EPIDEMIEMassivement vaccinée, Israël subit une quatrième vague due au variant Delta

Coronavirus en Israël : Pourquoi le pays, massivement vacciné, subit une quatrième vague

EPIDEMIEL’Etat hébreu, l’un des premiers pays au monde à avoir vacciné massivement sa population, subit actuellement une quatrième vague de coronavirus
Le Premier ministre israélien Naftali Bennett, 49 ans, a reçu sa 3e dose de vaccin anti-Covid, et appelle ses concitoyens à l'imiter, alors que l'Etat hébreu subit actuellement une quatrième vague épidémique de coronavirus.
Le Premier ministre israélien Naftali Bennett, 49 ans, a reçu sa 3e dose de vaccin anti-Covid, et appelle ses concitoyens à l'imiter, alors que l'Etat hébreu subit actuellement une quatrième vague épidémique de coronavirus. - JACK GUEZ / AFP / AFP
Anissa Boumediene

Anissa Boumediene

L'essentiel

  • Dès la fin 2020, Israël avait lancé une campagne massive de vaccination anti-Covid, administrant deux doses de vaccins aux plus de 16 ans.
  • Au printemps, le pays a frôlé l’immunité collective, mais l’apparition du variant Delta, plus contagieux, a changé la donne.
  • Pour le nouveau gouvernement, qui souhaite éviter un quatrième confinement général de la population, il y a urgence à renforcer la couverture vaccinale.

C’était l’un des meilleurs élèves en matière de vaccination anti-Covid, mais Israël n’a pas échappé à une quatrième vague de coronavirus. L’Etat hébreu, parmi les premiers au monde à avoir vacciné massivement sa population, connaît actuellement un rebond épidémique provoqué par le variant Delta.

En cause, une levée peut-être trop précoce des restrictions, mais surtout des millions de personnes réfractaires au vaccin anti-Covid, constituant un important réservoir de circulation du virus. Pour les autorités sanitaires, pas d’autre choix que de mettre en place de nouvelles restrictions. Et de vacciner tous ceux et celles qui n’ont pas encore reçu le vaccin, y compris les enfants.

L’immunité collective presque atteinte

Tout avait pourtant été anticipé. Fin 2020, Israël donne le coup d’envoi de sa campagne de vaccination anti-Covid. L’Etat hébreu, qui a signé un contrat avec Pfizer, reçoit rapidement des millions de doses et, à l’inverse de la France qui réserve ses doses aux plus âgés et aux plus vulnérables, Israël vaccine massivement toute sa population, dès l’âge de 16 ans. En trois mois, 60 % des Israéliens sont vaccinés. Une réactivité qui paie rapidement : contaminations, hospitalisations et décès liés au Covid-19 chutent. Le pays se rapproche de l’immunité collective, et lève progressivement ses restrictions dès le printemps. Alors que la France boude parce qu’elle se reconfine pour la troisième fois, en Israël, les terrasses rouvrent et la vie d’avant reprend. Et le 9 juin, aucun cas Covid n’est recensé dans le pays, qui pense alors avoir remporté sa bataille contre le virus.

Mi-avril, le port du masque en extérieur n’est plus obligatoire. Le 1er juin, Israël supprime son passeport vert – l’équivalent du pass sanitaire –, et deux semaines plus tard, le port du masque en intérieur n’est plus obligatoire non plus. Le début de l’été est placé sous le signe de l’insouciance, mais l’arrivée du variant Delta, beaucoup plus contagieux que les souches précédentes, rebat les cartes de l’épidémie.

Les non-vaccinés, réservoir important de circulation du virus

Car si une majorité de la population israélienne, qui compte 9,3 millions de personnes, s’est volontiers fait vacciner, une frange d’irréductibles réfractaires au vaccin empêche le pays d’atteindre l’immunité collective. Alors que 5,4 millions de personnes ont reçu leurs deux doses, 1 million d’Israéliens refusent de se faire vacciner. Des refus majoritairement exprimés au sein de la communauté juive ultraorthodoxe, qui représentent environ un tiers de la population adulte du pays, et au sein de la minorité arabe israélienne. « Les taux de vaccination dans la communauté arabe sont trop bas », a déclaré le Premier ministre Naftali Bennett le 9 août. Selon la Galilee Society, une organisation à but non lucratif de santé arabe israélienne, seuls 51 % des Arabes israéliens ont été vaccinés au total, contre 66 % de tous les citoyens israéliens.

