TACTIQUEAvec leur niche, le RN poursuit sa stratégie « des coups » à l’Assemblée

Rassemblement national : « Ce sont des trolls »… A l’Assemblée, le RN poursuit sa stratégie « des coups »

TACTIQUELe parti de Marine Le Pen tentera de nouveau de déstabiliser ses adversaires politiques lors de sa niche parlementaire ce jeudi dans l’hémicycle
Sébastien Chenu et Marine Le Pen à l'Assemblée.
Sébastien Chenu et Marine Le Pen à l'Assemblée. - Jacques Witt/SIPA / SIPA
Thibaut Le Gal

Thibaut Le Gal

L'essentiel

  • Le Rassemblement national présentera sa première niche parlementaire dans l’hémicycle jeudi prochain.
  • Pendant une journée, les députés RN auront l’occasion de présenter leurs propres propositions de loi.
  • L’occasion pour le groupe de Marine Le Pen de défendre des éléments de leur programme, mais aussi de tenter de mettre en difficulté leurs adversaires.

C’est une nouvelle « première » pour Marine Le Pen et ses collègues au palais Bourbon. Le Rassemblement national présente ce jeudi sa niche dans l’hémicycle. Ce dispositif permet, une fois par mois, à un groupe parlementaire de défendre ses propres propositions de loi au reste de la représentation nationale. Depuis plusieurs semaines, le parti cogite donc pour aborder au mieux ce 12 janvier et en tirer un maximum de bénéfices politiques. Les députés RN souhaitent profiter de cette vitrine à l’Assemblée pour faire entendre leurs voix, mais, et peut-être surtout, pour tenter de mettre en difficulté leurs adversaires.

« On a le droit d’être habiles »

« On a réfléchi sur le choix des thématiques. Car notre objectif, c’est de faire passer un texte, même si l’on sait que c’est très compliqué lors des niches parlementaires », assure Sébastien Chenu, député du Nord. « On a opté pour des sujets qui peuvent susciter l’adhésion des autres groupes pour voir s’ils sont sincères ou s’ils restent dans la tactique politicienne », ajoute le vice-président de l’Assemblée nationale. Pour sa niche, le RN a ainsi mis de côté ses traditionnels fétiches, comme la question migratoire ou l’islamisme. Rien non plus sur la préférence nationale. Le parti de Jordan Bardella a plutôt opté pour des thématiques qu’il juge plus « consensuelles ».

Lors de la conférence de presse de présentation, début décembre, Marine Le Pen a lancé la bataille en tentant un premier coup tactique. « J’ai choisi d’inscrire deux textes dont les auteurs ne sont pas membres de notre groupe, en cohérence avec la logique d’union nationale que je défends », a lancé la patronne des élus RN, évoquant le texte de Caroline Fiat, visant à réintégrer les soignants non-vaccinés, que la députée LFI n’avait pas eu le temps de défendre jusqu’à son terme, et celui d’une élue UDI proposant une aide d’urgence pour les victimes de violences conjugale. « Les textes étaient là, c’était logique de les reprendre », assume Jean-Philippe Tanguy, député RN de la Somme. L’objectif est clair : contraindre leurs adversaires à leur offrir une victoire parlementaire. « Il n’y a pas de piège, puisque ce sont des propositions que nous défendons, mais on a le droit d’être habiles », sourit Sébastien Chenu.

« Ce sont des trolls »

La première récolte de l’offensive s’est avérée plutôt maigre. Après avoir accepté « l’offrande », Caroline Fiat a finalement fait marche arrière en retirant son texte, après quelques heures de remous au sein de LFI. Sur les violences conjugales, la majorité n’a pas non plus souhaité donner le point au RN sur cette thématique, déclarée « grande cause du quinquennat ». La proposition de loi a donc finalement été inscrite en tête de l’ordre du jour de la « semaine de l’Assemblée » du 16 janvier, avec l’accord du RN. « Sans nous, le texte aurait été mis aux oubliettes, on l’a déterré, donc cela reste une victoire », revendique Jean-Philippe Tanguy. « Sur les soignants, les insoumis ont montré leur sectarisme, ils devront s’expliquer auprès de leurs électeurs », ajoute-t-il.



Ce jeudi, les députés RN défendront en premier lieu une proposition visant « à inciter les entreprises à augmenter les salaires nets de 10 % », via un gel des cotisations patronales, mais aussi la suppression des « zones à faibles émissions » (ZFE). Mais les élus RN n’ont pas abandonné l’idée de piéger les autres groupes, puisqu’ils présenteront aussi un texte pour rendre obligatoire le port d’un uniforme dans les écoles et collèges publics, défendu par la droite, ainsi que l’instauration de la proportionnelle aux législatives. Une mesure souhaitée par… Emmanuel Macron pendant la précédente campagne, et fortement réclamée par François Bayrou et le MoDem. « Ce sont des trolls, tout ça c’est de l’esbroufe, sans travail sérieux, ni colonne vertébrale. Ils tentent de nous piéger mais on ne se laissera pas faire », balaye Erwan Balanant, député MoDem du Finistère.

Déjà rejetées en commission en décembre, les propositions de loi du RN n’ont quasiment aucune chance d’être votées jeudi prochain. « Même si on leur proposait la poudre de perlimpinpin de Macron, ils seraient contre », soupire Jean-Philippe Tanguy. Malgré les tentatives de déstabilisation, cette niche semble plutôt montrer que le RN n’est toujours pas un parti comme les autres pour le reste de l’hémicycle.