SCIENCESL’Ifremer contraint d’annuler des missions en raison des prix du carburant

Prix du carburant : L’Ifremer contraint d’annuler et de reporter des missions scientifiques

SCIENCESEn raison de l’envolée des prix du carburant, l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer n’a pas d’autre choix que de réduire la voilure
Le «Thalassa» est l'un des quatre navires hauturiers de lIfremer.
Le «Thalassa» est l'un des quatre navires hauturiers de lIfremer.  - Fred Tanneau / AFP / AFP
Jérôme Gicquel

Jérôme Gicquel

L'essentiel

  • Conséquence de la flambée des prix du carburant, l’Ifremer se voit contraint de réduire la voilure.
  • Cinq missions scientifiques prévues cette année ont ainsi été annulées et une autre reportée au mieux à 2023.
  • Pour l’Ifremer, l’avenir passe par des bateaux moins gourmands et moins polluants mais le renouvellement de la flotte n’est pas prévu avant dix ans.

«Nos océans ne peuvent plus attendre ». La phrase est signée du président Emmanuel Macron qui avait annoncé en clôture du One Ocean Summit qui s’est tenu en février Brest des « décisions historiques » pour mieux protéger les océans et faire cesser la surexploitation des ressources marines. Quatre mois plus tard, ce n’est pas trop la fête dans le milieu de la recherche océanographique française. Car entre-temps, la Russie a envahi l’Ukraine, entraînant une flambée des prix des carburants. Conséquence, l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer) se voit contraint de réduire la voilure en raison de la hausse des coûts d’exploitation de ses navires.

Prévue en fin d’année aux Antilles à bord de l’Atalante, la mission Diadem n’aura ainsi pas lieu cette année faute de moyens financiers. « Elle est reportée, au mieux, en 2023 », souligne Olivier Lefort, directeur de la Flotte océanographique française qui est opérée depuis quatre ans par l’Ifremer, basé à Brest. Si cette mission hauturière est toujours à l’ordre du jour, cinq autres campagnes côtières n’auront pas cette chance, car elles ont été purement annulées. « Dans le contexte actuel, on doit en faire moins avec un budget constant, indique-t-il. On a donc essayé de trouver la moins mauvaise solution pour équilibrer notre budget ».

Près de 170 missions réalisées chaque année

Dans un communiqué, le député brestois fraîchement réélu Jean-Charles Larsonneur (Horizons) s’est alarmé de la situation. « C’est inacceptable pour la science et l’océanographie françaises, au moment où nous en avons le plus besoin : enjeux climatiques, biodiversité et gestion des ressources halieutiques. Les moyens alloués aux missions océanographiques françaises sont une préoccupation constante », souligne-t-il. S’il concède qu’annuler une mission est « toujours une décision difficile », Olivier Lefort ne veut pas non plus se montrer alarmiste. « Ces missions annulées ou reportées ne représentent qu’un tout petit pourcentage de nos missions », assure-t-il.

Longs de plus de 70 mètres, les quatre navires hauturiers de l’Ifremer, parmi lesquels l’Atalante ou le Thalassa, réalisent ainsi chaque année une quarantaine de missions sur tous les océans, dont une quinzaine de campagnes scientifiques. Plus petits (entre 25 et 35 mètres), les six navires côtiers tournent quant à eux à un rythme de 130 missions environ par an. « Dire que la France n’a plus les moyens d’envoyer ses navires en mission me semble donc un peu exagéré », assure-t-il, réagissant à un article publié dans le Télégramme.

Le renouvellement de la flotte pas avant dix ans

Dans le monde maritime, cette flambée des prix du carburant a toutefois servi de déclencheur pour engager la réflexion sur la transition énergétique. « Il n’y a pas encore beaucoup de solutions mais cela va s’accélérer très vite », assure Olivier Lefort. Pour l’Ifremer, cela passe par un renouvellement de la flotte avec des navires moins gourmands et moins polluants. Mais celle-ci n’interviendra pas tout de suite. « Nos navires ont encore une dizaine d’années devant eux », précise-t-il.

En attendant, des discussions viennent de s’engager avec les ministères de tutelle de l’Ifremer pour trouver des solutions à court et moyen terme pour faire face à cette flambée du prix du gasoil.