SURVEILLANCEC’est quoi cette mission de l’ONU à la centrale nucléaire de Zaporojie ?

Guerre en Ukraine : C’est quoi cette mission de l’ONU à la centrale nucléaire de Zaporojie ?

SURVEILLANCEAlors que les experts de l’ONU sont en route pour la centrale nucléaire de Zaporojie, « 20 Minutes » fait le point sur cette inspection
Un soldat russe surveille la centrale de Zaporojie, située dans la ville d'Energodar, en Ukraine, le 1er mai 2022.
Un soldat russe surveille la centrale de Zaporojie, située dans la ville d'Energodar, en Ukraine, le 1er mai 2022.  - /AP/SIPA / SIPA
20 Minutes avec AFP

20 Minutes avec AFP

L'essentiel

  • Le sud de l’Ukraine reste au cœur du conflit tandis que des experts onusiens sont attendus à la centrale nucléaire de Zaporojie.
  • La visite de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), qui dépend des Nations Unies, était très attendue alors que lundi, les pays du G7 se sont dits « profondément préoccupés » par les risques d’accident nucléaire à Zaporojie.
  • Réclamée depuis des mois par l’AIEA, cette visite peut se faire cette semaine, le président russe Vladimir Poutine ayant accepté qu’elle passe par l’Ukraine et non pas par la Russie comme il l’exigeait auparavant.

Au cœur de toutes les tensions, la centrale nucléaire de Zaporojie va recevoir la visite d’un groupe d’experts de l’Agence internationale de l’énergie atomique ( AIEA). Leur objectif est de vérifier les infrastructures de cette centrale qui abrite six des 15 réacteurs nucléaires de l’Ukraine, attaquée par la Russie depuis six mois. Occupée par Moscou, la centrale est à risque entre les bombardements, le risque de pénurie d’eau pour assurer son refroidissement ou sa déconnexion du réseau électrique. 20 Minutes fait le point sur la mission de l’AIEA.

Pourquoi les experts de l’ONU se déplacent-ils à la centrale de Zaporojie ?

L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) s’inquiète depuis des mois de la situation à la centrale nucléaire de Zaporojie. Prise entre deux feux, cette dernière est occupée depuis début mars, peu après le début de l’invasion russe en Ukraine. Le directeur général de l’AIEA réclamait depuis plusieurs mois de pouvoir s’y rendre, avertissant du « risque réel de catastrophe nucléaire ». L’inquiétude est planétaire alors que Moscou et Kiev s’accusent mutuellement de bombarder la centrale. Les pays du G7 se sont dit lundi « profondément préoccupés » par les risques d’accident nucléaire à Zaporojie, demandant qu’une totale liberté de mouvement soit accordée aux experts internationaux.

« La Russie doit assurer un accès sûr et sans entrave » à l’équipe de l’AIEA, a réclamé un responsable américain, pour lequel l’option « la plus sûre » serait une extinction « contrôlée » des réacteurs. Preuve de l’atmosphère angoissante autour de la centrale, la mairie de Zaporojie a dit distribuer depuis le 23 août des comprimés d’iode à la population dans un rayon de 50 km autour de la centrale, à prendre en cas d’alerte aux radiations.

Quand la mission de l’AIEA doit-elle arriver ?

« Le jour est venu », soulignait le directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) lundi. D’après Rafael Grossi, la mission doit visiter « plus tard cette semaine » les installations nucléaires et sera constituée au moins d’une dizaine de personnes. « Nous devons protéger la sécurité de l’Ukraine et de la plus grande centrale d’Europe », a-t-il écrit sur Twitter. Avant de se déplacer, l’AIEA a dû s’entendre avec les deux camps et, si Kiev réclamait cette visite, Moscou s’est montré réticent. Devant cette « dangereuse » situation, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a pressé vendredi le gendarme onusien du nucléaire d’envoyer au plus vite une équipe.

Le président russe Vladimir Poutine a finalement accepté l’organisation d’une mission passant « par l’Ukraine » et non par la Russie, ce qu’il exigeait auparavant, permettant la visite des experts de l’ONU. La Russie juge à présent cette inspection « nécessaire », d’après le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov. Au-delà des exigences des belligérants, il s’agit d’une mission à risque pour les experts onusiens. « Cette mission sera la plus dure de l’histoire de l’AIEA en raison de l’activité de combat menée par la Russie sur le terrain », a estimé lundi le ministre ukrainien des Affaires étrangères Dmytro Kouleba lors d’un déplacement à Stockholm.

Entre jeudi et vendredi, la centrale et ses six réacteurs de 1.000 mégawatts chacun ont été « totalement déconnectés » du réseau national à cause de dommages sur les lignes électriques, selon Kiev, avant d’être reconnectés et remis en route. « L’infrastructure de la centrale a été endommagée et il existe des risques de fuite d’hydrogène et de pulvérisation de substances radioactives », avait alerté samedi Energoatom. Par ailleurs, selon l’opérateur « dix habitants ont été blessés », dont quatre employés de la centrale, dans des bombardements au cours des dernières vingt-quatre heures à Energodar, localité dont dépend la centrale.

Peut-on espérer une baisse des tensions après cette inspection ?

L’inspection de l’AEIA permettra de vérifier les installations de la centrale nucléaire. Elle ne pourra toutefois pas apaiser les tensions, alors que Kiev a lancé sa grande contre-offensive dans le sud du pays. L’Ukraine accuse les forces russes d’entreposer des armes lourdes et des munitions et d’avoir une garnison de 500 soldats sur le site nucléaire. Le Kremlin assure de son côté, n’avoir que du personnel en charge de la sécurité et a appelé lundi la communauté internationale à faire « pression » sur l’Ukraine pour réduire la tension autour de la centrale nucléaire.

Après plusieurs frappes sur le site qui ont provoqué une coupure temporaire de la centrale du réseau électrique la semaine dernière, l’opérateur ukrainien Energoatom a estimé samedi qu’il existait un risque de « pulvérisation de substances radioactives ». A Zaporojie même, les services de secours mènent déjà des exercices d’évacuation des habitants et s’entraînent à décontaminer la poussière radioactive. Près de deux tonnes de solution spéciale de décontamination sont stockées dans des installations de la ville.


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La visite des experts onusiens ne semble pas rassurer les habitants qui scrutent toujours avec inquiétude les abords de la centrale qui abrite six des 15 réacteurs ukrainiens. « Vous savez, on a connu l’accident de Tchernobyl​, la menace était déjà très grande (…) aujourd’hui, la menace est totale, à 100 % », souffle Kateryna, une retraitée de 68 ans, qui souffre toujours de problèmes à la thyroïde après la catastrophe de 1986. « C’est ma prédiction : six réacteurs au lieu d’un », dit-elle, en référence à la capacité de la centrale de Zaporojie, par rapport à l’unique réacteur accidenté lors de la catastrophe de Tchernobyl, qui est encore dans tous les esprits.