GARDEN PARTYA Marseille, Emmanuel Macron cherche « l’effet waouh » sur l’écologie

Présidentielle 2022 : A Marseille, Emmanuel Macron cherche « l’effet waouh » sur l’écologie

GARDEN PARTYDans un décor grandiose au-dessus de Marseille, Emmanuel Macron a axé son discours sur les questions environnementales et encore envoyé quelques clins d’œil à la gauche
Emmanuel Macron lors de son meeting au palais du Pharo, à Marseille, ce samedi.
Emmanuel Macron lors de son meeting au palais du Pharo, à Marseille, ce samedi.  - Ludovic MARIN / AFP / AFP
Rachel Garrat-Valcarcel

Rachel Garrat-Valcarcel

L'essentiel

  • Emmanuel Macron poursuit sa campagne de séduction de l’électorat de gauche, cette fois plus précisément sur la question écologique.
  • Le président candidat a annoncé un big bang gouvernemental avec un premier ministre chargé désormais de la « planification écologique »… Un thème cher à Jean-Luc Mélenchon.
  • Sur le fond, le candidat a multiplié les effets waouh très ambitieux mais avec peu ou pas d’annonces nouvelles et surtout jamais chiffrée.

A Marseille (Bouches-du-Rhône)

Le meeting de Marseille d’Emmanuel Macron, tant annoncé et reporté avant le premier tour à cause de la guerre en Ukraine, a finalement eu lieu ce samedi, à une semaine du second tour de l’élection présidentielle. Le dispositif n’avait rien à voir avec le meeting géant de Paris La Défense Arena, le 2 avril. Le président candidat était cette fois-ci en plein air, dans le jardin du palais du Pharo. A la clé : le décor grandiose d’une ville de Marseille baignée de soleil en ce week-end de pâques. L’affluence non plus n’avait rien à voir avec les 30.000 personnes de Nanterre. Au moment où Emmanuel Macron a pris la parole, peu avant 15h30, le jardin ne faisait clairement pas le plein. Les organisateurs ont annoncé 4.200 personnes, on avait un peu de mal à y croire. Alors que La République en marche a fait descendre plusieurs centaines de militantes et militants en TGV spécialement affrété, ça faisait un peu tâche.

Sur le fond, Emmanuel Macron a poursuivi la stratégie qu’il mène depuis le premier tour : viser ce tiers des voix qui se sont portées sur un des candidats de gauche le 10 avril. Il a à nouveau cité Jean Jaurès («C’est en allant à la mer que le fleuve reste fidèle à sa source »). Cette fois, c’est sur la politique écologique qu’il a très largement axé son discours : « La politique que je vais mener dans les cinq ans à venir sera écologique ou ne sera pas. Je veux placer l’écologie au cœur du nouveau paradigme politique » Pour cela, comme à La Défense, il y a deux semaines, il a repris, l’air de ne pas y toucher, des slogans de gauche. Cette fois, Emmanuel Macron a, par deux fois, utilisé l’expression « avenir en commun »… le nom du programme de Jean-Luc Mélenchon, troisième homme du premier tour avec près de 22 %.

Big bang gouvernemental

L’ombre du député de Marseille a plané sur le Pharo cet après-midi. Car Emmanuel Macron a semblé reprendre à son compte la « planification écologique », chère à Jean-Luc Mélenchon depuis plusieurs années. Sans doute les deux hommes ne mettent pas les mêmes choses derrière cette expression, mais le symbole est là. Principale annonce : une refondation de l’architecture gouvernementale. Le premier ministre sera ainsi « directement chargé de la planification écologique » et « appuyé par deux ministres forts ». Un ministre de la planification énergétique dont la « mission sera de faire de la France la première grande nation à sortir du gaz du charbon et du pétrole ». Et un ministre chargé de « la planification écologique territoriale », qui devra travailler avec les collectivités pour coordonner les actions avec les collectivités. Il devra avoir « une stratégie de réaménagement de nos territoires, comme nous ne l’avons pas fait depuis Freycinet », qui voulait voir une gare dans chaque chef-lieu de canton du pays.

Ce n’est pas rien : on se souvient qu’en 2007, dans le Pacte écologique que Nicolas Hulot avait fait signer à presque tous les candidats à la présidentielle de l'époque, il demandait la création d’un poste de vice-premier ministre chargé du développement durable. Soit un ministre tout en haut de la hiérarchie gouvernementale pour qu’il ait du poids politique dans les arbitrages. Emmanuel Macron veut en fait lutter contre l’idée que c’est à Matignon que tout bloque toujours sur les sujets environnementaux. Mais cette question d’ingénierie gouvernementale suffira-t-elle à faire se mobiliser sur son nom la « génération climat » et les électeurs et électrices qui ont voté pour la « règle verte » avec Jean-Luc Mélenchon ?

Grandes ambitions, peu d’engagements

Car sur le reste, même si le président affiche des ambitions parfois spectaculaires («Je veux complètement refonder »), peu de choses neuves. Peu ou pas d’annonces sur le fond, et surtout presque jamais d’engagements chiffrés. Emmanuel Macron a bien sûr défendu son bilan : la fin du projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes, la fin du projet d’agrandissement de l’aéroport Charles-de-Gaulle, l’arrêt du projet de Montagne d’or en Guyane… « Qui a arrêté ces projets ? C’est nous ! ». Il a aussi rappelé que durant les cinq dernières années la France avait réduit de 12 % ses émissions de gaz à effet de serre… Oubliant de préciser que la très forte réduction de l’activité pendant les confinements avait bien aidé. « L’inaction, pas chez moi ! », a quand même osé Emmanuel Macron, en référence à la condamnation pour inaction climatique infligée à l’Etat, pour non-respect de ses engagements internationaux en la matière.

La philosophie écologiste du président sortant reste en effet assez loin de celle d’un Mélenchon ou d’un Jadot. L’écologie macroniste sera incitative : « Pour réussir la bataille du climat, pas d’injonction, pas de fausses leçons, mais de la clarté dans les objectifs. » L’écologie macroniste est pro-nucléaire : « Entre le gaz et le charbon d’un côté et le nucléaire de l’autre, je choisis le nucléaire. » Et puis l’écologie macroniste est pro croissance et, comme en 2017, s’en remet à un certain solutionnisme technologique : « L’écologie ça n’est pas fermer vos emplois ou vos usines. (…) C’est par l’innovation nous permettre de produire davantage mais de manière écologique. »

Au fond, a-t-il tant besoin de convaincre sur le sujet dans le contexte d’un second tour contre Marine Le Pen ? La candidate du Rassemblement nationale est si peu identifiée à la thématique, le contraste joue à plein. Emmanuel Macron avait donc beau jeu de qualifier la « candidate d’extrême droite » d'« incompétente » sur les questions écologiques. Pour le président candidat, elle est même « climatosceptique ». Sur ce sujet-là comme sur les autres, le candidat dénonce le relativisme ambiant vis-à-vis de son adversaire : « On vous a farci la tête (en vous disant que l’extrême droite et moi), c’était la même chose : non, ça n’est pas la même chose », a-t-il dit en haussant le ton. Emmanuel Macron a ainsi fait du second tour de l’élection présidentielle un référendum : « Pour ou contre notre jeunesse ? Pour ou contre la République ?….» Et donc, « pour ou contre l’écologie ? »