FAKE OFFOui, la sécheresse de 2022 est « plus intense » que celle de 1976

Oui, les canicules et la sécheresse en 2022 sont « plus intenses » qu’en 1976

FAKE OFFDes posts viraux minimisent les vagues de chaleur et la sécheresse de cet été, en rappelant les événements de 1976
Cette photo d'une agricultrice de l'Orne regardant, le 16 juin 1976, sa mare asséchée est régulièrement reprise pour illustrer la sécheresse de 1976 sur les réseaux sociaux.
Cette photo d'une agricultrice de l'Orne regardant, le 16 juin 1976, sa mare asséchée est régulièrement reprise pour illustrer la sécheresse de 1976 sur les réseaux sociaux.  - AFP / AFP
Emilie Jehanno

Emilie Jehanno

L'essentiel

  • Sur Facebook, un post, vu plus de 10 millions de fois, présente un témoignage racontant « la canicule de 1976 », vécue sans « psychose ». Sur Twitter, un internaute critique « les alarmistes [qui] nous parlent de sécheresse jamais vue due au réchauffement climatique ».
  • « On a connu des événements intenses par le passé, mais là, ce qui est vraiment marqué, c’est surtout l’ampleur généralisée et la recrudescence des sécheresses », explique Simon Mittelberger, climatologue.
  • La sécheresse est « plus intense cette année », pointe-t-il également.

Alors qu’un pic de chaleur est attendu cette semaine, des posts viraux sur les réseaux sociaux dénoncent un affolement face aux canicules et à la sécheresse qui frappent la France depuis mai. La situation actuelle est régulièrement comparée à l’été 1976. Sur Facebook, un post très diffusé et vu plus de 10 millions de fois, présente un témoignage racontant « la canicule de 1976 », « vue et vécue personnellement » avec des températures de « 45 °C en plein soleil ».

Y est déplorée une « psychose médiatique ». Pour affronter cet épisode, il suffisait de « vivre à l’italienne » en commençant à travailler dès 5 heures du matin, en se reposant l’après-midi, en s’hydratant et en plaçant des linges humides derrière les volets fermés. « Pas de psychoses délurées, mode : Attention… C’est la fin du monde…. coupez toutes les énergies », est-il écrit.

Une autre publication détournant une image du capitaine Haddock est légendée : « En 1976 la sécheresse avait la même ampleur ». Sur Twitter, un internaute critique « les alarmistes [qui] nous parlent de sécheresse jamais vue due au réchauffement climatique ». « En 1911, 1921, 1950 quand la sécheresse était bien supérieure, c’était quoi ? Sans compter la sécheresse de 1976, pas une goutte de pluie sur la France de mars à août et la canicule en juillet », commente-t-il.

FAKE OFF

Ces publications minimisent les effets du dérèglement climatique. « Ce que l’on a observé, c’est que l’on a de plus en plus de vagues de chaleur l’été et une hausse des sécheresses au printemps et à l’été entre les années 1960 et aujourd’hui », souligne Simon Mittelberger, climatologue et référent sécheresse pour Météo-France.

Les sécheresses se définissent comme un déficit en eau sur une période relativement longue, rappelle Météo-France. Trois types de sécheresse sont distingués : celle météorologique, qui correspond à un déficit prolongé de précipitations, celle hydrologique, qui se manifeste lorsque les lacs, rivières ou nappes souterraines montrent des niveaux anormalement bas et la sécheresse agricole, qui se caractérise par un déficit en eau des sols superficiels.

« Ce qui est marqué, c’est l’ampleur et la recrudescence des sécheresses »

Les derniers événements notables remontent à l’été 2003 et, plus récemment, ont eu lieu en 2015, 2017, 2018, 2019 et 2020. « On a connu des événements intenses par le passé, mais là, ce qui est vraiment marqué, c’est surtout l’ampleur généralisée et la recrudescence des sécheresses », poursuit Simon Mittelberger. Entre 1958, année où commence l’historique de Météo-France et 1988, il n’y a eu que deux sécheresses marquantes, celle de 1964, qui concernait le nord-est de la France, et celle de 1976.

Cette année-là, la sécheresse couvrait une grande partie du pays, à l’exception de la Corse et du pourtour méditerranéen qui étaient « plus humides qu’habituellement », note le climatologue. La sécheresse avait démarré au printemps, s’était accentuée en juin et avait donné lieu à d’importantes restrictions d’usages de l’eau. « Il y a eu une quasi-absence de précipitations ce mois-là », détaille Simon Mittelberger.

Une seule vague de chaleur avait frappé le pays sur une longue période entre le 23 juin et le 6 juillet. Et au mois d’août, la pluviométrie avait été extrêmement déficitaire sur le tiers nord de la France (80 %), mais excédentaire au Sud. Les températures avaient atteint entre 26 et 30°C lors des journées les plus chaudes, et ponctuellement 32°C en août, indique le service météorologique.

En 1976, des températures « globalement dans la normale de saison »

Pour autant, les températures au printemps et à l’été 1976 étaient « globalement dans la normale de saison, indique le climatologue. Alors que cette année, si on prend la période d’avril à juillet, on est à une anomalie positive de +1,7 °C au-dessus des normales ». De même, il n’y a pas trace de relevé à 45 °C au soleil, comme l’affirme un post viral : des températures localisées sont montées jusqu’à 35 °C ou 36 °C à l’ombre en 1976, nous indique Météo-France. En 2022, de nombreux records ont été battus avec plus de 40 °C relevées à l’ombre à Nantes, Biarritz, Angers, etc.


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La sécheresse est « plus intense cette année », pointe Simon Mittelberger. S’il reste pertinent de comparer ces épisodes, il faut aussi « regarder leur évolution dans le temps, appuie-t-il. On observe des sols qui s’assèchent de plus en plus l’été, dû à l’absence de pluies et surtout à des températures en hausse, qui aggravent les effets de la sécheresse », ce qui est particulièrement visible cet été. Juillet 2022 est déjà le mois de juillet le plus sec jamais enregistré, selon Météo-France.

Des épisodes de plus en plus fréquents et intenses à l’avenir

Selon le dernier rapport du Giec, ces épisodes climatiques extrêmes seront de plus en plus fréquents et intenses. « Avant, ce genre d’événements se produisaient tous les dix ans, expliquait fin juillet à 20 Minutes Jean Jouzel, climatologue, et ancien vice-président du conseil scientifique du Giec. Actuellement, on a multiplié par deux cette fréquence. Avec seulement 1 °C supplémentaire pour la planète, il faut la multiplier par quatre. Si l’on atteint les 4 °C de plus, ces épisodes seront quasiment annuels. »

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« Vivre à l’italienne » sera malheureusement insuffisant pour affronter ces sécheresses et vagues de chaleur. « La problématique va vraiment être sur la gestion de la ressource en eau », estime Simon Mittelberger.

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