ASSISESQui a tué la postière de Montréal-la-Cluse? Le procès s'ouvre lundi

Ain : Qui a tué la postière de Montréal-la-Cluse? A l'heure du procès, le mystère reste entier

ASSISESLe procès du meurtre de Catherine Burgod s'ouvre lundi devant les Assises de l'Ain. Les enquêteurs ont longtemps soupçonné un ancien espoir du cinéma français mais c'est un autre suspect qui comparaîtra devant la cour
Le bureau de poste de Montréal-la-Cluse, dans lequel le corps de Catherine Burgod a retrouvé lardé de 28 coups de couteau.
Le bureau de poste de Montréal-la-Cluse, dans lequel le corps de Catherine Burgod a retrouvé lardé de 28 coups de couteau. - PHILIPPE DESMAZES / AFP / AFP
Caroline Girardon

Caroline Girardon

L'essentiel

  • Le 19 décembre 2008, le corps de Catherine Burgod a été retrouvé lardé de 28 coups de couteau dans le bureau de poste de Montréal-la-Cluse (Ain).
  • Gérald Thomassin, ancien espoir du cinéma français, a longtemps fait figure de suspect numéro 1.
  • L’acteur est porté disparu depuis deux ans. Un autre suspect, Mamadou Diallo, sera le seul à comparaître devant les Assises de l’Ain, où s’ouvrira le procès lundi.

Qui a tué Catherine Burgod, la postière de Montréal-la-Cluse ? Qui a bien pu en vouloir à cette mère de famille de 41 ans, enceinte de son troisième enfant ? Une femme discrète, sans histoire, dont le corps, lardé de 28 coups de couteau, a été retrouvé le 19 décembre 2008 sur son lieu de travail. A l’heure de l’ouverture du procès, le mystère demeure entier.

« L’inconnu de la poste », comme le nomme la journaliste Florence Aubenas dans son livre consacré de l’affaire, n’a toujours pas révélé son identité. Selon l’accusation, le mobile serait crapuleux et le butin à hauteur de presque 3.000 euros. Lundi, un seul suspect comparaîtra devant les assises de l’Ain. Il s’agit de Mamadou Diallo.

C’est le dernier coup de théâtre d’une affaire ayant défrayé la chronique pendant plus de dix ans. Le dernier rebondissement d’un épineux dossier dans lequel un ancien espoir du cinéma français a longtemps fait figure de suspect numéro 1.

Gérald Thomassin, le « petit criminel » devenu suspect numéro 1

Quelques jours après le drame, les enquêteurs vont rapidement s’intéresser à Gérald Thomassin, un ancien toxicomane. Un cabossé de la vie qui a connu son heure de gloire en 1991, lorsqu’il s’est vu décerner le césar du meilleur espoir masculin pour son rôle dans « Le petit criminel ». Depuis, l’homme se fait rare sur grand écran. Il noie son mal-être dans l’alcool et mène une vie chaotique.

Installé à Montréal-la-Cluse depuis le mois de juin 2007, il vit dans un appartement baptisé « La Grotte », un studio à demi enterré dont la principale fenêtre donne sur le trottoir situé en face de la Poste. C’est là qu’il partage ses journées avec ses copains de défonce, « Tintin » et « Rambouille ».

Les enquêteurs n’ont pas de preuves contre lui, son ADN ne correspond d’ailleurs pas à ceux qui ont été prélevés sur la scène de crime. Mais le bonhomme intrigue. Dans le village, on le voit pleurer sur la tombe de la postière. On l’entend, complètement ivre, raconter ou mimer la façon dont la victime aurait été tuée. Il parle trop, se livre à des inconnus. Il est réputé pour son comportement étrange, ses excès de colère, son agressivité, sa violence envers son ex-compagne. Mais les preuves matérielles font défaut. Les aveux aussi, jusqu’au 24 juin 2013.

Ce jour-là, l’acteur, qui est placé sur écoute téléphonique, appelle son frère. Complètement ivre et sous l’emprise de stupéfiants, il répète « pas moins de 30 fois » qu’il a tué la postière. Il est mis en examen deux jours plus tard puis écroué.

La piste Diallo

En 2016, les cartes sont rebattues. Thomassin est libéré à la fin de sa période de détention provisoire. L’enquête, qui est désormais confiée à deux juges d’instruction de Lyon, repart sur de nouvelles bases. Un second suspect, considéré comme le complice de Thomassin, est mis en examen avant d’être mis hors de cause. Les gendarmes piétinent. Mais en 2017, nouveau rebondissement.

L’ADN d’un autre homme, âgé de 29 ans, matche avec celui qui a été retrouvé sur le sac de sport de la postière. C’est un parfait inconnu des services de justice, même s’il a fait l’objet d’une plainte pour vol de carte bancaire de la part d’une ancienne petite amie. Une affaire classée sans suite.

L’homme, qui se prénomme Mamadou Diallo, est ambulancier et n’a aucun lien avec les deux précédents suspects. On le décrit comme « calme, serviable, non violent et travailleur ». L’année du meurtre, il était en apprentissage mais là encore, ses anciens patrons sont formels. Le gamin était « poli », « ponctuel », « gentil » et « toujours souriant ». Le profil ne colle pas. Mais l’ADN est bien le sien. Placé en garde à vue, le suspect fluctue dans sa version des faits et finit par avouer s’être rendu au bureau de Poste le jour du drame afin d’acheter un billet de train. C’est là qu’il aurait découvert le corps de Catherine Burgot, l’aurait touché avant de dérober la recette du jour et de déguerpir.

« J’avais 18 ans, et à cet âge-là. Je suis conscient que je n’aurais pas dû faire cela, confesse-t-il en garde à vue. A l’époque j’étais paniqué mais jamais je n’aurais pu tuer quelqu’un, je voulais juste acheter mon billet. »

La mystérieuse disparition de Thomassin

Depuis, l’homme clame son innocence. Il reconnaît avoir volé l’argent mais maintient qu’il avait peur d’être accusé à tort du meurtre. Le 29 août, le juge d’instruction décide d’organiser une confrontation entre les trois mis en examen, Gérald Thomassin, son supposé complice et Mamadou Diallo qui fait désormais figure de principal suspect.

Seulement, Gérald Thomassin, qui était sur le point d’être mis hors de cause, ne se présentera jamais. La veille, il a pourtant pris ses dispositions pour regagner Lyon. Exilé en Charente-Maritime, il devait prendre un train et une correspondance à Nantes. L’acteur est bien monté à bord du premier convoi, il a même été verbalisé pour avoir voyagé sans billet. Mais arrivé à Nantes, il a disparu des radars. Personne ne l’a jamais revu depuis ce 28 août 2019. Une information judiciaire pour « enlèvement et séquestration » a été ouverte deux mois plus tard. Les investigations n’ont rien donné.

En juin 2020, la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Lyon a confirmé l’ordonnance de non-lieu rendue en ce qui le concerne. Il est donc définitivement mis hors de cause dans l’affaire. Le verdict est attendu le 4 avril.