on a dit « SOBRIETE » !L’extinction des boutiques la nuit, une obligation encore mal respectée

Crise énergétique : Pourquoi certaines boutiques refusent-elles encore d’éteindre la lumière la nuit ?

on a dit « SOBRIETE » !La loi oblige à éteindre les vitrines et enseignes a minima à partir de 1 heure du matin. Certaines métropoles vont plus loin, ce qui n’empêche pas des progrès à accomplir. Illustration à Nantes
Une vitrine restée allumée après minuit en centre-ville de Nantes, dans la nuit du 12 au 13 octobre 2022.
Une vitrine restée allumée après minuit en centre-ville de Nantes, dans la nuit du 12 au 13 octobre 2022. - F.Brenon/20Minutes / 20 Minutes
Frédéric Brenon

Frédéric Brenon

L'essentiel

  • La 14e édition du Jour de la nuit, manifestation nationale de sensibilisation à la pollution lumineuse, a lieu ce samedi 15 octobre.
  • Malgré la loi, de nombreuses vitrines et enseignes commerciales restent allumées toute la nuit.
  • Plusieurs grandes villes imposent une réglementation locale plus contraignante.

Il y a la réglementation nationale, peu connue, qui demande l’extinction des enseignes et publicités lumineuses la nuit, de 1 heure à 6 heures du matin, ainsi que celle des vitrines, de 1 heure à 7 heures. Mais, pour de plus en plus de villes et de métropoles, cela ne suffit pas dans la lutte contre la « pollution lumineuse » et la quête de « sobriété énergétique ». A l’image de Grenoble, Lyon ou Rennes, elles ont décidé d’aller plus loin en imposant un règlement local plus restrictif. Avec une communication et des sanctions à la clé.

A Nantes, le nouveau règlement local de publicité adopté le 30 juin exige ainsi l’extinction des magasins (enseignes et vitrines) dès minuit. « Ça aurait pu être plus tôt. Cet horaire est le fruit de discussions menées entre professionnels, associations et panel citoyens », explique Pascal Pras, vice-président de la métropole. Trois mois plus tard, qu’en est-il sur le terrain ? Les commerçants jouent-ils le jeu ?

« Ces gens sont complètement hors sol »

Pour l’association militante Résistance à l’agression publicitaire (RAP), la réponse est plutôt « oui ». « La grande majorité des commerçants éteignent leurs vitrines et enseignes. Est-ce que c’est dû au règlement, aux économies d’énergie, à une prise de conscience environnementale ? Je ne sais pas, mais il y a clairement une évolution positive. Après, ça dépend des zones. Il y a des endroits où il semble y avoir eu un effet d’entraînement, d’autres où il existe encore une grosse marge de progression », rapporte Lucas Lechat, membre de RAP. « On a encore des mauvais élèves, reconnaît l’association de commerçants Plein centre. Mais ça bouge de plus en plus, soit par conviction, soit par pragmatisme, c’est-à-dire pour réduire sa facture. »


Des vitrines éteintes, d'autres allumées, dans une rue commerçante du centre-ville de Nantes la nuit.
Des vitrines éteintes, d'autres allumées, dans une rue commerçante du centre-ville de Nantes la nuit. - F.Brenon/20Minutes

Pour en avoir le cœur net, nous sommes allés observer ce qu’il en était dans le grand centre-ville de Nantes. Après minuit, et même dès 22 heures, une large majorité des magasins sont effectivement éteints. Les récalcitrants se retrouvent surtout sur le plateau piétonnier : des boutiques de prêt-à-porter pour la plupart, mais aussi un opticien, une sandwicherie, un vendeur de prothèses auditives… Peu d’enseignes allumées, essentiellement des vitrines, voire quelques écrans diffusant des spots publicitaires à une rue déserte. « C’est ridicule, ces gens sont complètement hors sol », commente un groupe d’étudiants noctambules, devant une boutique de vêtements chics baignés de lumière. « J’avoue que ça me rassure de voir des vitres éclairées quand je passe le soir, témoigne une passante. On a l’impression qu’il y a de la vie. Mais c’est évidemment n’importe quoi par rapport à l’écologie. »

« Il y en a marre d’emmerder les gens qui bossent »

Contactés par 20 Minutes pour comprendre leur réticence, certains contrevenants, franchisés le plus souvent, renvoient la balle à leur siège national. D’autres évoquent des difficultés techniques avec la programmation de l’éclairage. « Je ne sais pas comment faire. Il faut que je me penche sur le sujet », avoue, gênée, une commerçante. Un responsable d’articles féminins se fâche. « Toutes mes ampoules ont été remplacées par des Leds. Ça ne consomme presque rien ! Il y en a marre d’emmerder les gens qui bossent. C’est plutôt du côté des multinationales qu’il faut chercher le gaspillage. »


Une rue du centre-ville de Nantes avec une vitrine allumée de nuit.
Une rue du centre-ville de Nantes avec une vitrine allumée de nuit. - F.Brenon/20Minutes

Consciente de l’enjeu, l’association de commerçants du centre-ville de Nantes a recruté une animatrice pour travailler les questions de transition écologique. Elle s’est aussi associée à l’association Bretagne vivante pour diffuser une vidéo de sensibilisation. « Nous, on recommande aux adhérents d’éteindre l’enseigne et la vitrine dès la fermeture de la boutique, explique Camille, animatrice de Plein centre. Il y a une idée préconçue qui circule encore c’est qu’en laissant sa boutique allumée, ça peut permettre d’attirer des clients supplémentaires. En réalité, à part de rares contre-exemples, le chaland qui se trouve dans les rues après 22 heures n’a pas pour objectif de venir le lendemain acheter les produits vus. On leur oppose aussi l’importance de l’image de marque. Aujourd’hui, on a une clientèle de plus en plus responsable, soucieuse de l’urgence climatique. Le risque en restant allumé la nuit c’est de renvoyer une image négative et de se faire pointer du doigt. »

Pédagogie avant les amendes

Du côté de Nantes Métropole, on indique faire preuve de « pédagogie » dans un premier temps. « Avant de verbaliser, nous allons d’abord à la rencontre des commerçants lorsque c’est nécessaire. Mais l’objectif est clair : l’éclairage doit s’arrêter aux horaires demandés », affirme Pascal Pras. D’ici à quelques semaines, des procès-verbaux seront donc dressés. « Une amende de 1.500 euros par dispositif. C’est-à-dire que le magasin qui cumule une enseigne, une vitrine ou un écran, par exemple, s’expose à une amende plus lourde. En cas de récidive, ça peut aller jusqu’au démontage des dispositifs. »



L’association RAP prévient qu’elle sera « vigilante » sur le respect de la réglementation. « La société a changé sur le sujet de la pollution lumineuse, estime Lucas Lechat. Quand on fait des actions d’extinction, on reçoit beaucoup de retours positifs. Ces lumières créent des nuisances aux riverains, détournent l’attention des automobilistes, sans parler des conséquences sur la biodiversité. Tout le monde doit être concerné. »