ETUDELes postures ne préviennent pas (ni ne provoquent) le mal de dos

Mal de dos : Une « bonne » posture ne prévient pas les douleurs… pas plus qu’une « mauvaise » ne les provoque

ETUDEDécouvrez, chaque jour, une analyse de notre partenaire The Conversation. Ce mardi, des physiothérapeutes s’interrogent sur ce qui est à l’origine du « mal du siècle » (dernier)
« Mal » se tenir ne serait finalement pas si mauvais pour le dos
« Mal » se tenir ne serait finalement pas si mauvais pour le dos - Andrey Popov / Shutterstock / The Conversation
20 Minutes avec The Conversation

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L'essentiel

  • Les preuves scientifiques manquent pour étayer solidement l’existence d’une relation entre posture (bonne ou mauvaise) et mal de dos, selon notre partenaire The Conversation.
  • Ce qui est établi, c’est que varier ses postures est probablement plus utile que de se conformer de manière rigide à une unique « bonne » posture spécifique.
  • Cette analyse a été menée par Peter O’Sullivan, professeur de physiothérapie musculo-squelettique, Leon Straker, professeur de physiothérapie et Nic Saraceni, maître de conférences en physiothérapie.

Le mal de dos est aujourd’hui la principale cause d’invalidité dans le monde. Sans en être rendu à une telle extrémité, nous avons tous eu un jour mal au dos, ou nous connaissons tous quelqu’un qui a souffert de ce type de douleur à un moment de son existence.


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Le mal de dos apparaît souvent à l’adolescence, et sa fréquence augmente à l’âge adulte. Chez 25 % des gens qui en souffrent, il peut devenir persistant, pénible et invalidant. La douleur affecte alors leur capacité à s’adonner à des activités sportives et physiques, professionnelles, voire à mener des actions simples de la vie quotidienne. Le mal de dos est fréquemment aggravé par le simple fait de s’asseoir, se tenir debout, se pencher ou soulever des charges.

On croit généralement qu’une « bonne » posture est importante pour protéger la colonne vertébrale des dommages, ainsi que pour prévenir et traiter les maux du dos. Par « bonne posture », on entend généralement le fait de s’asseoir et de se tenir « droit » – le fameux « redresse-toi », « tiens-toi droit », etc – ou le fait de soulever des charges en s’accroupissant avec un dos bien aligné.

À l’inverse, il est déconseillé de se tenir affaissé lorsqu’on est assis ou voûté lorsque l’on se tient debout, ou de soulever des charges avec le dos rond. Ce point de vue est largement partagé que l’on souffre du dos ou non, et il est relayé que par les professionnels de la santé au travail et des soins de santé primaires…

Et pourtant : de façon étonnante, les preuves scientifiques manquent pour étayer solidement l’existence d’une relation entre la posture (bonne ou mauvaise) et le mal de dos. La perception de ce qui est considéré comme une « bonne » posture semble plutôt résulter, en réalité, d’une combinaison de présomptions non fondées et de désirabilité sociale (la « désirabilité sociale » se définit comme « l’adéquation connue des comportements observés ou anticipés d’une personne aux motivations ou aux affects réputés des membres typiques d’un collectif social »).

Les revues systématiques des données tirées des travaux menés sur le sujet ont révélé que les interventions ergonomiques pour les travailleurs et les conseils prodigués aux travailleurs manuels quant à la meilleure posture à adopter pour soulever des charges n’ont, en réalité, pas réduit les douleurs dorsales liées à leurs tâches.

Les positions assises et debout

Notre groupe de recherche a mené plusieurs études explorant la relation entre postures et douleurs dorsales. Nous avons cherché à savoir si, au sein d’une population adolescente de grande taille, les positions assises affaissées ou érigées « non neutres » (par exemple, le fait de se tenir debout avec le dos cambré ou affaissé), étaient associées à la survenue de mots de dos, ou la précédaient. Conclusion : nous n’avons trouvé que peu de preuves qui viennent étayer l’un ou l’autre de ces points de vue.

Ces résultats sont cohérents avec d’autres revues systématiques qui n’avaient pas non plus trouvé de différences dans les postures assise ou érigée de populations adultes avec et sans douleur dorsale.

Dans la vie courante, les gens adoptent diverses postures affectant leur colonne vertébrale, mais concrètement, il n’existe pas de posture unique qui soit capable, à elle seule de protéger contre le mal de dos : les individus qui se tiennent bien droits tout comme ceux qui adoptent une posture avachie peuvent souffrir de douleurs dorsales.


Beaucoup d’entre nous ont vu de telles affiches sur leur lieu de travail. Cependant, ces directives ne sont fondées sur aucune preuve scientifique
Beaucoup d’entre nous ont vu de telles affiches sur leur lieu de travail. Cependant, ces directives ne sont fondées sur aucune preuve scientifique - Shutterstock

La posture de levage

Les recommandations faites en milieu professionnel concernant les « bonnes » postures ou les postures « sûres pour le dos » à adopter lorsque l’on doit soulever des charges importantes, quoique très relayées, sont également peu ou pas étayées. Notre étude systématique n’a ainsi trouvé aucun élément scientifique appuyant le fait que soulever des charges en ayant le dos rond serait associé à des douleurs dorsales ou prédictif de telles douleurs.

