APRES GAUDINQuel bilan pour Benoît Payan, un an après son élection à Marseille ?

Marseille : Quel bilan pour Benoît Payan, un an après son élection ?

APRES GAUDINLe socialiste a pris les rênes de la deuxième ville de France il y a maintenant un an, après la démission de Michèle Rubirola
Benoît Payan en octobre 2021 en marge d'une visite d'Emmanuel Macron à Marseille
Benoît Payan en octobre 2021 en marge d'une visite d'Emmanuel Macron à Marseille  - Bruno Bebert-POOL/SIPA / SIPA
Mathilde Ceilles

Mathilde Ceilles

L'essentiel

  • Benoît Payan est devenu il y a un an le maire de Marseille, après la démission de Michèle Rubirola.
  • Le maire de Marseille a notamment obtenu de l’Etat un engagement important pour la rénovation des écoles.
  • Il a appliqué en parallèle des mesures plus symboliques, pris entre des caisses vides et une cohabitation tendue avec sa rivale à la tête de la métropole, Martine Vassal (LR).

Un an après, au conseil municipal, ni son nom, ni celui de Michèle Rubirola, n’ont été pour l’heure inscrits sur les murs de l’hémicycle Bargemon. Et pourtant, à la faveur d’un switche soudain avec celle que les Marseillais avaient initialement élue pour diriger la deuxième ville de France, Benoît Payan est bien à la tête de la cité phocéenne, et tente depuis un an de se faire un nom dans l’histoire de Marseille​. 20 Minutes fait le point sur cette année écoulée.

La rénovation des écoles, sa grande victoire

Au début du mois de décembre, à la veille même de la date anniversaire de la démission de Michèle Rubirola, Benoît Payan recevait le Premier ministre, pour entériner l’engagement à hauteur de 400 millions d’euros de l’Etat dans le plan de rénovation de 174 écoles vétustes de Marseille. Devant Jean Castex, Olivia Fortin, quatrième adjointe au maire de Marseille, ne peut contenir ses larmes. « On s’est engagé pour changer, et aujourd’hui, c’est ce qu’on fait concrètement, explique-t-elle. C’est le résultat de mois de travail et ça a une signification particulière, car ce plan de rénovation des écoles, c’est ce qu’on portait pendant notre campagne à bout de bras. Et aujourd’hui, on concrétise cet espoir. »

Un avis partagé aussi bien par les plus proches de Benoît Payan que par ses détracteurs, qui reconnaissent l’implication du maire dans ce dossier dès le début de son mandat, à force de négociations et de rencontres avec le président de la République, le Premier ministre et leurs entourages. « La concrétisation du plan école est une belle réussite, concède ainsi Pierre Robin, conseiller municipal LR d’opposition. Elle est arrivée à un moment de l’histoire où l’Etat avait envie de distribuer de l’argent à Marseille, mais je mets au crédit du maire l’énergie dont il a fait preuve pour secouer le cocotier. »

A gauche toute

Après 25 ans d’un règne ininterrompu de la droite à Marseille, avec l’indéboulonnable Jean-Claude Gaudin en guise de tête de proue, Benoît Payan, à la tête d’une coalition réunissant les socialistes, les écologistes et les communistes, s’est efforcé à multiplier les mesures et les prises de position l’ancrant symboliquement comme un homme de gauche. Le maire a ainsi fait rebaptiser l’avenue des Aygalades avenue Ibrahim-Ali, du nom de ce jeune Comorien tué dans les quartiers Nord par un colleur d’affiches frontistes, ou l’école Bugeaud devenue école Ahmed-Litim, tirailleur algérien. Plus récemment, Marseille est devenue la première ville à signer une convention d’appui à la lutte contre la pauvreté avec l’Etat pour un montant de 1,4 million d’euros.

« Je constate quand même que lors des différents conseils municipaux, on a beaucoup de délibérations pour flatter les différentes sensibilités de la majorité, accuse Pierre Robin. Le maire avait lancé une commission d’enquête sur le fonctionnement des écoles… et il n’en est rien ressorti. On est souvent dans la pure agitation politique et ça manque de concret. » « Comme il n’y a pas d’argent, et que Martine Vassal, à la métropole, se croit toujours en campagne électorale et œuvre peu pour l’intérêt général, Benoît Payan est dans l’affichage, accuse le sénateur RN Stéphane Ravier. Il envoie des messages à l’extrême gauche à travers une idéologie au lieu de répondre aux Marseillais. »

Un maire empêché ?

Depuis le début de son mandat, Benoît Payan se dit en effet régulièrement empêché de pouvoir mettre en place sa politique, en pointant notamment le bilan de son prédécesseur. Dès sa première conférence de presse en tant que maire, en janvier 2021, Benoît Payan donnait le ton. « C’est compliqué de changer une ville avec un fonctionnement qui n’a pas fonctionné pendant 25 ans », prévenait-il. « Quand il a soulevé le tapis, il s’est sûrement rendu compte qu’il y avait beaucoup de poussières », s’amuse Stéphane Ravier. Outre un clientélisme latent largement mis en lumière dans un rapport de l’agence française anticorruption, Benoît Payan se plaint d’être à la tête d’une ville où « les finances sont dans le rouge » et « il n’y a plus d’argent dans les caisses. »

Surtout, il règne ainsi à Marseille parfois encore un air de campagne électorale sans fin, ou de cohabitation, entre deux camps qui s’affrontent comme ils s’affrontaient pour ravir ce fauteuil que Jean-Claude Gaudin a occupé pendant un quart de siècle. La répartition des compétences entre la mairie et la métropole, détenue par la rivale de Benoît Payan lors des élections municipales, Martine Vassal, nourrit des conflits toujours plus nombreux. A l’image de la mise en place de la zone à faible émission ou du ramassage des ordures à l’origine d’un important scandale à l’automne dernier. « Je suis un maire qui ne peut pas changer une ampoule », se plaignait Benoît Payan dans une interview accordée à Libération.

Pour arbitrer ces affrontements, qualifiés de « chicayas locaux » par le président de la République lors de sa visite, le maire de Marseille en a appelé à Emmanuel Macron. « Personne n’accepte que des compétences du quotidien » comme les déchets « soient exercées par d’autres que ceux que les Marseillais et Marseillaises se sont choisis », écrit le maire dans une lettre adressée à l’automne dernier au chef de l’Etat. « Seule une réforme immédiate de la gouvernance locale et de la répartition des compétences opérationnelles de proximité peut permettre d’y mettre un terme », réclame-t-il. Un bras de fer qui semble mal engagé. Actuellement étudié par le Parlement, le projet de loi 3DS a consacré une réforme de la gouvernance de la métropole que Benoît Payan a immédiatement qualifiée de « farce » dans Le Monde.