INFLATIONPourquoi ce mois d’août est-il « le moment ou jamais » pour emprunter ?

Immobilier : Pourquoi ce mois d’août est-il « le moment ou jamais » pour emprunter ?

INFLATIONLes conditions sont particulièrement favorables à l’emprunt en ce moment, une situation qui devrait très vite changer
Ne reporte pas à demain l'emprunt que tu peux faire aujourd'hui
Ne reporte pas à demain l'emprunt que tu peux faire aujourd'hui - Pixabay / Pixabay
Jean-Loup Delmas

Jean-Loup Delmas

L'essentiel

  • Amateurs d’immobiliers et de gros coups, voici une situation d’août qui devrait vous intéresser : une inflation à 6 % pour un taux d’emprunt sur 20 ans à moins de 2 %, soit un taux réel d’emprunt en gros négatif.
  • Trop beau pour durer ? Assurément, puisque les conditions devraient fortement se dégrader dans les prochains mois.
  • Malgré cette autoroute vers l’emprunt, le marché du crédit ne s’emballe pas tant que ça, en raison de nombreuses incertitudes économiques.

«L’heure, c’est l’heure. Avant l’heure, ce n’est pas l’heure. Après l’heure, ce n’est plus l’heure. » Cette citation, dont on vous a sans doute rabâché les oreilles petit, pourrait bien désormais s’appliquer à votre politique d’emprunts. Il y a UN moment précis pour emprunter pour que ce soit au maximum rentable et avantageux, et ça tombe bien, c’est maintenant.

Même si le taux d’emprunt a augmenté, passant de 1 % sur 20 ans en janvier à 1,85 % désormais, il est largement inférieur à l’inflation, actuellement de 6 % en France. « Le taux réel d’emprunt est donc hyperfavorable car largement négatif », abonde Stéphanie Villers, spécialiste en macroéconomie. Même constat chez Philippe Crevel, économiste et directeur du Cercle des Epargnants : « La période est idéale pour emprunter, surtout si votre salaire suit celui de l’inflation. Ce n’est pas tous les jours qu’on a un taux réel aussi avantageux ! » Une situation qui rappelle à l’expert les années 1970-1980, lorsque dans un contexte similaire, de nombreux Français en avaient profité pour devenir propriétaire.

Période idéale, marché incertain

Les férus d’immobilier ou des bons coups ne s’y trompent pas, puisque selon la Banque de France, les crédits aux particuliers sont en pleine croissance, + 6,2 % en juin par rapport à l’an dernier, et une jolie estimation pour juillet à 6,5 %, des niveaux jamais vu depuis les records de 2019 et l’avant-crise sanitaire. « Les crédits sont en hausse depuis plusieurs mois, et rien n’indique une baisse à venir pour le moment », s’enthousiasme Philippe Crevel.

Une hausse importante certes, mais pas vraiment de ruée non plus. Comment expliquer cette frilosité avec une différence aussi énorme entre l’inflation et les taux d’emprunts ? Si la période est propice aux placements tactiques, elle reste néanmoins très incertaine : « Pour la plupart des Français et Françaises, il y a un manque énorme de visibilité sur la situation économique du pays et sur leur avenir professionnel, ce qui se prête peu aux emprunts », reconnaît Stéphanie Villers.

La situation est idéale oui, mais uniquement pour « les salariés dans une situation établie et avec suffisamment de revenus pour voir venir les changements », précise l’experte. Ce qui, admettons-le, réduit pas mal l’échantillon. Selon un sondage Ifop pour Cafpi, 79 % des Français jugent que « nous sommes encore en pleine crise », 66 % sont inquiets des effets de l’inflation sur l’accès au crédit et 57 % estiment que le niveau d’inflation peut retarder un projet d’achat. Pas la joie donc.

Rendez-vous en immobilier inconnu

Une incertitude court également sur le marché immobilier, dont les règles ont changé depuis la crise sanitaire : « On a vu des phénomènes inhabituels apparaître, comme la baisse de prix des loyers à Paris ou une nette augmentation dans des zones propices au télétravail. Toute la question est de savoir si ces tendances seront durables », renseigne François Geerolf, professeur d’économie et spécialiste des questions de placement. Autre situation favorisant l’attente, l’espoir d’une chute des prix de l’immobilier à l’avenir. Mais la situation a peu de chance d’arriver, selon le professeur : « Contrairement aux autres pays développés, le prix de l’immobilier en France n’a pas augmenté tant que ça, Il ne devrait donc pas y avoir de forte baisse ».

Et tic-tac tic-tac, l’heure tourne et le temps presse pour faire ses emprunts. La Banque centrale européenne a officiellement annoncé le 21 juillet remonter ses taux d’intérêt, tandis que l’inflation pourrait bientôt atteindre son pic. « Les prix devraient augmenter de moins en moins vite, et le coût de l’emprunt grimper en flèche, rendant le taux réel d’emprunt beaucoup moins rentable », note Stéphanie Villers.

Demain, c’est loin

Philippe Crevel est formel : « Aujourd’hui est plus propice à l’emprunt que demain. Bientôt, les conditions seront bien moins favorables il y a donc naturellement chez les Français qui le peuvent un mouvement de "maintenant ou jamais" ». D’ici la fin de l’année, les taux bruts des crédits immobiliers pourraient atteindre en moyenne les 3 %. Le 29 juin, la Fédération nationale de l’immobilier (FNAIM) annonçant dans son son rapport semestriel une « phase de turbulence » pour le marché de l’immobilier et s’attendait à une baisse nette de l’activité pour la fin d’année.

Seule lueur d’espoir pour François Geerolf, les balbutiements de l’économie à venir pourraient redorer l’image de l’emprunt, peu importe sa rentabilité : « En période de chaos, l’immobilier reste une valeur refuge, peu corrélée avec le reste du marché économique. » Après l’heure, c’est parfois toujours l’heure.

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