FAKE OFFNon, cette image ne montre pas la réaction du cerveau lors d'un baiser

Non, cette image ne montre pas la réaction du cerveau lors d'un baiser

FAKE OFFLa spectaculaire IRM d’une chercheuse canadienne et de son enfant apparaît régulièrement sur les réseaux sociaux depuis plusieurs années et suscite l’enthousiasme de nombreux internautes. Mais les zones orangées sont le fruit d’un montage ludique, à visée non scientifique
Une image de synthèse de cerveau (illustration)
Une image de synthèse de cerveau (illustration) - Superstock / Sipa / SIPA
Clément Follain

Clément Follain

L'essentiel

  • C’est une photo qui circule sur les réseaux sociaux : une « radiographie » d’une mère et de son enfant avec des zones orangées qui matérialisent les réactions du cerveau lors d’un baiser.
  • Il s’agit en réalité d’une IRM retouchée : les zones orangées ont été ajoutées à partir de véritables données scientifiques sur les réponses du cerveau des bébés lorsqu’ils regardent des vidéos de visage.
  • « Rien à voir avec les baisers », commente la neuroscientifique Rebecca Saxe, à l’origine de l’IRM.

«Wow », « exceptionnel », « comme il est important d’être proche de son bébé de l’embrasser, le câliner, lui parler »… Sur les réseaux sociaux, une publication récurrente, censée montre une « radiographie capturée lorsqu’une mère embrasse son fils de 2 mois », suscite de nombreuses réactions d’internautes émerveillés. « La neurologue Rebecca Saxe a présenté la plus belle " photo" de l’année », précise le texte qui accompagne l’image massivement relayée. Lors du baiser, « la dopamine est libérée, ce qui procure une sensation de bien-être, mais aussi l’ocytocine, baptisée hormone de l’amour, car responsable de l’affection et de l’attachement ».

Une publication Facebook relayant l'image de l'IRM ayant été colorisée a posteriori.
Une publication Facebook relayant l'image de l'IRM ayant été colorisée a posteriori. - Capture d'écran

« N’importe quoi. Une radio ne ressemble pas à ça et une IRM ne peut être effectuée de cette manière, note, sceptique, un internaute. En tout cas, ce n’est pas réaliste. » « C’est une image détournée », estime une autre. Alors, cette image est-elle authentique ?

FAKE OFF

Comme l’avaient repéré nos collègues de l'AFP en juillet 2020, la Canadienne Rebecca Saxe, à l’origine de l’image sur laquelle on la voit avec son deuxième enfant, a expliqué sa démarche dans la revue scientifique américaine Smithsonian Magazine en décembre 2015. La neuroscientifique du Massachusetts Institute of Technology précise qu’il s’agit d’une IRM, qui n’a pas été réalisée à l’origine pour un diagnostic médical ni même pour la science, mais parce que « nous voulions voir l’IRM d’une mère et de son enfant », un « symbole de l’amour humain ».

L’image d’origine, qui n’est donc pas la photo d’une radiographie, a dû être réalisée alors que la chercheuse et son enfant étaient immobiles pendant plusieurs minutes, explique la scientifique. Sinon, « bouger d’un seul millimètre laisse une tâche sur le résultat. » Aussi Rebecca Saxe a-t-elle attendu que le bébé soit endormi pour réaliser le cliché, que la chercheuse utilise par ailleurs comme photo de profil sur son compte Twitter. Précision importante : l’image d’origine, en noir et blanc, ne présente pas de zones orangées censées représenter les sécrétions d’hormones dans le cerveau de la mère et de son enfant.

Un montage « cool »

En réalité, la controverse sur le caractère scientifique de ces zones orangées ne date pas d’hier. En septembre 2019, Rebecca Saxe a elle-même expliqué son origine sur Twitter. Les éléments colorés ont été ajoutés a posteriori sur l’IRM d’origine. Ils correspondent à de véritables données, qui sont le résultat d’examens visant à étudier les « réponses hémodynamiques » de cerveaux de bébé lorsqu’ils regardent des vidéos de visage. La chercheuse trouvait simplement « cool de superposer » ces résultats sur l’IRM. Et la neuroscientifique de conclure : ces résultats « n’ont rien à voir avec l’ocytocine, les hormones, les baisers ou l’allaitement ».

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Malgré ces explications, l’image resurgit depuis régulièrement sur les réseaux sociaux, accompagnée de textes suggérant que les zones orangées représentent une sécrétion d’hormones liée au baiser que la mère donne à son enfant.