Qui plus est, nos récents travaux, menés en laboratoire ont révélé que des personnes ayant exercé un travail de manutention pendant plus de cinq ans et ne souffrant pas de maux de dos étaient plus susceptibles de soulever des charges en ayant une posture plus voûtée, avec le dos rond, que les autres… Paradoxalement, les travailleurs manuels souffrant de douleurs dorsales avaient, eux, eu tendance à adopter une posture plus accroupie et un dos plus droit.

En d’autres termes, selon ces résultats, les personnes souffrant de mal de dos sont celles qui ont eu tendance à suivre les recommandations de « bonne » posture, tandis que celles qui ne les suivent pas n’ont pas eu davantage mal au dos.

Une étude de petite étude (menée sur 12 sujets) a par ailleurs suggéré qu’à mesure que des personnes souffrant de douleurs dorsales invalidantes se rétablissaient, elles devenaient moins précautionneuses et s’éloignaient généralement des conseils de « bonne » posture.

Si ce n’est pas la posture, quelle est l’origine du mal ?

Aucune preuve scientifique n’indique donc pour l’instant qu’il existerait une « bonne posture » unique qui serait capable de prévenir ou de réduire les maux de dos pour tout le monde. La colonne vertébrale, au sein de l’espèce humaine, varie grandement en configuration et en taille d’une personne à l’autre : la posture est donc très individuelle, propre à chacun.

Ce qui est établi, c’est que le mouvement est important pour préserver la bonne santé de notre dos. Apprendre à varier ses postures et en adopter de différentes qui sont confortables est probablement plus utile que de se conformer de manière rigide à une unique « bonne » posture spécifique.

Si le mal de dos peut s’avérer intense et pénible à supporter, chez 90 % des gens, il n’est pas associé à des lésions ou des pathologies tissulaires identifiables. Dans certains cas, le mal de dos peut se déclencher brutalement, lorsqu’une charge inhabituellement lourde est portée de manière brusque et maladroite, un peu comme quand on se fait une entorse… Mais il peut aussi survenir à la manière d’un mauvais mal de tête, sans qu’une blessure n’en soit à l’origine.


Il n’existe actuellement aucune preuve de scientifique de l’existence d’une « bonne posture » qui permettrait de prévenir les douleurs ou les blessures dorsales. Mais l’exercice et le mouvement sont à privilégier
Il n’existe actuellement aucune preuve de scientifique de l’existence d’une « bonne posture » qui permettrait de prévenir les douleurs ou les blessures dorsales. Mais l’exercice et le mouvement sont à privilégier - Shutterstock

On sait toutefois que les individus sont plus vulnérables au mal de dos lorsque leur santé est déjà fragilisée. Peut ainsi jouer le fait :

  • d’être stressé ;
  • d’être fatigué ou épuisé ;
  • de mal dormir ;
  • d’être moins actif.

En outre, un mal de dos déjà présent est plus susceptible de persister si l’on :

  • devient excessivement inquiet et craintif à propos dudit mal de dos ;
  • surprotège son dos et que l’on évite le mouvement, l’activité physique, le travail et les interactions sociales.

Que faire face au mal de dos ?

Dans un petit nombre de cas (de 1 % à 5 %), le mal de dos peut être causé par une pathologie, notamment une fracture, une tumeur maligne, une infection ou une compression nerveuse (cette dernière est associée à des douleurs dans les jambes et à une perte de force musculaire et de sensation). Dans ces cas, il faut bien sûr consulter un médecin.

Mais pour la plupart des gens (90 %, comme indiqué précédemment), le mal de dos est associé à une sensibilisation des structures dorsales, mais pas à une lésion tissulaire identifiable.

Dans cette situation, le fait de trop se focaliser sur le maintien d’une « bonne » posture peut détourner l’attention d’autres facteurs connus pour leur importance pour la santé de la colonne vertébrale. Ces facteurs sont notamment les suivants :

  • bouger et détendre son dos ;
  • pratiquer régulièrement une activité physique adaptée de son choix ;
  • prendre confiance en soi et rester en forme pour ses tâches quotidiennes ;
  • préserver des habitudes de sommeil et un poids corporel sains ;
  • prendre soin de sa santé générale, physique et mentale.

Parfois, y parvenir nécessite d’être accompagné et d’avoir le soutien d’un clinicien compétent.


NOTRE DOSSIER « DOS »

En définitive : que vous soyez assis ou debout, arrangez-vous pour adopter des postures détendues et confortables, et faites-les varier. Et si vous devez soulever des objets lourds, les preuves scientifiques actuellement disponibles suggèrent qu’il n’y a pas de problème à le faire… même avec le dos rond. Assurez-vous simplement que votre condition physique est suffisamment bonne pour cette tâche. Et prenez soin de votre santé.


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Cette analyse a été rédigée par Peter O'Sullivan, professeur de physiothérapie musculo-squelettique, Leon Straker, professeur de physiothérapie et Nic Saraceni, maître de conférences en physiothérapie (tous trois à l'Université Curtin de Perth, Australie).
L’article original a été publié sur le site de 
The Conversation.