ARCHEO’SCIENCESViandard ou vegan, les Néandertaliens des Pyrénées ? Une dent le révèle

L’Homme de Néandertal des Pyrénées était-il vegan ou viandard ? Grâce à une dent, on sait

ARCHEO’SCIENCESUne nouvelle technique permet désormais de connaître le régime alimentaire de ceux qui nous ont précédés, il y a plus de 50.000 ans
Un humain et un crâne de Néandertalien. (Illustration).
Un humain et un crâne de Néandertalien. (Illustration). - MARY EVANS/SIPA / SIPA
Béatrice Colin

Béatrice Colin

L'essentiel

  • Si depuis quelques années les paléontologues ont déterminé que l’Homme de Néandertal est carnivore, un doute subsistait sur un groupe ayant vécu dans les Pyrénées il y a plus de 50.000 ans.
  • Une nouvelle technique a été utilisée pour analyser les rapports isotopiques du zinc contenus dans l’émail dentaire de nos vieux cousins et de déterminer leur régime alimentaire.
  • Les Néandertaliens de Gabasa seraient donc bien aussi des carnivores, tout en consommant aussi des végétaux.

Plutôt vegan ou viandard l’Homme de Néandertal ? Jusqu’à présent, les paléontologues pouvaient déterminer le régime alimentaire de nos lointains « cousins » grâce aux fouilles archéologiques des sites où ils avaient vécu, il y a des milliers d’années. Dans la grotte de Gabasa, sur le versant espagnol des Pyrénées, ils avaient ainsi découvert des os brisés d’animaux. Mais rien ne pouvait confirmer qu’ils avaient fait l’objet d’un bon festin.

Certaines études réalisées sur le tartre de dents retrouvées sur place laissaient plutôt penser qu’ils étaient herbivores. Pour savoir si ces Néandertaliens ibériques étaient vraiment adeptes de poêlées de cèpes plutôt que de steaks de rhinocéros laineux, comme leurs contemporains belges et irakiens, la solution classique aurait été d’analyser les isotopes de l’azote contenus dans le collagène des os ou des dents.

Mais voilà, cette technique éprouvée fonctionne rarement sur des échantillons vieux de plus de 50.000 ans et conservés dans un environnement non tempéré. Ce qui est le cas à Gabasa.


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Pour lever les doutes, une équipe a décidé d’utiliser une nouvelle méthode : l’analyse des isotopes du zinc contenus dans l’émail dentaire d’une des quatre molaires prélevées sur place. Le zinc, résistant aux dégradations dans le temps. Et ses résultats viennent de paraître dans les Annales de l’Académie des sciences américaine (PNAS).

Analyse sur un extrait de molaire

« On a échantillonné un petit morceau de l’émail que nous avons plongé dans l’acide. On a alors réussi à capturer le zinc et on l’a analysé. Plus les proportions des isotopes du zinc sont faibles, plus ils sont susceptibles d’appartenir à un carnivore », détaille Klervia Jaouen, chercheuse CNRS en géochimie isotopique au laboratoire de Géosciences Environnement de Toulouse.



Et les résultats sont assez clairs : les Néandertaliens pyrénéens consommaient eux aussi de la viande. A titre comparatif, des analyses similaires ont été menées sur des ossements d’animaux de la même période, que ce soit le lynx ou le loup, carnivores, ou le lapin et le chamois, des herbivores.


Une molaire de Néandertalien retrouvé sur le site de Gabasa.
Une molaire de Néandertalien retrouvé sur le site de Gabasa.  - Lourdes Montes

Le Néandertalien à qui appartenait la molaire analysée ne se limitait pas à la viande de ses proies. Il consommait aussi la moelle osseuse, sans pour autant en consommer les os. Un bec fin en résumé. Grâce à sa dent, qui se forme avant l’âge de trois ans, on sait que dès son plus jeune âge, une fois sevré au sein de sa mère, il s’est régalé de morceaux de bisons ou de chevaux sauvages. Et les analyses montrent aussi qu’il n’était pas un grand nomade, il est probablement mort là où il avait vécu étant enfant.

Une nouvelle technique au service de la paléontologie qui avait déjà permis cet été de montrer, grâce à une dent, que l’Otodus mégalodon avait disparu au profit du grand requin blanc, pourtant plus « petit » que lui. Ce mastodonte des mers régnait dans les océans il y a cinq millions d’années et s’était retrouvé au même niveau dans la chaîne alimentaire que le grand requin blanc, en concurrence directe. Et qui pourrait intéresser nombre de chercheurs à l’avenir présume Klervia Jaouen. Surtout quand d’autres méthodes montrent leurs limites à cause de l’érosion des vestiges dues aux conditions de conservation.