INNOVATIONUn « cuir végétal » fabriqué à partir de bananes et de mangues déclassées

Nord : Un « cuir végétal » fabriqué à partir de bananes et de mangues déclassées

INNOVATIONUn couple d’habitants de Wattrelos a inventé un procédé qui permet de transformer des fruits destinés à la poubelle en une nouvelle matière. Les propriétés de ce cuir végétal lui ouvrent un très large champ d’application
Bananes et mangues sont la matière première utilisée par Vegskin.
Bananes et mangues sont la matière première utilisée par Vegskin. - C.Follain / 20 Minutes / 20 Minutes
Mikaël Libert

Mikaël Libert

L'essentiel

  • L’industrie du cuir est l’une des plus polluantes au monde même si la filière tend à réduire son impact environnemental.
  • Il existe des alternatives, outre les similis, comme le cuir de poisson.
  • A Wattrelos, dans le Nord, un couple développe un procédé pour fabriquer une sorte de cuir végétal fait à partir de fruits.

Les vaches vont avoir la banane. On peut tourner ça dans tous les sens, le cuir n’est pas la matière la plus écolofriendly qui soit. Entre l’élevage des bovins, le transport, les procédés de tannage plus ou moins polluants et la teinture, l’impact environnemental est phénoménal, notamment en Inde, premier pays exportateur de cuir. Alors certes, la filière s'est mise à bosser sur la question mais on est encore loin d’une pollution zéro. S’il existe des alternatives, comme le cuir de poisson, elles demeurent émergentes et trop peu répandues. Demain, il faudra compter avec Vegskin, une « nouvelle matière » élaborée par des nordistes avec des fruits déclassés.

Loïc Debrabander et sa compagne ne sont pas des extrémistes de la tendance vegan, végétarienne ou même végétalienne. Comme certains le font, et comme beaucoup devraient le faire, ils s’intéressent juste un peu à leur planète. Et, lorsqu’il y a quelques années, ils ont découvert à quel point l’élevage intensif de bovins se faisait au détriment de l’environnement, ces deux nordistes ont décidé de lever le pied. « On a cherché des alternatives au cuir. Puis, en se renseignant, on découvre que ces mêmes alternatives ne sont pas si propres que ça », déplore Loïc. Entre ça et le gaspillage alimentaire, le couple s’est dit qu’il y avait peut-être un truc à creuser.

Un produit différent sans utiliser la pétrochimie

L’idée de valoriser des déchets alimentaires pour en faire une sorte de cuir a mis du temps à mûrir, notamment parce que ni lui, ni sa compagne ne font partie du milieu du textile. « Ce sont nos valeurs qui nous ont poussées à monter le projet, il y a environ un an », insiste Loïc. Le but était de proposer un produit différent de ce qui existe et sans utiliser la pétrochimie comme c’est souvent le cas des imitations de cuir. Sur le procédé utilisé, le couple reste discret. Secret même. « On a testé avec des produits locaux d’abord, comme la betterave, la pomme de terre, les champignons. Ça ne donnait rien. Avec les pommes, on commençait à avoir quelque chose de probant mais le mieux, ce sont les bananes et les mangues », concède l’entrepreneur.

Le Vegskin est produit à partir de fruits déclassés.
Le Vegskin est produit à partir de fruits déclassés. - Vegskin

Selon lui, cent tonnes de bananes permettent de fabriquer entre 5.000 et 8.000 m2 de cuir végétal. « Ce sont des produits écartés des circuits de vente et destinés à la poubelle parce qu’ils sont abîmés. On estime qu’il y a environ 10 % la perte sur chaque chargement. La manne n’est donc pas près de se tarir », déplore Loïc Debrabander.

Le « Vegskin » est désormais au point. Selon son créateur, la matière est souple, résistante, résiliente et biodégradable, deux dernières propriétés que ne possède pas le cuir. Le coût de production le positionnera sur un marché équivalent au cuir haut de gamme français : maroquinerie, chaussures, sellerie, habillages intérieurs de véhicules… Le seul bémol, ce sont les couleurs : « si l’on veut rester dans la logique environnementale du produit, il nous est impossible de proposer du blanc ou du bleu. Ces couleurs demanderaient un traitement chimique qui n’entre pas dans nos valeurs », reconnaît l’inventeur.

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