recap'Nouvelle formule, mise en examen… Retour sur l’affaire du Levothyrox

Levothyrox : De la nouvelle formule à la mise en examen, retour sur un scandale sanitaire

recap'En France, quelque 2,5 millions de patients utilisent quotidiennement la nouvelle formule du Levothyrox
La nouvelle formule du Levothyrox est au cœur d'une affaire sanitaire.
La nouvelle formule du Levothyrox est au cœur d'une affaire sanitaire. - AFP / AFP
Marion Pignot

M.P. avec AFP

L'essentiel

  • La filiale française du laboratoire pharmaceutique allemand Merck a été mise en examen ce mercredi pour « tromperie aggravée » dans le volet pénal de « l’affaire du Levothyrox ».
  • Au cœur de cette affaire, la nouvelle composition du Levothyrox, arrivée sur le marché français fin mars 2017. Cette nouvelle formule utilise toujours le même principe actif, la lévothyroxine, mais avec de nouveaux excipients, pour rendre sa composition plus stable.
  • 20 Minutes revient sur ce feuilleton judiciaire opposant le laboratoire à plusieurs milliers de patients.

EDIT du 6 novembre 2022 : L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a annoncé avoir été mise en examen lundi pour « tromperie » dans le dossier du changement de formule du Levothyrox, ce médicament conçu contre les problèmes de thyroïde. Cette mise en examen intervient un mois et demi après celle la filiale française du laboratoire pharmaceutique allemand Merck, fabricant de ce médicament, pour « tromperie aggravée ».

Un nouveau volet dans l’affaire du Levothyrox : la filiale française du laboratoire pharmaceutique allemand Merck a été mise en examen ce mercredi pour « tromperie aggravée » dans le volet pénal du dossier du changement de formule de ce médicament conçu contre les problèmes de thyroïde. « Le président de Merck en France a été entendu » mardi au pôle santé du tribunal judiciaire de Marseille, a annoncé le groupe dans un communiqué. A l’issue de cette audition, « la juge d’instruction a décidé de mettre la société Merck en examen pour tromperie aggravée ».

Cette décision est liée aux « modalités d’information mises en place au moment de la transition de l’ancienne à la nouvelle formule en 2017 », pour ce médicament prescrit contre l’hypothyroïdie, ajoute l’entreprise. Retour par étapes sur ce feuilleton judiciaire opposant le laboratoire à plusieurs milliers de patients.

Mars 2017, la nouvelle formule

Fin mars 2017, une nouvelle formule du Levothyrox, prescrit pour traiter les troubles de la thyroïde, fabriquée par l’allemand Merck et administré à trois millions de personnes en France, arrive sur le marché à la demande de l’Agence du médicament (ANSM). Le but de la nouvelle formule, qui utilise le même principe actif, la lévothyroxine, mais avec de nouveaux excipients, est de rendre sa concentration plus stable, élément crucial pour l’efficacité.

Crampes, maux de tête, vertiges ou perte de cheveux… Rapidement, des patients se plaignent de nombreux effets secondaires liés, selon eux, à cette nouvelle formule. Une pétition pour réclamer le retour de l’ancienne rassemble plus de 170.000 signatures.


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Mars-octobre 2017, la justice saisie

Les plaintes de patients se multiplient. Une enquête préliminaire est confiée au pôle de santé publique du tribunal de grande instance de Marseille, dont la compétence s’étend jusqu’à Lyon, siège français de Merck. L’ancienne formule du Levothyrox fait son retour dans les pharmacies le 2 octobre sous le nom d’Euthyrox. Mais le nombre de boîtes est limité. A Lyon, le siège français de Merck est perquisitionné le 3 octobre.

Octobre 2017, vers l’action collective

Les effets indésirables sont dus à « un déséquilibre thyroïdien » causé par le changement de traitement et non à la nouvelle formule, assure le 11 octobre l’ANSM. Sur le plan civil, une action collective est engagée le 24 contre Merck à Lyon. Une mission parlementaire menée par le député et médecin Jean-Pierre Door (LR, Loiret) conclut à un défaut d’information.

Mars 2018, l’information judiciaire contre X

Le 14 novembre, le Tribunal de grande instance de Toulouse condamne Merck à fournir « sans délai » l’ancienne formule. Au pénal, une information judiciaire contre X est ouverte à Marseille le 2 mars 2018 pour tromperie aggravée, blessures involontaires et mise en danger de la vie d’autrui, élargie en novembre à homicide involontaire.

D’après le ministère de la Santé, un demi-million de Français ont cessé de prendre le Levothyrox depuis le lancement de la nouvelle formule.



Été 2018, Merck dément toute anomalie

L’Association française des malades de la thyroïde (AFMT) dénonce la présence de nanoparticules de métal dans la nouvelle formule et des anomalies de composition. Le laboratoire dément toute anomalie, tandis que l’Agence du médicament confirme, le 5 juillet 2018, « la bonne qualité de la nouvelle formule ».

Merck annonce le 26 juillet qu’il prévoit de lancer la nouvelle formule dans 21 pays de l’UE après « avis positif » des instances sanitaires européennes. Le 20 décembre 2018, le ministère de la Santé note l’absence d’augmentation de « problèmes de santé graves » à l’issue d’une vaste étude de l’ANSM sur plus de 2 millions de patients, ce que confirme son rapport final en juin 2019. Cette agence est aujourd’hui visée par une action collective de quelque 1.100 plaignants pour « défaut de vigilance » et « défaut d’anticipation », une action lancée en septembre 2021 devant le tribunal administratif de Montreuil (Seine-Saint-Denis).

Fin 2022, la fin de l’ancienne formule

Le 5 mars 2019, à l’issue du premier procès intenté au civil dans cette affaire, le tribunal d’instance de Lyon déboute 4.113 plaignants, écartant tout « défaut d’information » pour Merck. Mais le 25 juin 2020, la Cour d’appel de Lyon reconnaît que Merck a commis « une faute » lors du changement de formule et le condamne à verser 1.000 euros à chacun des 3.329 plaignants toujours dans la procédure. Le laboratoire se pourvoit en cassation. Il sera rejeté le 16 mars dernier.

L’arrêt de la commercialisation de l’ancienne formule du Levothyrox (Euthyrox), initialement annoncé pour septembre 2020, est repoussé à fin 2022 au moins.

Octobre 2022, la mise en examen pour « tromperie aggravée »

La filiale française de Merck vient donc d’être mise en examen pour « tromperie aggravée » dans le volet pénal du dossier du changement de formule. Cette annonce a été saluée par Marie-Odile Bertella-Geffroy, avocate représentant quelque 3.000 patients du Levothyrox : « Cela fait plusieurs années que l’information judiciaire est ouverte et que l’on attendait cette mise en examen. On se disait que cela n’arriverait jamais. Mes clients n’y croyaient plus. Enfin cela bouge. »


Notre dossier sur « l'affaire du Levothyrox »

Le laboratoire indique de son côté vouloir « apporter toute précision nécessaire afin de faire établir qu’aucune infraction pénale, de quelque nature que ce soit, n’a été commise. » Merck ajoute aussi dans son communiqué que cette mise en examen « ne concerne en aucun cas la qualité de la nouvelle formule du Levothyrox ».

A noter qu’en France, quelque 2,5 millions de patients utilisent quotidiennement la nouvelle formule du Levothyrox, selon Merck, et moins de 100.000 patients sont aujourd’hui traités avec l’ancienne formule importée en France depuis fin 2017 sous le nom d’Euthyrox.