la présence de tissu utérin en dehors de l’utérus.
  • Deux médecins viennent de créer le site easy-endo pour guider au quotidien les malades qui se retrouvent parfois en errance médicale.
  • Une bonne prise en charge peut permettre d’atténuer beaucoup les symptômes associés à la maladie, sans pour autant faire disparaître les lésions liées à la maladie.
Le docteur Marie Ceccarelli est spécialisée dans la prise en charge de l'endométriose.
Le docteur Marie Ceccarelli est spécialisée dans la prise en charge de l'endométriose. - easy endo

Le 8 mars dernier, deux médecins spécialisés dans la prise en charge de l’endométriose, Marie Ceccarelli et Elodie Hénot, ont décidé de lancer Easy endo, un site gratuit pour aider au quotidien les femmes qui souffrent de cette maladie chronique qui se manifeste par la présence de tissu utérin en dehors de l’utérus. La plateforme a obtenu une subvention « Prototype numérique » de la part de la région Nouvelle-Aquitaine qui soutient l’action de la start-up bordelaise en faveur d’une santé accessible à toutes et tous. Le docteur Marie Ceccarelli a accepté de répondre aux questions de 20 Minutes.

Comment est née l’idée d’Easy endo ?

Avec Elodie Hénot, on voit beaucoup de patientes, et on a eu une réflexion sur une solution pour répondre aux demandes qu’on ne pouvait pas honorer, constatant qu’il peut y avoir jusqu’à un an d’attente dans les centres spécialisés dans l’endométriose. Les femmes arrivaient après un parcours de soins assez chaotique, après sept, voire dix années d’errance médicale où on les baladait sans trouver le diagnostic qui pouvait expliquer leurs douleurs. Ce qui m’a aussi interpellée, c’est de voir venir des femmes de très, très loin qui prenaient des avions ou des trains. On s’est dit qu’il fallait pouvoir leur donner accès à des informations de spécialistes près de chez elles et faciliter leur prise en charge pour qu’elles aient un suivi adapté, le plus rapidement possible.

Quels sont les principaux freins à une prise en charge adaptée ?

Si dans sa famille il y a beaucoup de femmes qui ont de l’endométriose et qui ne le savent pas, une femme peut entendre : « C’est normal tu tiens ça de ta mère ou ta grand-mère, on est comme ça dans la famille » et c’est un premier frein. Et il y a encore aussi des gynécologues qui disent que c’est normal d’avoir mal pendant ses règles… Il y a un projet récent du ministère de la Santé de développer des filières endométriose dans chaque région. Il y a deux ans quand on a commencé à réfléchir à Easy endo, il n’y avait rien. Si la patiente a déjà une idée de ce dont elle souffre, elle va aller consulter des spécialistes et ne pas passer par je ne sais combien de généralistes ou de gynécologues qui ne connaissent pas la maladie. Il faut savoir quels examens faire et consulter des radiologues spécifiquement formés, pour gagner du temps. C’est une maladie liée aux règles donc si on les stoppe, on enlève beaucoup de symptômes et on empêche la maladie de progresser.

Quelles formes peut prendre la maladie ?

On voit toutes les formes possibles : des lésions superficielles ou envahissantes dans tout le pelvis ou même à distance. Ce qui rend la maladie souvent mal comprise, c’est qu’il n’y a pas de corrélation entre l’intensité des symptômes et la gravité des lésions. On peut avoir des femmes avec des lésions très minimes qui sont quand même invalidées et à l’inverse, des lésions plus graves chez des femmes qui n’ont aucun symptôme. C’est assez complexe il faut vraiment connaître la maladie.

Comment le site Easy-Endo aide-t-il les femmes à gérer la douleur ?

Il faut vraiment une prise en charge pluridisciplinaire. Stopper les cycles ne suffit pas toujours à enrayer la douleur car il y a aussi des troubles digestifs et urinaires associés. On travaille en réseau avec des kinésithérapeutes, des ostéopathes, des médecins de la douleur, des sophrologues, des sexologues etc. Il y a aussi besoin de soigner son alimentation donc on travaille avec des nutritionnistes spécialisés. Le but d’Easy endo, c’est de donner des conseils d’hygiène de vie et de pointer des thérapies complémentaires adjacentes à associer. Il propose aussi un agenda personnalisé qui permet d’annoter ses symptômes au quotidien et d’exporter une synthèse sous forme de graphique pour le médecin qui peut voir en clin d’œil ce qui s’est passé entre deux consultations. On propose aussi des lives chaque mois avec un ou deux experts et des questions anonymes sont recueillies via un tchat.

Peut-on guérir de l’endométriose ?

Non, au sens où les lésions restent à leur place mais on peut faire en sorte que la maladie soit stabilisée et que les symptômes s’éteignent. La plupart de mes patientes sont âgées de 20 à 35 ans et les cas les plus lourds sont ceux où on ne découvre la maladie qu’à 35 ans, dans ce cas-là les répercussions sont plus importantes. Cela se calme à la ménopause, car l’endomètre est alors asséché. Pour celles qui ont eu une forme très sévère, elles peuvent néanmoins garder quelques symptômes liés à des adhérences ou certains troubles digestifs.

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