ANALYSEQuelles conséquences après la perquisition chez Donald Trump ?

Perquisition chez Donald Trump: Quelles conséquences pour l'ancien président après ce coup de force?

ANALYSELa justice fédérale s’intéresse à des documents confidentiels que Donald Trump aurait emportés, potentiellement illégalement, avec lui. Mais l’ancien président tente déjà de capitaliser sur ce qu’il qualifie de « persécution »
Donald Trump dans sa résidence de Mar-a-Lago, en Floride, en 2019.
Donald Trump dans sa résidence de Mar-a-Lago, en Floride, en 2019. - AFP / Pixpalace
Philippe Berry

Philippe Berry

C’est une petite bombe qui secoue la campagne présidentielle de 2024 avant même qu’elle n’ait commencé. Sans précédent dans l’histoire moderne américaine, la perquisition de la résidence de Donald Trump de Mar-a-Lago, en Floride, lundi, a été dénoncée par l’intéressé comme une « persécution ». Selon les médias américains, les agents du FBI recherchaient des documents confidentiels que l’ancien président aurait emportés avec lui en quittant la Maison Blanche. Mais même si des ennuis judiciaires ne sont pas exclus, Donald Trump semble plus que jamais décidé à se déclarer candidat.

Que sait-on de la perquisition ?

Une trentaine d’agents du FBI ont frappé chez Donald Trump lundi matin. Ils ont perquisitionné sa résidence de Mar-a-Lago, en Floride, pendant plusieurs heures, forçant notamment un coffre-fort. Selon le Wall Street Journal, une dizaine de cartons de documents ont été saisis. L’ancien président se trouvait dans le New Jersey, où il séjourne pendant l’été. Le Secret service, qui assure sa protection et celle de sa résidence, avait été prévenu.

Que cherchait le FBI ?

Le FBI et le département de la Justice, dont le bureau fédéral dépend, ne commentent pas. Selon les médias américains, l’affaire semble liée à de documents de la Maison Blanche que Donald Trump a emportés avec lui en Floride. En janvier, il avait été contraint de remettre 15 cartons aux Archives nationales, qui contenaient des dossiers classifiés. Selon CNN, des agents du FBI sont ensuite venus début juin, lors d’une visite cordiale. Ils ont demandé à Donald Trump de mieux sécuriser une pièce dans laquelle il stockait d’autres documents. Il a fait installer une serrure. La perquisition de lundi – au lieu d’une assignation pour obtenir les documents – représente une escalade majeure dans la procédure. Selon le New York Times, elle ne serait pas liée à l’enquête sur les violences du Capitole ou à l’élection de 2020.

Comment le FBI a-t-il obtenu son mandat ?

La perquisition a été autorisée par un juge de Floride. Cela signifie que le magistrat a été convaincu qu’il y avait une forte probabilité que le FBI trouverait des preuves que Donald Trump, ou son entourage, a enfreint la loi.

Est-ce illégal pour un président d’emporter des documents en quittant la Maison Blanche ?

Une loi sur les documents présidentiels stipule que tous les documents officiels d’un président en exercice doivent être transmis aux Archives nationales à son départ. Mais cette loi ne prévoit pas vraiment de sanctions. En revanche, la loi américaine interdit strictement à toute personne de conserver des documents classifiés et elle a déjà été appliquée à plusieurs reprises, allant jusqu’à l’emprisonnement. Un président a toutefois l’autorité pour déclassifier ce qu’il veut, à condition de le faire avant la fin de son mandat.

Que risque Donald Trump ?

« Tout porte à croire que la perquisition est le résultat d’une procédure pénale impliquant un grand jury », estime Bradley Moss, un avocat de Washington spécialiste des questions de sécurité nationale. S’il s’agissait simplement de simples documents administratifs non-transmis aux Archives nationales, une procédure civile aurait suffi, selon Moss. Mais la présence établie de documents confidentiels dans ceux remis en janvier rend l’affaire beaucoup plus sérieuse pour Donald Trump. Risque-t-il une inculpation ? Il y a trop d’inconnues à ce stade. « Il y a en théorie suffisamment de temps d’ici novembre 2024 pour inculper et poursuivre Donald Trump si le gouvernement le décidait », estime l’avocat. Avec la perspective de déchirer un peu plus un pays déjà coupé en deux.

Donald Trump pourrait-il être déclaré inéligible ?

Il y a débat chez les juristes. L’avocat Marc Elias, qui a combattu les recours de Donald Trump lors de la présidentielle de 2020, note sur Twitter qu’un statut du code pénal américain prévoit une possible inéligibilité mais reconnaît que le cas d’un président est couvert par la Constitution. Et selon Bradley Moss, le Congrès ne pourrait pas déclarer Donald Trump inéligible sur la base d’une condamnation au pénal. C’est uniquement possible après une condamnation dans une procédure d’impeachment ou en invoquant le 14e amendement en cas d’insurrection. « En théorie, Donald Trump pourrait être candidat même s’il était en prison », insiste Moss.

Donald Trump peut-il capitaliser sur ce qu’il dénonce comme une « persécution » ?

Une perquisition chez un ex-président, qui semble sur le point de se déclarer candidat, est du jamais vu. Les républicains volent à son secours et promettent d’enquêter sur les actions du ministère de la Justice s’ils redeviennent majoritaires à la Chambre aux élections de la mi-mandat en novembre. Même certains démocrates, comme l’ex-gouverneur Cuomo, ou l’ancien candidat Andrew Yang, estiment que le ministère doit s’expliquer, sous peine de faire le jeu de Donald Trump, avec la perception d'une instrumentalisation du ministère de la Justice à des fins politiques.

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Donald Trump a déjà exploité la perquisition avec un email pour lever des fonds, mardi matin. Et il a publié un long clip anxiogène sur « un pays en déclin », flirtant de plus en plus avec une candidature. Il a tout intérêt à aller vite : il lui sera encore plus facile de crier à la vendetta une fois candidat. Et s’il gagne en 2024, il serait protégé face à d’éventuelles poursuites en vertu de la politique du ministère de la Justice de ne pas inculper un président pendant son mandat.