recap'Qu’est-ce que la « bombe sale », cette « arme de perturbation massive » ?

Guerre en Ukraine : Tout comprendre à la « bombe sale », nouvelle obsession de Moscou

recap'La Russie a affirmé ce lundi que l’Ukraine était entrée « dans la phase finale » de la fabrication de sa « bombe sale »
La « bombe sale » que Moscou accuse l’Ukraine de vouloir faire exploser est une bombe entourée de matériaux radioactifs destinés à être disséminés sous forme de poussière au moment de l’explosion
La « bombe sale » que Moscou accuse l’Ukraine de vouloir faire exploser est une bombe entourée de matériaux radioactifs destinés à être disséminés sous forme de poussière au moment de l’explosion - SEBASTIEN BOZON / AFP / AFP
Marion Pignot

M.P. avec AFP

L'essentiel

  • Moscou a accusé dimanche, lors d’entretiens téléphoniques avec des pays de l’Otan, l’Ukraine de se préparer à utiliser une « bombe sale ».
  • Les Ukrainiens et les Occidentaux y voient la menace des préparatifs d’une attaque menée sous un faux drapeau, suspectant la Russie d’être prête à faire exploser elle-même une « bombe sale » pour justifier une escalade militaire, par exemple en employant une arme nucléaire tactique en représailles.
  • « 20 Minutes » revient sur cette nouvelle escalade des tensions entre Moscou et Kiev et sur ces soupçons de fabrication de « bombe sale », nouvel argument massue du Kremlin.

La Russie a affirmé lundi que l’Ukraine était entrée « dans la phase finale » de la fabrication de sa « bombe sale », une affirmation que Moscou brandit depuis dimanche et qui est fermement rejetée par Kiev. Les allégations de Moscou à l’encontre de Kiev selon lesquelles l’Ukraine souhaiterait recourir à une « bombe sale » sont « fausses », ont de leur côté fustigé Paris, Londres et Washington, dans une déclaration conjointe communiquée ce lundi. 20 Minutes revient sur cette nouvelle escalade des tensions entre Moscou et Kiev et les dessous de cette « bombe sale », qui est « une "arme de perturbation massive" qui vise principalement à contaminer et faire peur », selon la Commission de régulation nucléaire américaine (US NRC)

A quand remontent ces accusations de « bombe sale » ?

Le ministre russe de la Défense, Sergueï Choïgou, s’est entretenu dimanche au téléphone avec ses homologues américain, français, britannique et turc du conflit en Ukraine. Au cours de ces échanges d’une intensité inédite, Sergueï Choïgou a fait part à la plupart de ses interlocuteurs de « ses préoccupations liées à d’éventuelles provocations de la part de l’Ukraine avec recours à une "bombe sale" », selon son ministère.


Le ministre russe de la défense, Sergueï Choïgou (à gauche) et Vladimir Poutine en décembre 2021.
Le ministre russe de la défense, Sergueï Choïgou (à gauche) et Vladimir Poutine en décembre 2021. - Mikhail METZEL / SPUTNIK / AFP

« Les substances radioactives provenant des installations de stockage de combustible nucléaire utilisées dans la centrale nucléaire [ukrainienne] de Tchernobyl peuvent être utilisées » pour fabriquer une bombe sale, a pour sa part fait valoir lundi dans un communiqué le général russe Igor Kirillov, chargé au sein de l’armée russe des substances radioactives, des produits chimiques et biologiques.

Ce lundi, Moscou a réitéré ses accusations, ajoutant que l’Ukraine était entrée « dans la phase finale » de la fabrication de sa « bombe sale ». « Selon les informations dont nous disposons, deux organisations ukrainiennes ont des instructions spécifiques pour fabriquer la soi-disant "bombe sale". Leur travail est entré dans la phase finale », a déclaré Igor Kirillov. Selon lui, « le but de cette provocation est d’accuser la Russie d’utiliser des armes de destruction massive en Ukraine et de lancer ainsi une puissante campagne antirusse dans le monde », estimant que Kiev voulait notamment « intimider la population locale et augmenter le flux de réfugiés à travers l’Europe ».

Qu’est-ce que la « bombe sale » ?

La « bombe sale » que Moscou accuse l’Ukraine de vouloir faire exploser sur son propre sol n’est pas une bombe nucléaire mais une bombe conventionnelle entourée de matériaux radioactifs destinés à être disséminés sous forme de poussière au moment de l’explosion. Le terme de « bombe sale », aussi appelée « dispositif de dispersion radiologique » (DDR), désigne plus généralement tout engin détonant disséminant un ou plusieurs produits chimiquement ou biologiquement toxiques (NRBC - nucléaire, radiologique, biologique ou chimique).