A ces chiffres s’ajoutent de jeunes adultes qui n’éprouvent « ni l’envie ni le besoin d’être vaccinés parce qu’ils estiment ne pas être à haut risque de complication ou de mortalité par le Covid », expliquait l’épidémiologiste Antoine Flahault au HuffPost. Autant d’adultes non vaccinés qui constituent un important réservoir de circulation du virus. Un réservoir gonflé par les personnes vaccinées depuis plus de six mois, dont l’immunité conférée par le sérum Pfizer commence à décroître. Mais aussi par la population plus jeune, avec des enfants davantage touchés par le variant Delta.

« Tout le monde s’est endormi quand on a annoncé que l’immunité de masse était quasi atteinte. En réalité, l’efficacité du vaccin était en train de diminuer et le variant Delta est bien plus contagieux que les précédents. Aujourd’hui, on est dans l’urgence », a déclaré au Temps Nadav Davidovitch, épidémiologiste directeur de l’école de santé publique de l’université David-Ben-Gourion. Résultat : ces dernières semaines, les contaminations s'envolent, avec plus de 6.000 nouveaux cas recensés quotidiennement. Et mardi, plus de 8.700 nouveaux cas ont été recensés par les autorités sanitaires, le chiffre le plus élevé depuis le mois de janvier. Une reprise épidémique qui se traduit par une hausse des hospitalisations, avec près de 600 malades pris en charge pour des formes graves du virus.

Renforcer la couverture vaccinale pour éviter un quatrième confinement

Pour le nouveau gouvernement dirigé par Naftali Bennett, l’urgence est d’éviter que la situation sanitaire n’empire et mène à la saturation des hôpitaux du pays dans les prochaines semaines, alors que plusieurs fêtes juives seront célébrées en septembre. S’il a évoqué la possibilité d’un quatrième confinement général, le nouveau Premier ministre veut à tout prix l’éviter. Et mise à cet effet sur le renforcement de la campagne vaccinale. « J’appelle les jeunes qui n’ont pas du tout été vaccinés, et ils sont nombreux : sortez dès aujourd’hui pour vous faire vacciner. De cette façon, vous ne serez pas infecté et ne vous contaminerez personne. Cela sauvera la vie de vos proches », a insisté Naftali Bennett.

Dans le même temps, le Premier ministre de 49 ans a reçu vendredi sa troisième dose de vaccin anti-Covid, encourageant la population à l’imiter et devenant le premier dirigeant du monde à recevoir une dose de rappel. L’Etat hébreu a lancé il y a trois semaines une campagne de troisième dose à destination des plus de 60 ans. Un âge minimal pour ce rappel abaissé à 50 ans le 13 août, et à 40 ans depuis jeudi. « Si vous allez vous faire vacciner avec une troisième dose, nous pouvons éviter un quatrième confinement », a déclaré le chef du gouvernement.

Et les enfants sont également invités à passer par la case vaccination. « Nous étions probablement très proches d’une immunité collective en mars-avril. Mais il était impossible d’atteindre ce seuil alors que les enfants n’étaient pas vaccinés », a assuré Nadav Davidovitch au Monde. Début juin, les autorités ont étendu la vaccination aux jeunes de 12 à 16 ans et depuis le 1er août, les enfants âgés de 5 à 11 ans risquant des complications graves à cause du Covid-19 peuvent être vaccinés. Et ce lundi, Israël a annoncé mettre en place à la rentrée scolaire des stands de vaccination anti-Covid dans les écoles. Les élèves « seront vaccinés dans les locaux des écoles pendant les heures de cours, sous condition d’autorisation parentale », a indiqué le gouvernement israélien, maintenant au 1er septembre la rentrée scolaire.