TRANSPORTS EN COMMUNUn rapport déplore le laxisme de la RTM face à « la fraude endémique »

Marseille : Un rapport de la chambre régionale des comptes déplore le laxisme de la RTM face à « la fraude endémique »

TRANSPORTS EN COMMUNDans un rapport, la chambre régionale des comptes souligne la fraude particulièrement élevée dans les transports en commun marseillais, et la faible action de la RTM pour lutter contre ce phénomène
Illustration sur le métro et les transports en commun
Illustration sur le métro et les transports en commun - P.MAGNIEN / 20 MINUTES / P.MAGNIEN / 20 MINUTES
Mathilde Ceilles

Mathilde Ceilles

L'essentiel

  • Un rapport de la chambre régionale des comptes confirme la fraude particulièrement importante sur le réseau de transports en commun de Marseille.
  • Une fraude contre laquelle la RTM lutte insuffisamment selon les magistrats. Les contrôles ont en effet diminué, et les amendes sont généralement très peu payées.

Des passagers qui enjambent les portiques, d’autres qui entrent dans le tramway sans ticket… La scène à Marseille semble habituelle pour quiconque emprunte régulièrement le réseau de transports en commun de la RTM. Un sentiment qu’un rapport de la chambre régionale des comptes confirme, et étaye d’une douloureuse réalité : l’existence d’une « fraude endémique » dans les bus, tramway et métro de la deuxième ville de France. Dans ce document, présenté ce jeudi lors du conseil métropolitain, les magistrats de la chambre déplorent « un taux de fraude moyen historique […] très élevé et en augmentation », dépassant les 23 %. Une moyenne qui « cache d’importantes disparités », selon le rapport. « Le bus est ainsi fraudé à presque 40 % et le taux de fraude dans certaines zones dépasse les 60 % », regrette la chambre régionale des comptes.



« Les comparaisons avec d’autres réseaux de transport urbain sont difficiles à établir dans la mesure où les données ne sont pas systématiquement publiées et, lorsqu’elles le sont, ne recouvrent pas toujours un périmètre identique, reconnaît la chambre régionale des comptes. Plusieurs taux de fraude ont toutefois pu être mis en regard des taux marseillais. En 2018, alors que le taux de fraude global était de 27,5 % pour la RTM, il était de 10,6 % sur le réseau de transport de Bordeaux métropole, soit près de trois fois moindre. Si l’on considère uniquement le taux de fraude concernant les bus, les écarts sont encore plus importants. »

Le nombre de contrôles a diminué

Or, dans ce même rapport, la chambre régionale des comptes s’étonne du certain laxisme de la RTM pour lutter contre cette fraude massive. « Face à cette situation, la régie a paradoxalement largement diminué le nombre de contrôles de tickets des voyageurs, constatent les magistrats. Globalement, le nombre de contrôles par agent est peu élevé. Si les contrôles dits dissuasifs ont été accrus selon la régie, ils sont purement déclaratifs et, force est de constater, peu efficaces au regard du taux de fraude. Aucun dispositif a été mis en œuvre dans la durée dans les zones les plus touchées par la fraude et les équipements antifraude (portillons automatiques du métro par exemple) sont encore insuffisants. »

Et quand les amendes sont dressées, seule une poignée est effectivement réglée par les contrevenants. « Entre 2016 et 2019 (dernière année avant la crise sanitaire Covid), le montant annuel des procès-verbaux se situait entre 4 et 8 millions d’euros, dont seuls 0,2 à 0,3 million d’euros étaient recouvrés, soit un taux de recouvrement inférieur à 5 % », tacle le rapport. Selon la chambre régionale des comptes, c’est « environ dix fois inférieur à ceux observés dans d’autres réseaux ». Les amendes sont par ailleurs dressées avec peu de soin. La chambre régionale des comptes relève, pêle-mêle « des indications erronées données par les contrevenants mais aussi de nombreuses erreurs de dates de naissances, adresses et numéros de téléphone durant l’établissement du PV. »

Près de 100 millions d’euros perdus en quatre ans

Et de constater : « jusqu’en 2020, les procès-verbaux étaient établis sur support papier à bord du véhicule puis ressaisis dans l’outil informatique par une équipe de six personnes. Aux erreurs initiales pouvaient donc s’ajouter les erreurs de ressaisie. Les plis non distribués sont très nombreux, représentant un taux de 61 % contre 36 % sur l’ensemble du poste comptable. »

Un laxisme qui a un coût colossal, dans un réseau qui reste perfectible, avec seulement deux lignes de métro pour l’ensemble de la deuxième ville de France, et des quartiers dépourvus de transports en commun réguliers, notamment dans le nord de la ville. « Dès lors que 1 % de fraude dure correspond à une perte d’environ 1 million d’euros de recettes, 23,5 millions d’euros ont été perdus sur la seule année 2020, soit le coût d’achat de 80 bus ou de six rames de tramway, calculent les magistrats. Sur les quatre dernières années pour lesquelles une enquête fraude a été réalisée, la RTM a perdu environ 90 millions euros du fait de la fraude, soit l’équivalent de plus de 300 bus c’est-à-dire plus du tiers de son parc. »