FAKE OFFNon, les Etats-Unis ne se « mettent pas à taxer les superprofits »

Etats-Unis : Non, comme l'indique Manon Aubry, Joe Biden ne se « met pas à taxer les superprofits »

FAKE OFFJoe Biden souhaite instaurer un nouvel impôt, mais ce n’est pas à proprement parler « une taxe sur les superprofits »
Manon Aubry, député européenne
Manon Aubry, député européenne - RAPHAEL LAFARGUE-POOL/SIPA / SIPA
Lina Fourneau

Lina Fourneau

L'essentiel

  • Sur Twitter, la députée européenne Manon Aubry a estimé que les Etats-Unis souhaitaient mettre en place la taxation sur les superprofits, rejetée en France.
  • Seulement, si l’impôt souhaité par Joe Biden y ressemble, ce n’est pas exactement la même chose.
  • Contrairement à la taxe sur les superprofits votée par d’autres voisins européens, l’impôt américain se veut permanent et concerne tous les secteurs.

Passe d’armes sur Twitter entre Manon Aubry et Nathalie Loiseau, ce mardi. Tout commence par un tweet de l’Insoumise citant une publication du président américain Joe Biden, qui dit ceci : « Nous allons rétablir une certaine équité dans le code des impôts en imposant un impôt minimum sur les sociétés de 15 % aux sociétés milliardaires. Lorsque la loi sur la réduction de l’inflation sera adoptée, ils commenceront enfin à payer leur juste part ». Et Manon Aubry d’applaudir la décision en pointant du doigt l’irresponsabilité de la France de ne pas avoir voté la taxe sur les superprofits.

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Un tweet qui n’est visiblement pas passé dans le camp adverse. « Alors là, Manon Aubry, vraiment… Vous savez que vous racontez des carabistouilles », lui a répondu Nathalie Loiseau, députée européenne et ancienne ministre des Affaires européennes. Selon cette dernière, les Etats-Unis n’auraient jamais taxé les superprofits, mais auraient plutôt mis en place « un impôt minimum à 15 % ». Qui a raison ? Qui a tort ? 20 Minutes fait le point.

FAKE OFF

Pour mieux comprendre l’indignation de la députée Manon Aubry, il faut revenir aux prémices de la loi sur les super-profits en France. Le 1er août dernier, après de vives discussions au Parlement, le Sénat a tranché : il n’y aura pas de taxe sur les superprofits des grands groupes. La proposition émanait surtout des députés de l’opposition (la gauche et le centre majoritairement) qui proposaient une « taxe exceptionnelle [de 25 % à 50 %] sur les superprofits ». « L’idée est qu’en période de crise, les entreprises qui s’enrichissent de manière exceptionnelle doivent redistribuer une partie de cet argent », expliquait alors Manon Aubry. En face, l'exécutif préférait plutôt faire appel « à la responsabilité des entreprises ».

Mais la taxe des superprofits n’est pas seulement discutée en France. D’autres pays voisins l’ont par exemple déjà adoptée pour les entreprises du secteur de l’énergie, tels que le Royaume-Uni, l’Espagne et l’Italie. Les Etats-Unis ont-ils également suivi les pays européens ? Pas vraiment.

Un impôt complémentaire

Comme l'indique sa publication, le président Joe Biden souhaite mettre en place « un impôt minimum sur les sociétés de 15 % aux sociétés milliardaires ». Cela fait partie du large plan écologique et social du locataire de la Maison-Blanche. Si ce nouvel impôt ressemble fortement à une taxe sur les superprofits, ce n’est pas vraiment le cas.

En effet, les taxes sur les superprofits votées en Europe ont été décidées en réaction avec le contexte inflationniste actuel. C’est avant tout le secteur de l’énergie qui est visé, accusé de faire de nombreux bénéfices. Mais ces nouvelles taxes sont temporaires et ne concernent pas toutes les entreprises. Le gouvernement espagnol a par exemple voté cette taxe pour l’année 2023 et 2024. Au contraire, l’impôt américain s’installerait durablement dans le droit fiscal et concernerait toutes les entreprises milliardaires.


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Aux Etats-Unis, le but de « l’Inflation Reduction Act » est plutôt de lutter contre l’utilisation des niches fiscales. D'après un article du Washington Post, la proposition de Joe Biden obligerait les entreprises milliardaires à revoir leur façon de calculer leur impôt annuel. Il y aura deux façons de l’estimer. Elles devront d’une part utiliser la fiscalité initiale, le taux d’impôt sur les bénéfices des sociétés, soit 21 % des bénéfices aux Etats-Unis. D’autre part, elles devront appliquer le taux de 15 % aux bénéfices déclarés aux actionnaires, plus communément appelés les revenus comptables. Si ce dernier montant est supérieur à l’impôt initial, l’entreprise devra donc payer la différence. Selon le Congrès, cela pourrait rapporter 313 milliards de dollars sur dix ans.

La confusion avec l’impôt minimum mondial

Cependant les lectures de cette taxe par Manon Aubry et Nathalie Loiseau semblent toutes deux erronées. Du côté de la France Insoumise, la députée considère que la nouvelle de 15 % s’ajoute à celle de 21 %, ce qui est faux car elles sont plutôt complémentaires. Si elles s’ajoutaient, le taux d’imposition grimperait à 36 %.

Du côté d’En marche, Nathalie Loiseau semble confondre la nouvelle taxe américaine avec l'impôt minimum global de 15%. Dans son article, le Washington Post précise bien que ce sont deux choses différentes. L’impôt minimum mondial sur les multinationales est lui poussé par les eurodéputés. Mais comme l’indiquent nos confrères, les discussions ont pour le moment échoué au niveau du Congrès américain.

Finalement, Manon Aubry maintient qu’il existe une ressemblance entre les nouveautés fiscales. « Pourquoi c’est une taxe sur les superprofits ? Parce qu’en pratique, toutes les grandes entreprises aux bénéfices en explosion seront davantage mises à contribution. A la fois par l’impôt sur les sociétés classique, mais aussi par cette nouvelle taxe qui s’ajoutera et fera office de "surtaxe" », a défendu la députéedans un tweet publié mercredi.