Ce type de bombe n’est pas considéré comme une arme atomique, dont l’explosion résulte de la fission (bombe A) ou de la fusion (bombe H) nucléaires et provoque d’immenses destructions dans un vaste rayon. Les matériaux radioactifs nécessaires à la fabrication d’un tel engin explosif sont utilisés dans les hôpitaux, les établissements de recherche, les sites industriels ou militaires. En mars 2016, la cellule terroriste responsable des attentats à la bombe de Bruxelles avait prévu la fabrication d’une « bombe sale » radioactive après une surveillance vidéo par deux des kamikazes d’un « expert nucléaire » belge.

Quel est « l’objectif » de la « bombe sale » ?

La fabrication d’une bombe atomique requiert de recourir à des technologies complexes d’enrichissement d’uranium. Beaucoup moins complexe à confectionner, la « bombe sale » emploie, quant à elle un explosif conventionnel, et a pour but principal de contaminer une zone géographique et les personnes qui s’y trouvent à la fois par des radiations directes, et par l’ingestion ou l’inhalation de matériaux radioactifs.


« Une bombe sale n’est pas une "arme de destruction massive" mais une "arme de perturbation massive" qui vise principalement à contaminer et faire peur », résume la Commission de régulation nucléaire américaine (US NRC). Ainsi, le principal danger d’une « bombe sale » provient de l’explosion et non de la radiation. Seules les personnes très proches du site de déflagration seraient exposées à des rayonnements suffisants pour causer une maladie grave immédiate. Cependant, la poussière et la fumée radioactives peuvent se propager plus loin et présenter un danger pour la santé en cas d’inhalation de la poussière ou d’ingestion d’aliments ou d’eau contaminés.

Que dit Kiev ?

« Les affabulations russes à propos de l’Ukraine qui se préparerait à utiliser une "bombe sale" sont aussi absurdes qu’elles sont dangereuses », a d’emblée réagi dimanche le ministre ukrainien des Affaires étrangères Dmytro Kouleba sur les réseaux sociaux. Dmytro Kouleba a échangé avec le chef de l’Agence internationale de l’énergie atomique, Rafael Grossi, à ce sujet et a assuré avoir « officiellement invité l’AIEA à envoyer d’urgence des experts dans des installations pacifiques en Ukraine », ces structures où la Russie « prétend trompeusement » que l’Ukraine y développe une « bombe sale ».

« Si la Russie appelle et dit que l’Ukraine serait en train de préparer quelque chose, cela signifie une seule chose : la Russie a déjà préparé tout cela. Je crois que désormais le monde doit réagir aussi durement que possible », a pour sa part fustigé le président ukrainien Volodymyr Zelensky. Si la Russie a préparé « une nouvelle étape dans l’escalade, elle doit voir maintenant, de façon préventive et avant une de ses nouvelles "saletés", que le monde ne l’acceptera pas », a-t-il ajouté.

Quelles sont les réactions à l’international ?

Dimanche, les Etats-Unis ont rejeté « les allégations clairement fausses du ministre Choïgou », par la voix de la Maison-Blanche, cette dernière prévenant que « le monde ne serait pas dupe en cas de tentative d’utiliser cette allégation comme prétexte à une escalade ». De son côté, le ministère français des Armées a confirmé dans un communiqué que Sergueï Choïgou avait dit craindre une « frappe de bombe sale par les Ukrainiens sur leur territoire, pour en faire porter la responsabilité à la Russie ». Le ministre français Sébastien Lecornu a, lui, rappelé que « la France [refusait] toute forme d’escalade, singulièrement nucléaire ».


NOtre dossier sur la guerre en Ukraine

« Personne ne serait dupe » si Moscou faisait escalader le conflit en Ukraine en prenant prétexte de l’emploi par Kiev d’une « bombe sale » évoqué par le gouvernement russe, ont une fois de plus affirmé ce lundi Paris, Londres et Washington. « Nous restons déterminés à poursuivre notre soutien aux efforts de l’Ukraine pour défendre son territoire aussi longtemps qu’il le faudra », ont ajouté les trois capitales dans leur déclaration conjointe.


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Les Ukrainiens et les Occidentaux voient dans ces affirmations de Moscou la menace des préparatifs d’une attaque menée sous un faux drapeau, suspectant la Russie d’être prête à faire exploser elle-même une « bombe sale » pour justifier une escalade militaire, par exemple en employant une arme nucléaire tactique en représailles.

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