Poésie spatialePourquoi la comète qui nous rend visite ce jeudi est si « émouvante »

Tout savoir sur « l'émouvante » visite de cette comète, après 50.000 ans d'absence

Poésie spatialeElle sera au plus proche de la Terre le 1er février prochain
La comète « C/2022 E3 (ZTF) » a été découverte en mars 2022, grâce à une caméra de l'Observatoire de Palomar en Californie. (PHOTO D'ILLUSTRATION)
La comète « C/2022 E3 (ZTF) » a été découverte en mars 2022, grâce à une caméra de l'Observatoire de Palomar en Californie. (PHOTO D'ILLUSTRATION) - Canva / Canva
Diane Regny

Diane Regny

L'essentiel

  • «C/2022 E3 (ZTF) » est une comète venue du fin fond du système solaire et dont la dernière visite près de la Terre remonte à environ 50.000 ans.
  • L’objet céleste a été découvert en mars 2022, grâce au relevé Zwicky Transient Facility qui exploite une caméra installée à l’Observatoire de Palomar, en Californie.
  • 20 Minutes se penche sur cette comète d’un kilomètre de diamètre qui pourrait être observée à l’œil nu dans notre ciel nocturne, grâce à l’expertise de la maîtresse de conférences à Sorbonne université et chercheuse à l’Observatoire de Paris, Léa Griton.

C’est un astre de glace et de poussière qui porte le doux nom de « C/2022 E3 (ZTF) ». Cette comète, venue des confins du système solaire, n’avait pas pointé le bout de sa queue près du Soleil depuis environ 50.000 ans. Avec son kilomètre de diamètre - soit la moitié de la principauté de Monaco, cet objet céleste pourrait être visible à l’œil nu fin janvier. Elle atteindra son périhélie, c’est-à-dire son point le plus proche du Soleil, ce jeudi, selon les calculs des astronomes.

Elle sera au plus proche de la Terre le 1er février prochain, à un peu moins de 42 millions de kilomètres. Mais qu’est-ce qui est si spécial chez cette comète ? Comment l’observer au mieux ces prochaines semaines ? 20 Minutes se penche sur cet astre qui va décorer notre ciel nocturne grâce à l’éclairage de Léa Griton, maîtresse de conférences à Sorbonne université et chercheuse à l’Observatoire de Paris.

En quoi cette comète est-elle spéciale ?

« Nous n’avons pas l’occasion d’observer une comète à l’œil nu tous les jours », note d’emblée Léa Griton qui ajoute que cet objet céleste est « toujours très agréable à regarder, même pour les astronomes amateurs ». Avec leur traîne, les comètes fascinent l’humanité depuis longtemps. Leur nom vient du grec ancien « astre chevelu » et elles sont surnommées « astres-balais » au Japon. La spécificité de « C/2022 E3 (ZTF) », c’est qu’elle vient de très loin. « Dans le système solaire, les objets sont tous soumis à l’énorme attraction du Soleil. L’orbite des planètes est presque ronde mais les comètes ont une ellipse très écrasée », décrypte la chercheuse à l’Observatoire de Paris. Au plus loin de son ovale, la comète est donc aux confins du système solaire.

Or, « souvent les comètes nous apportent des informations sur l’endroit d’où elles viennent dans le système solaire », souligne Léa Griton. Les astronomes observent ces comètes avec attention afin d’en apprendre plus sur leur composition et sur l’univers. Mais le projet de l’Agence spatiale européenne prévu pour 2029 « Comet Interceptor » (Intercepteur de comète) devrait permettre d’en apprendre encore plus. « On va poster une petite sonde spatiale dans l’un des points d’équilibre autour de la Terre, c’est-à-dire là où les objets peuvent rester en place - et intercepter une comète qui viendra de l’autre bout du système solaire pour la première fois », explique l’astronome. Les chercheurs veulent attraper une « comète primitive », qui n’est encore jamais passée près du Soleil. Une perle rare donc, parce que même « C/2022 E3 (ZTF) » ne remplit pas ces critères. « L’idée c’est d’analyser une comète avant qu’elle ne soit passée au micro-ondes, près du Soleil, car cela peut modifier sa composition » , simplifie Léa Griton.


Que voit-on lorsqu'on observe une comète depuis la Terre ?

Planètes, voie lactée, étoiles filantes, etc. L’espace est magnifique. Et, avec leurs traînes de lumière, les comètes ne sont pas en reste. C’est spécifiquement ces queues de lumière que l’on peut observer depuis la Terre. « Les comètes ont deux queues : ce sont des gaz qui s’échappent pour l’une d’entre elles, tandis que l’autre est constituée de plasma », souligne Léa Griton. En s’approchant du soleil, les comètes subissent sa fournaise mais aussi ses vents solaires. Une partie de son corps se sublime, c’est-à-dire passe de l’état solide à l’état gazeux, provoquant ces belles traînées. « En se rapprochant du soleil, où la température est plus élevée et le vent solaire bien plus fort, les deux queues deviennent de plus en plus intenses, ce qui nous permet de les voir à l’œil nu », explique la maîtresse de conférences à la Sorbonne.

« C’est très émouvant d’observer une comète, c’est un objet céleste que l’on ne reverra jamais dans sa vie. On a la chance de voir un objet à des millions, voire des milliards de kilomètres de nous et qui continuera d’exister sans nous », souligne Léa Griton. Il faudra attendre 50.000 ans pour la prochaine visite de « C/2022 E3 (ZTF) ». Mais même les comètes plus extraverties sont rarement de passage plus d’une fois dans une vie humaine. La plus célèbre d’entre elles, Halley, ne revient que tous les 76 ans et sa prochaine visite est prévue pour 2061.

Comment bien profiter de cette occasion ?

Pour « C/2022 E3 (ZTF) », l’occasion débute ce soir. « En prenant en compte la distance entre la Terre et la comète, le moment idéal pour l’observer se situe autour du 3 février. Mais la Lune sera pleine le 5, donc il vaut mieux tenter sa chance autour du 24 janvier ou mi-février », explique Léa Griton. Car la luminosité de la Lune peut être très handicapante quand on essaie d’observer des objets célestes moins brillants qu’elle - soit l’immense majorité. Cette comète devrait toutefois être « relativement facile à repérer », notamment parce qu’elle sera repérable à partir de la constellation de la Grande ourse.


notre dossier sur les comètes

Afin de contempler au mieux cet objet céleste, mieux vaut s’éloigner des grandes villes où la pollution lumineuse efface tous les détails du ciel. « A l’Observatoire de Paris, on n’observe plus que le soleil parce que tout le reste est dégradé par la pollution lumineuse », témoigne Léa Griton. La spécialiste encourage les plus motivés à investir dans une paire de jumelles : « Pour ce genre d’objet il vaut mieux une très bonne paire de jumelles qu’un télescope "bon marché". Elles sont bien plus pratiques à réutiliser en journée, bien plus transportables et permettent de chercher facilement avec les mains l’objet alors qu’un télescope doit être positionné et installé. » Avec de bonnes jumelles, il est possible d’observer plusieurs satellites de Jupiter et même « presque observer les anneaux de Saturne », assure l’experte. Pour « C/2022 E3 (ZTF) », il faudra surtout prier pour que le temps soit clair car si le ciel est plein de nuages, la comète fera sa visite en catimini, bien à l’abri de nos regards…