INNOVATIONEt si la péniche à hydrogène remplaçait les camions ?

Toulouse : Et si la péniche à hydrogène remplaçait les camions ?

INNOVATIONUne entreprise toulousaine planche sur l’HyBarge, une péniche silencieuse et écologique propulsée à l’hydrogène, pouvant se substituer aux poids lourds le long des axes logistiques
Une vue d'artiste de la future Hybarge, une péniche de transport silencieuse et non polluante adaptée à 60% du réseau fluvial français.
Une vue d'artiste de la future Hybarge, une péniche de transport silencieuse et non polluante adaptée à 60% du réseau fluvial français. - L'EQUIPAGE / DR
Hélène Ménal

Hélène Ménal

L'essentiel

  • Après l’avion et la voiture à hydrogène, voici l’HyBarge, la barge écolo qu’un marinier toulousain ambitionne de mettre à flot en 2024.
  • D’une capacité d’emport de 300 tonnes, cette péniche pourrait transporter en un voyage l’équivalent du chargement d’une douzaine de poids lourds.
  • Un député toulousain suggère même de la tester pour évacuer les gravats que va générer la construction de la future ligne de métro.

Trois cents tonnes de marchandises soit « l’équivalent d’une douzaine de camions », glissant en silence sur les eaux vertes du Canal des deux mers plutôt que d’encombrer les routes. C’est la promesse de l’HyBarge, un bateau d’eau douce propulsé à l’hydrogène. Elle occupe depuis plusieurs années les pensées de Jean-Marc Samuel, marinier, et patron de l’entreprise de fret fluvial L’Equipage, basée à Ramonville, près de Toulouse. Y compris quand il est à la barre de La Tourmente, sa péniche de transport, qui carbure malheureusement pour l’heure au dispendieux diesel.

Entouré de deux cabinets d’études spécialisés, le fervent défenseur du transport par voie d’eau a modélisé une barge de grand gabarit équipée « d’une nouvelle chaîne de propulsion » : de moteurs électriques alimentés par une pile à combustible, elle-même mise en action par de l’hydrogène « compressé dans des bouteilles ».

Capable de naviguer sur 60 % du domaine fluvial

Il s’agit d’un « automoteur au gabarit Freycinet », ces écluses de 40 mètres de large. « Capable donc de naviguer sur 60 % du Réseau fluvial français », insiste Jean-Marc Samuel. Même si elle ne pourra le faire sur le célèbre Canal du Midi que jusqu’à l’écluse du Sanglier, à une trentaine de kilomètres au sud-est de Toulouse. Mais le marinier vise plutôt le Nord, le Canal de Garonne entre Toulouse et Montech, un axe logistique très empruntés par les camions.



Et il ne rêve pas tout seul dans son coin. Voies navigables de France (VNF), l’opérateur des canaux français et l’Ademe (l’agence de la transition écologique) ont alloué des fonds aux études sur l’HyBarge. Jean-François Portarrieu, député apparenté Horizons du Nord Toulousain, s’est aussi laissé embarquer. Au mois d’août, à travers une question écrite, qui n’a pas encore reçu de réponse, il a souhaité attirer l’attention du gouvernement sur « ces futures péniches propulsées à l’hydrogène ». Il propose même une expérimentation très terre à terre : « Ces nouvelles barges à hydrogène vert pourraient, écrit-il, être utilisées pour le transport de certains matériaux depuis les nombreuses gravières du Nord toulousain (…). Une utilisation qui pourrait s’élargir à l’enlèvement des gravats du chantier du métro, offrant une solution alternative au transport routier ».

L’HyBarge a rendez-vous à Paris

Tisséo cherche effectivement des solutions « innovantes » pour évacuer, et valoriser, les 2,8 millions de mètres cubes de terre qui doivent être excavés pour construire la 3e ligne de métro ; mais sur l’option fluviale, Jean-Michel Lattes, le président de Tisséo, se montre sceptique. « Il faut que ce soit efficace et rapide. Or la vitesse sur le Canal est limitée, indique-t-il à 20 Minutes. Nous serions ravis s’il y avait une possibilité technique de développer la péniche à hydrogène, mais pour l’instant nous n’avons aucune assurance ».

« Il serait intéressant de comparer les coûts avec les camions en matière de pollution et d’encombrement des routes », avance de son côté Jean-Marc Samuel. Il boucle les « études de risque » et s’apprête à rechercher un chantier naval pour construire le premier prototype et présenter une HyBarge opérationnelle « en 2024 ». Il compte aussi taper dans l’œil de Clément Beaune, le ministre des Transports, ce jeudi à Paris où VNF organise le colloque « Vert le fluvial » pour accélérer la décarbonation du transport fluvial, notamment dans la perspective des JO de Paris 2024. « J’espère bien qu’il s’arrêtera à mon stand », lance le marinier.