RégionUn nouveau président pour la région Grand-Est, l’Alsace bientôt en dehors ?

Un nouveau président pour la région Grand-Est… et l’Alsace bientôt en dehors ?

RégionTout juste élu à la tête de la région, le Marnais Franck Leroy va devoir gérer les désirs alsaciens d’indépendance. « C’est le sens de l’histoire », d’après le président de la Communauté européenne d’Alsace
Le président de la Communauté européenne d'Alsace, Frédéric Bierry, a déjà rencontré le nouvel homme fort du Grand-Est, Franck Leroy. « On a eu un échange de fond », explique le premier.
Le président de la Communauté européenne d'Alsace, Frédéric Bierry, a déjà rencontré le nouvel homme fort du Grand-Est, Franck Leroy. « On a eu un échange de fond », explique le premier. - S. BOZON / AFP
Thibaut Gagnepain

Thibaut Gagnepain

L'essentiel

  • Nouveau président à la tête du Grand-Est et retour du débat sur la scission avec l’Alsace, ce n’est pas impossible étant donné que Franck Leroy est Marnais.
  • « Les gens commencent à y croire. Ils ne me demandent plus si ça va arriver mais quand », assure à 20 Minutes Frédéric Bierry, le président de la Collectivité européenne d’Alsace (CeA).
  • Si indépendance il doit y avoir, cela passera forcément « par le vote d’une loi » assure Bernard Schwengler, docteur en sciences politiques.

L’Alsace bientôt indépendante du Grand-Est ? Depuis la démission de Jean Rottner fin décembre, ce refrain aussi vieux que la création des nouvelles régions (2015) est redevenu tendance. D’autant plus depuis l’élection de son successeur la semaine dernière, le Marnais Franck Leroy. Soit le premier dirigeant à n’être issu ni du Haut-Rhin, ni du Bas-Rhin.

« Ce n’est pas lié à sa personne mais ça pourrait encore éloigner davantage les Alsaciens de cette grande région à laquelle ils ne se sont jamais vraiment identifiés », analyse le docteur en sciences politiques Bernard Schwengler. « Jusque-là, avec [Philippe] Richert puis Rottner, cela pouvait donner à leurs yeux une certaine légitimité au Grand-Est. Mais cela risque maintenant de changer. »



Frédéric Bierry l’espère. « Les gens commencent à y croire. Ils ne me demandent plus si ça va arriver mais quand », assure à 20 Minutes le président de la Collectivité européenne d’Alsace (CeA). Partisan revendiqué de la scission, il avait organisé l’hiver dernier une consultation citoyenne sur cette sortie. Résultat : 92 % des presque 170.000 votants s’y étaient montrés favorables. Sans que cela ne soit, pour l’instant, suivi d’effets.

L’ancien maire de Schirmeck a en tout cas pu répéter ces chiffres à Franck Leroy mercredi soir. Pour une première rencontre au cours duquel le sujet a bien évidemment été évoqué. « Je l’ai invité dans nos locaux et on a fait connaissance pour démarrer sur des bases saines. On a eu un échange de fond et j’ai vu un homme attentif à nos enjeux, même si ça ne se présage de rien », indique Frédéric Bierry en glissant au passage une petite attaque à Jean Rottner. « Avec lui, j’avais l’impression que la démarche alsacienne était traitée par le mépris. »

Plusieurs propositions de loi déposées

Le nouveau président du Grand-Est serait-il plus ouvert au démembrement de sa région ? Pas sûr au vu de ses premiers mots… « L’immense majorité des acteurs, même en Alsace, considère que les enjeux sont ailleurs et que le périmètre de notre région n’est plus un sujet » et que le réduire « serait une régression », avait-il ainsi déclaré vendredi après son élection.

« Il a montré les dents et si ces positions sont ressenties comme anti-Alsace, cela pourrait encore accélérer le processus. D’autant plus si les élus alsaciens membres des Républicains (LR) qui soutenaient jusque-là Rottner se rallient tous à la même cause », réagit le politologue, par ailleurs membre de l’Observatoire de la vie politique en Alsace (Ovipal). Bernard Schwengler précise si indépendance il doit y avoir, cela passera forcément « par le vote d’une loi ».

Plusieurs propositions ont déjà été déposées depuis l’été dernier, que ce soit par des députés LR, issus de la majorité présidentielle, et du Rassemblement National (RN). « Tout dépendra de leur cheminement. Elles ne seront même pas forcément débattues », souligne le spécialiste. Mais une autre échéance pourrait mettre tout le monde d’accord : l’étude d’une grande loi de décentralisation en 2024, volonté annoncée par Emmanuel Macron.

« Il y a en haut lieu une volonté de simplification institutionnelle. Ça simplifierait clairement le millefeuille, ça rapprocherait les habitants des institutions car qui ne savent plus qui fait quoi aujourd’hui… Avec la CeA, on a déjà créé toutes ces conditions », insiste Frédéric Bierry avant de conclure. « L’Alsace hors du Grand-Est, c’est le sens de l’histoire. »