REPORTAGEAvec les tests Covid payants, les barnums des pharmacies sont désertés

Coronavirus : Depuis la fin des tests gratuits, « on fait moitié moins de dépistage en pharmacie »

REPORTAGEDepuis le 15 octobre, les tests de dépistage de confort ne sont plus pris en charge par l’Assurance maladie
Depuis l'entrée en vigueur de la fin de la gratuité des tests de dépistage le 15 octobre, le nombre de tests antigéniques réalisé en pharmacie a chuté.
Depuis l'entrée en vigueur de la fin de la gratuité des tests de dépistage le 15 octobre, le nombre de tests antigéniques réalisé en pharmacie a chuté. - A. Boumediene / 20 Minutes / 20 Minutes
Anissa Boumediene

Anissa Boumediene

L'essentiel

  • Le gouvernement l’avait annoncé début août, les tests de dépistage du Covid-19 dits « de confort » ne sont plus gratuits.
  • Ils sont désormais à la charge des personnes non vaccinées qui souhaitent obtenir ainsi leur pass sanitaire.
  • Résultat, dans les pharmacies, le nombre des tests pratiqués a chuté depuis vendredi, comme l'a constaté 20 Minutes.

«Les tests antigéniques ? Oui, nous en faisons, c’est 25 euros ». Sous son barnum situé devant la vitrine de la pharmacie Battino-Borgel, dans le 4e arrondissement de Paris, Eden, technicienne de laboratoire, renseigne un couple de touristes espagnols. Mais ce mardi, les candidats au dépistage sont rares. Depuis le 15 octobre, les tests de dépistage de confort ne sont plus gratuits. Pour les personnes non vaccinées qui, jusque-là, se faisaient régulièrement tester pour avoir leur pass sanitaire, désormais, ce n’est plus la carte Vitale qu’il faut sortir, mais le porte-monnaie.

Oubliées donc les longues files d’attente observées devant les pharmacies lors de l’entrée en vigueur du pass sanitaire. Sous les barnums des pharmacies de la capitale, il n’y a pas foule.

« On fait moitié moins de tests », « nous, c’est dix fois moins »

Début août, le gouvernement annonçait la fin prochaine de la gratuité des tests PCR et antigénique dits « de confort ». Un changement de règle entré en vigueur vendredi dernier et à l’effet quasi-instantané. « Jusqu’à présent, le samedi, on faisait plus d’une centaine de tests antigéniques, mais ce samedi, on en a fait moitié moins, constate Isabelle, pharmacienne à l’officine Battino-Borgel. On continue à dépister les touristes étrangers, qui ont besoin d’un test négatif pour regagner leur pays et pour qui les tests sont payants depuis un moment. L’information a été bien relayée, les gens savent quand ils doivent payer ou quand c’est pris en charge ».

De l’autre côté de la vitrine, Eden attend les candidats au dépistage. « J’ai commencé au mois d’août. Au début, il y avait beaucoup de monde, au moins 120 personnes chaque jour. En ce début de semaine, ils sont à peine une quarantaine dans la journée. On voit bien que ceux qui avaient l’habitude de recourir aux tests de confort sont moins enclins à le faire maintenant que c’est payant ». Depuis vendredi, « on observe dans les pharmacies une chute de 40 à 50 % des tests de dépistage », confirme Gilles Bonnefond, porte-parole de l'Union des syndicats de pharmaciens d'officine (USPO).

Sous son barnum, Eden, technicienne de laboratoire, attend les candidats au dépistage.
Sous son barnum, Eden, technicienne de laboratoire, attend les candidats au dépistage. - A. Boumediene / 20 Minutes

Quelques rues plus loin, à MaPharmacie, petite officine située à deux pas de la place de la Bastille, la chute a été encore plus drastique. « On faisait pas mal de tests antigéniques, mais depuis vendredi, on en fait dix fois moins ! Ce week-end, on a fait seulement deux ou trois tests antigéniques, contre une trentaine le week-end précédent, explique sur place Nadia, préparatrice. Jusqu’à présent, on n’avait quasiment que des personnes non vaccinées qui venaient se faire tester pour avoir leur pass sanitaire, avec chaque semaine une demande plus forte à l’approche du week-end, pour profiter des restaurants et des terrasses ».

« Au moment où les épidémies hivernales redémarrent »

Dans la vitrine de MaPharmacie, une affichette indique qu’il est possible d’y réaliser un autotest sous la supervision du pharmacien. Mais elle ne devrait pas tarder à être retirée. Car s’il était possible depuis le mois d’août d’obtenir son pass sanitaire de cette manière, ce n’est plus le cas depuis vendredi. Très certainement pour compliquer la vie des récalcitrants à la vaccination et les pousser à sauter le pas. Ce dispositif n’a d’ailleurs jamais trouvé son public. Vendu au prix unitaire de 5 euros environ, il a été boudé par les non vaccinés, qui lui préféraient le test antigénique gratuit. « On en faisait peu, mais là, on n’en fait plus du tout. Cela n’a plus aucun intérêt pour les gens maintenant », poursuit Nadia qui, depuis vendredi, n’a en outre eu « encore aucun patient venu se faire dépister sur prescription médicale ».

« Le timing est très mal calculé : la fin de la prise en charge des tests pour tous tombe au moment où les épidémies hivernales redémarrent et risquent de masquer des cas de Covid-19, se désole Gilles Bonnefond. Et la communication n’est pas bonne non plus : dire que les tests sont payants est faux, ils restent gratuits, sauf pour les adultes non vaccinés et sans ordonnance. Donc continuez à vous faire dépister si vous avez des symptômes ! », insiste le pharmacien, qui « redoute un rebond de l’épidémie. Evidemment, on peut comprendre qu’une personne doive payer son test quand elle veut avoir son pass sanitaire pour aller au restaurant ou voir un match de foot. Le problème, c’est lorsque ces personnes non vaccinées présentent des symptômes et qu’elles doivent d’abord consulter leur médecin pour obtenir une ordonnance. Compliquer et rallonger le parcours de dépistage risque d’en décourager plus d’un de faire le test ».

Pour le pharmacien, « il faudrait pouvoir dépister sans ordonnance toute personne présentant des symptômes du Covid-19, parce que le but du dépistage précoce reste de casser les chaînes de contamination. Les quelques petits malins qui seraient tentés de se faire dépister tous les trois jours aux frais de la Sécu seraient quant à eux vite repérés », estime Gilles Bonnefond, qui appelle à « faire un bilan de cette mesure dans les quinze prochains jours ».