Ille-et-Vilaine : La Lormandière, un trésor caché que certains voudraient bien déterrer
PATRIMOINE•Planqué dans la campagne de Rennes, l’ancien site industriel de fabrication de chaux est en train d’être rénové dans l’espoir de s’ouvrir au publicCamille Allain
L'essentiel
- A Chartres-de-Bretagne, près de Rennes, l’ancienne usine de fabrication de chaux de la Lormandière veut s’ouvrir au public.
- Fermé depuis près de cent ans, le site racheté par le conseil départemental est en cours de rénovation et souhaiterait y accueillir des visiteurs.
- Pour l’heure, seule la partie sauvage, comprenant un bel étang, est ouverte aux curieux, qui sont nombreux à souhaiter pouvoir visiter les anciens bâtiments de briques.
C’est un véritable trésor planqué au bord d’une petite route peu fréquentée. Un havre de paix qui a élu domicile dans un espace sauvage peu connu à mi-chemin entre les grands halls de PSA et du Parc-Expo. A l’abri du béton de la ville, le site de la Lormandière est à la fois un refuge de nature et un témoignage précieux du passé industriel de Chartres-de-Bretagne. C’est ici, à quelques kilomètres au sud de Rennes, que la plus grande entreprise de fabrication de chaux de Bretagne a vu le jour en 1853, avant de s’éteindre en 1938, victime collatérale de la Seconde Guerre mondiale. Depuis la fermeture, le site est longtemps resté figé avant d’être partiellement restauré sous l’impulsion d’associations locales et du département d’Ille-et-Vilaine. Certains bâtiments de briques ont été sauvés et trônent fièrement au-dessus d’une végétation en friche et de quelques locomotives abandonnées.
Propriétaire du site qu’elle a classé comme espace naturel sensible, la collectivité bretonne avait souhaité le racheter dans les années 1980, intriguée par la nature inhabituelle des sols. « Normalement, les sols de Bretagne sont plutôt acides. Mais pas ici où on a du calcaire. C’est pour ça que les fours à chaux ont été implantés sur ce site », explique Thibaut Gaborit, du service patrimoine naturel du département. Chauffé à plus de 1.000 degrés, le calcaire était transformé en chaux vive, qui servait à enrichir les sols agricoles ou encore comme matériau de construction.
Un site peu connu des Rennais
L’extraction de la roche a aussi transformé le site en creusant une importante carrière, aujourd’hui remplie d’eau. Cet étang aux teintes bleutées voit chaque année un nombre de promeneurs croissant l’encercler, surtout depuis l’ouverture d’un sentier pédagogique. « Ce site est surtout connu des habitants de Bruz et de Chartres mais pas vraiment des Rennais. C’est une belle promenade mais les gens sont souvent frustrés d’apercevoir les bâtiments industriels sans pouvoir les visiter », reconnaît Yann Soulabaille, vice-président du département délégué à la biodiversité et aux espaces naturels.
En réflexion depuis des années, l’ouverture de l’ancienne usine au public devrait se concrétiser dans les trois années à venir. « Nous avons déjà mené un chantier de deux ans pour restaurer certains bâtiments comme l’ancienne forge. Mais on n’a pas envie d’en faire une coquille vide ou un musée figé. On a envie de redonner vie à ce site à travers des événements, des visites », poursuit Thibaut Gaborit. Son élu est encore plus prompt à s’emballer. « On a l’envie de créer une guinguette dans l’ancienne maison située juste à côté, que tout le monde puisse en profiter. Il y a tant à faire pour faire connaître la mémoire ouvrière de la Lormandière ».
Ouverture au public d’ici deux à trois ans
Pour faire vivre le site au quotidien et trouver une structure en résidence, le département avait lancé un appel à projets auprès d’associations locales. Elle a finalement donné son accord à l’association Terre, qui conçoit des briques à base de terre crue en employant des personnes en situation de grande précarité. Affiliée à la communauté Emmaüs, la structure réfléchit encore à l’opportunité d’installer sa briqueterie solidaire dans ce lieu chargé d’histoire. S’il présente des contraintes, il offre aussi de solides arguments.
« Le site a une forte personnalité et ça ferait totalement sens de s’installer ici pour nous. On est encore en réflexion », résume Ombeline Toi, l’une des bénévoles de l’association Terre. Sa réponse est attendue avant l’été. Quant à l’ouverture de la friche au public, elle devrait intervenir d’ici « deux à trois ans » selon le département.