AGRICULTURELe cours du lait bio plonge et entraîne la filière dans la tourmente

Le cours du lait bio plonge et entraîne la filière dans la tourmente

AGRICULTUREDès cet été, Sodiaal a annoncé à ses éleveurs que le prix du lait serait revu à la baisse afin d’éviter un effondrement
Illustration de vaches laitières dans une ferme de Bretagne.
Illustration de vaches laitières dans une ferme de Bretagne. - C. Allain / 20 Minutes / 20 Minutes
Camille Allain

C. A. avec AFP

C’est la première fois que le marché du lait bio marque le pas. Dopée par une demande croissante de la population française, la production ne cessait de croître ces dernières années, encouragée par des prix d’achat plus généreux pour les producteurs. La parenthèse enchantée semble s’être refermée. Les Français ne buvant pas assez de lait bio, la production nationale se trouve excédentaire et contraint les industriels de la filière à baisser les prix d’achat afin d’éviter un effondrement des cours.

L’alerte est arrivée cet été, quand un acteur majeur, Sodiaal (marques Candia, Entremont), a annoncé à ses producteurs qu’il allait nettement moins payer leur lait. Dix pour cent de la production bio sera payée près de 23 % moins cher pendant un an. Damien Lacombe, son patron « appelle tous les acteurs de la filière bio à maîtriser ses volumes de conversion » de fermes vers ce mode de production, « pour que l’offre se stabilise ».

L’objectif des professionnels du secteur visait à doubler la production en agriculture biologique en cinq ans. Un palier atteint avant l’heure qui a peut-être déséquilibré le marché. En 2020, un milliard de litres sont sortis des fermes bios, représentant 5 % de la collecte nationale. Dans les rayons, le produit est de plus en plus concurrencé par des produits au cahier des charges moins exigeant, moins chers, s’affichant « éthiques, locaux, avec du pâturage… », souligne Benoît Rouyer, économiste au Cniel.

Chez Lactalis, 20 % du lait bio est « déclassé »

Au sein de Lactalis, la collecte de lait bio a augmenté de 12 % sur un an, mais les ventes se sont dans le même temps effritées de 1,6 %. Environ 20 % du lait bio est « déclassé », réorienté vers la filière conventionnelle moins rémunératrice, explique le directeur de la communication, Christophe Piednoël. « C’est à notre charge », « il n’y a pas de baisse de revenu pour les éleveurs », assure-t-il.

En coulisses, on se reproche entre concurrents d’avoir « inondé le marché », « cassé les prix » ou de ne pas avoir stoppé les conversions à temps, dans l’espoir de gagner des parts de marché. C’est une « erreur collective », résume un responsable de coopérative. Plusieurs acteurs ont estimé que le marché serait « assaini » dans les deux ou trois ans qui viennent. Mais y aura-t-il ensuite de la place pour de nouveaux producteurs ? Éleveur en Mayenne, Eric Guihery évacue l’idée qu’un « plancher de verre » serait atteint. « Au Danemark, le lait bio représente 20 % du marché (en valeur), contre 10 % en France », relève ce membre de la Fédération nationale d’agriculture biologique.