EPIDEMIEL’exécutif assume le clivage en mettant la pression sur les non-vaccinés

Coronavirus : Avec le pass vaccinal, l’exécutif assume le clivage en mettant la pression sur les non-vaccinés

EPIDEMIELe gouvernement espère transformer le pass sanitaire en pass vaccinal après l’adoption d’un projet de loi d’ici à la mi-janvier
Le Premier ministre,Jean Castex.
Le Premier ministre,Jean Castex. - Eric TSCHAEN-POOL/SIPA  / SIPA
Thibaut Le Gal

Thibaut Le Gal

L'essentiel

  • Vendredi dernier, Jean Castex a annoncé que le gouvernement souhaitait transformer le pass sanitaire en pass vaccinal.
  • Un projet de loi sera présenté lors d’un Conseil des ministres exceptionnel lundi, avant sa présentation la même semaine au Parlement.
  • Dans la majorité, on revendique cette mise sous pression des non-vaccinés.

L’étau se resserre sur les non-vaccinés. Vendredi dernier, Jean Castex a annoncé la transformation à venir du pass sanitaire en pass vaccinal. En clair : un test négatif ne suffira plus pour entrer dans les lieux (restaurants, lieux de culture, trains…) soumis au fameux sésame. Le Premier ministre recevait ce mardi à Matignon les représentants des élus locaux et les présidents des groupes parlementaires pour évoquer le sujet.

Face à la cinquième vague de Covid-19 et à l'envolée du variant Omicron, le gouvernement continue donc d'accélérer, espérant une adoption du projet de loi avant la mi-janvier. Et dans la majorité, on assume de mettre une pression toujours plus forte sur les personnes récalcitrantes à la vaccination.

« Tant pis pour les non-vaccinés : pas de musée, pas de resto, pas de ciné »

« On souhaite que les personnes vaccinées puissent vivre quasi normalement, ça implique que les personnes non vaccinées vivent malheureusement un quasi-confinement », résumait dimanche soir sur LCI le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal. L’exécutif dit vouloir ainsi éviter de nouvelles restrictions pour l’ensemble du pays. « L’objectif est de protéger les 90 % de la population éligible qui ont fait le choix de la vaccination, quitte à rajouter de la pression aux 10 % qui ne l’ont pas fait », assume le député LREM Roland Lescure. « Tant pis pour les non-vaccinés. A eux d’assumer les contraintes sur leur vie personnelle : pas de musée, pas de resto, pas de ciné », ajoute le porte-parole d’En Marche.

Aujourd’hui, plus de 51 millions de personnes en France ont un schéma vaccinal complet, soit 76 % de la population totale (20 millions ont par ailleurs reçu une dose de rappel). Et parmi les personnes jusque-là éligibles, environ 6 millions n'ont reçu aucune dose. « On ne va pas se cacher derrière son petit doigt. Que les non-vaccinés, par complotisme ou croyance, se mettent en danger de mort, c’est une chose. Mais le problème, c’est qu’ils mettent tout le monde en danger en saturant les lits d’hôpitaux et en entraînant des déprogrammations d’opération », enfonce Bruno Bonnell, député LREM du Rhône. « Le gouvernement ne fait que prendre acte de ce qu’on entend sur le terrain : "Pourquoi 10 % de la population tiendrait en otage le reste du pays ?" ».

« Est-ce qu’on va continuer à payer les soins des cons qui ne croient pas au vaccin ? »

La stratégie de l’exécutif est claire : polariser le débat. Au risque de diviser les Français ? « On met la pression sur tout le monde, pas seulement sur les non-vaccinés. Car il y a aussi un enjeu avec la troisième dose, avec les gestes barrières », relativise Anne Genetet, députée et porte-parole du groupe LREM à l’Assemblée. « Il ne faut pas opposer les uns aux autres, mais tenir un discours global. Certains sont vaccino-hésitants, il ne faut pas se les mettre à dos si on souhaite être efficace ».

Ces nouvelles annonces ont toutefois entraîné un léger rebond des manifestations anti-pass, avec 25.500 personnes battant le pavé samedi dernier, selon les autorités. « Ces gens-là vont peut-être se radicaliser, mais ils vont surtout se ridiculiser, tranche François Patriat. La vaccination est un acte sanitaire et civique. Il y a maintenant une forme de fatigue générale dans l’opinion, qui se demande : "Est-ce qu’on va continuer à vivre ainsi, à payer avec nos impôts les soins des cons qui ne croient pas au vaccin ?" », interroge le patron des sénateurs LREM.

Reste que cette stratégie est vivement critiquée par une partie de l'opposition. « Méthodes brutales » pour Jean-Luc Mélenchon. Mise en place d’une « lutte des classes vaccinales », selon Eric Zemmour, et d’un « plus grand enfermement des Français » pour Marine Le Pen. La possibilité d’intégrer au projet de loi l’instauration du pass sanitaire en entreprise a également été accueillie très froidement par les organisations syndicales lundi. Le texte doit être présenté lors d’un Conseil des ministres exceptionnel lundi prochain, avant sa présentation dès la même semaine au Parlement. Les débats s’annoncent déjà houleux, même si le député MoDem Erwan Balanant relativise : « Les Français attendent en réalité ce pass vaccinal depuis longtemps, cette décision sera bien plus simple à prendre que le pass sanitaire cet été ».