TRANSPORTLa LGV Bordeaux-Toulouse face à la menace de recours d’associations

LGV Bordeaux-Toulouse : Plusieurs associations dénoncent un financement « risqué » et menacent de recours

TRANSPORTPlusieurs associations ont écrit au Conseil d’Etat pour « l’informer de plusieurs anomalies » dans le plan de financement du projet GPSO
TGV en gare de Toulouse- Matabiau.
TGV en gare de Toulouse- Matabiau. - F. Scheiber / 20 Minutes
Mickaël Bosredon

Mickaël Bosredon

L'essentiel

  • Le Conseil d’Etat doit examiner le 22 février le plan de financement du GPSO, avant que le gouvernement ne prenne un décret pour la création de l’établissement public qui va piloter le projet.
  • Plusieurs associations dénoncent toutefois un plan de financement « profondément risqué et gravement déséquilibré pour les collectivités locales. »
  • « Si nos observations n’étaient pas prises en compte, il y aurait des recours immédiats devant la justice administrative » prévient l’association bordelaise TransCub.

Il y a, selon elles, un risque de déraillement financier du dossier de la LGV Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax (appelé aussi GPSO). Trois associations, la Sepanso Gironde, Les amis du Barthos (toutes deux spécialisées dans la protection de la nature) et TransCub (défense des consommateurs) ont annoncé lundi, lors d’une conférence de presse, avoir adressé une lettre avec neuf autres associations au Conseil d’Etat pour « l’informer de plusieurs anomalies constatées ». Ces douze fédérations disent représenter en tout « une centaine d’associations. »

Le Conseil d’Etat doit examiner mardi 22 février le plan de financement du projet GPSO, avant la création par le gouvernement de l’établissement public chargé de piloter le projet, d’ici au 24 avril. L’avis du Conseil d’Etat ne sera toutefois que consultatif, et ne sera pas nécessairement rendu public. Dans le document qui lui est adressé, les associations précisent donner « des éléments d’appréciation pour conseiller le gouvernement ». « Si nos observations n’étaient pas prises en compte, et que le gouvernement prenait son décret, il y aurait des recours immédiats devant la justice administrative » prévient Denis Teisseire, de l’association TransCub.

Ce projet de ligne à grande vitesse, qui doit faire gagner une heure de trajet de Paris vers Toulouse et vingt minutes vers Dax, est estimé à 14,3 milliards d’euros. Son financement est prévu à 40 % par l’État, 40 % par des collectivités locales d’Occitanie et de Nouvelle-Aquitaine et 20 % par l’Union européenne. Face au refus de plusieurs collectivités de participer au financement, le tour de table financier n’a toutefois pas pu être totalement bouclé. C’est pourquoi la région Nouvelle-Aquitaine a validé une contribution supplémentaire de 225,6 millions d’euros, l’ensemble des élus, à l’exception des groupes écologiste et Rassemblement national, ayant voté pour cette « avance » financière.

« Nous demandons que les collectivités soient mises au même niveau que SNCF Réseau »

Pour Denis Teisseire, ce plan de financement reste toutefois incomplet, et surtout il est « profondément risqué et gravement déséquilibré pour les collectivités locales. » « On peut parler d’un contrat léonin, qui réserve la part du lion à SNCF Réseau au détriment des collectivités territoriales, accuse-t-il. C’est un aller sans retour, car les collectivités ne savent pas en réalité quelles seront leurs contributions respectives, et ne connaissent pas les montants des subventions européennes, qui sont loin d’être acquises, et qui seront à leur charge si elles ne sont pas au rendez-vous. »

En revanche, souligne-t-il, « SNCF Réseau ne s’engagera qu’une fois les avant-projets connus et les coûts maîtrisés, pas avant. Nous demandons, a minima, que les collectivités n’aient pas à s’engager immédiatement et de manière irréversible, et en toute logique qu’elles puissent attendre de connaître le montant des subventions européennes et le coût de l’opération. Il faut les mettre au même niveau que SNCF Réseau. »

Les retombées fiscales, des « bonnes fortunes » qui font douter

Les associations s’étonnent par ailleurs de voir dans le plan de financement de l’Etat un « engagement de Bordeaux Métropole de 550 millions d’euros » quand cette collectivité « a voté une subvention de 354 millions d’euros. » Il s’agit en fait de 550 millions, déductions faites des retombées des nouvelles recettes fiscales attendues de la LGV. Un établissement public local (EPL) doit en effet prélever de nouvelles taxes, adossées aux taxes foncières et aux taxes d’habitation sur les résidences secondaires, dans les communes situées à moins d’une heure d’une gare desservie par la LGV. Des recettes qualifiées de « bonnes fortunes » par les associations qui se montrent, là aussi, très dubitatives.

« Enfin, le dernier point, ce sont les incroyables conditions dans lesquelles la participation de la région Nouvelle-Aquitaine a été votée, s’insurge Denis Teisseire. Les conseillers n’ont eu les éléments que la veille du vote, alors que la participation de la région a été augmentée de 225 millions d’euros – pas une paille. Ils auraient dû être informés douze jours avant. Pour nous, les éléments sont réunis pour une annulation de cette délibération. »

« Le feu couve sous la cendre »

Davantage qu’un simple report des engagements financiers des collectivités, ces associations visent surtout l’abandon du projet. « Toutes les associations sont farouchement opposées à ce projet et décidé à le faire capoter » indique Philippe Barbedienne, de la Sepanso. Désormais déclaré d’utilité publique, il ne peut toutefois plus être attaqué sur le fond. « Il est en revanche toujours d’actualité de contester le financement de ce projet » poursuit Philippe Barbedienne.

« Douze associations signataires représentant plus de 100 associations c’est assez exceptionnel, complète Denis Teisseire, et cela prouve la mobilisation contre ce projet. Le feu couve sous la cendre. »

Le projet GPSO est en revanche ardemment défendu par plusieurs élus, en tête desquels le président de la région Nouvelle-Aquitaine Alain Rousset, et la présidente de l’Occitanie Carole Delga. C’est « un investissement pour un siècle, la réponse à l’encombrement autoroutier de Bordeaux » assure par exemple Alain Rousset, qui voit également dans ce vieux projet, relancé l’an dernier par le gouvernement, un moyen de développer le fret ferroviaire.

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