CONCURENCELe Parti animaliste, une candidature écologiste de plus ?

Présidentielle 2022 : Le Parti animaliste, une candidature écologiste de plus ?

CONCURENCELe Parti animaliste d’Hélène Thouy revendique son indépendance et se démarque de la candidature écolo de Yannick Jadot. Une stratégie qui a ses limites
La candidate du Parti animaliste, Hélène Thouy.
La candidate du Parti animaliste, Hélène Thouy.  - CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP / AFP
Rachel Garrat-Valcarcel

Rachel Garrat-Valcarcel

L'essentiel

  • Hélène Thouy, la candidate du Parti animaliste, cherche toujours ses parrainages pour concourir à la présidentielle.
  • Le parti revendique de vouloir mettre la pression sur les autres partis sur la question du bien-être animal, amenant les écologistes à se positionner sur un sujet qu’ils avaient relativement peu porté.
  • Hélène Thouy revendique son indépendance, même si certaines organisations animalistes préfèrent soutenir des candidats avec un programme complet.

En cette fin du mois de janvier 2022, il est encore aventureux d’affirmer que le Parti animaliste aura bel est bien sa candidate en lice au premier tour de la présidentielle. Hélène Thouy, avocate girondine, en est encore à la – difficile – recherche des 500 parrainages d’élus et l’élues locales pour avoir un bulletin à son nom le 10 avril prochain. La candidate a pour elle que son unique thème de campagne est un sujet plutôt en vogue. Les vidéos de L214 ou encore l’apparition de leaders d’opinion qui défendent la cause animale y sont pour beaucoup dans la montée médiatique du sujet. « C’est une évolution des mœurs sociales. Il y a une trentaine d’années c’était encore porté par peu de monde, mais les valeurs évoluent », remarque Daniel Boy, politologue spécialiste de l’écologie politique.

Résultat, le jeune Parti animaliste – il a été créé en 2016 – a connu un premier succès d’estime lors des élections européennes, avec presque 500.000 voix, soit 2,16 % des suffrages. Pas de quoi siéger au Parlement européen, bien sûr, mais un score qui a permis d'en finir avec les moqueries des adversaires. Hélène Thouy le dit, elle est là pour « continuer à mettre la pression » aux autres partis sur la question du bien-être animal. « On veut que le sujet soit à l’agenda politique des cinq prochaines années. » Et cette pression, il y a candidat en particulier qui la ressentn, c’est Yannick Jadot. Le candidat écologiste joue a priori sur son terrain. A priori seulement car, comme on le souligne dans son équipe de campagne, « le sujet n’a pas toujours été une priorité majeure des écologistes », rappelle le député Cédric Villani.

Les écolos marchent sur les œufs

« Chez Les Verts, il y a eu des commissions qui s’intéressaient au sujet, mais il y avait bien d’autres questions qui étaient jugées plus importantes », confirme Daniel Boy. Cette année, pas question de se faire damer le pion et le programme écologiste va réserver une place « importante » à la question animale, assure Cédric Villani, qui s’occupe du sujet dans la campagne Jadot. L’association L214, qui a noté les programmes candidats en la matière, a donné 19/20 au projet de Yannick Jadot… contre 20/20 à celui d’Hélène Thouy. Ce qui permet à Cédric Villani de revendiquer « des liens étroits » avec le Parti animaliste : « On les connaît bien ! On a fait équipe plus d’une fois, on a des préoccupations communes.»

Alors, pourquoi pas aller unis à la présidentielle ? A cette question, du côté du pôle écologiste, on marche sur des œufs, si l’on peut dire : « C’est vrai qu’ils étaient à leur place chez nous, la porte est d’ailleurs grande ouverte. Mais on ne leur met pas la pression. On a un profond respect pour leur démarche », détaille la porte-parole du candidat Jadot, Delphine Batho. Du côté du Parti animaliste, la question se pose à peine : « Si on a décidé de se présenter, c’est qu’aucun des partis et candidats en présence ne prend la mesure de l’importance du sujet et des attentes de la population en la matière », explique Hélène Thouy.

Une indépendance précieuse

D’ailleurs, le Parti animaliste ne se reconnaît pas à proprement parler comme « écologiste », la candidate revendiquant une « approche différente » : « L’écologie a toujours considéré les animaux comme des espèces en niant leur qualité d’individus. Parler, comme le font les écologistes, de la grande masse du vivant à protéger, ça enlève toute spécificité aux animaux. » Le Parti animaliste, qui se décrit comme « mono-sujet » (il n’a pas de position sur les retraites, la politique étrangère, le pouvoir d’achat…) et transpartisan, tient en fait par-dessus tout à son indépendance. Et même quand il fait des alliances, comme aux dernières élections régionales ou municipales, « nous veillons à un équilibre entre la gauche et la droite », affirme Hélène Thouy. Ainsi, il y avait en 2021 des candidats et candidates de Parti animaliste sur la liste insoumise en Île-de-France, et sur la liste LR-LREM de Renaud Muselier en Paca.

D’après Daniel Boy, qui classe tout de même la formation politique au sein de « la mouvance écologiste » au sens large, l’indépendance du Parti animaliste peut-être un caillou dans la chaussure de Yannick Jadot. « Depuis longtemps, il y a des partis écologistes dits indépendants, ni droite ni gauche. Et ça a toujours gêné Les Verts puis EELV. Car c’est toujours embêtant de se faire grignoter 1, 2 ou 3 % quand on ne fait pas soi-même des scores miraculeux. »

La stratégie de l’indépendance et de la thématique unique a néanmoins ses défauts. Dans l'entourage de Jadot, on souligne que le projet du candidat écologique offre une vision globale de la société – sous entendu : contrairement à celui du Parti animaliste. Dans cette logique, certaines organisations engagées dans l’antispécisme, comme celle d’Aymeric Caron (Révolution écologique pour le vivant) préfèrent se rallier à d’autres candidats. En l’occurrence, Jean-Luc Mélenchon, noté à 17/20 par L214. « On n’est pas inquiets. Nous ne voulons pas enfermer le bien-être animal à l’extrême gauche. Aymeric Caron a sa stratégie, nous avons la nôtre. » Et visiblement, Hélène Thouy compte bien s’y tenir.