INTERVIEW« Moi, j’ai jamais fait de chicayas », accuse Martine Vassal

Macron à Marseille : « J’ai jamais fait de chicayas, adressez-vous au Printemps marseillais », accuse Martine Vassal

INTERVIEWA quelques jours de la visite d’Emmanuel Macron à Marseille, la présidente de la métropole, Martine Vassal, revient sur ses attentes, notamment sur la création d’un RER, tout en revendiquant son indépendance vis-à-vis du président de la République
La présidente de la métropole d'Aix-Marseille, Martine Vassal, en juin 2023.
La présidente de la métropole d'Aix-Marseille, Martine Vassal, en juin 2023. - Alexandre Vella / 20 Minutes
Propos recueillis par Mathilde Ceilles et Alexandre Vella

Propos recueillis par Mathilde Ceilles et Alexandre Vella

L'essentiel

  • Une semaine avant la venue d’Emmanuel Macron à Marseille, la présidente de la métropole d’Aix-Marseille, Martine Vassal, attend du président de la République des précisions sur le RER, dont elle présentera les contours, et sur l’aide financière pour l’extension du tramway, qui coûtera plus cher que prévu.
  • L’ancienne LR revendique par ailleurs son positionnement politique, à la fois en soutien au président de la République et à distance du parti du chef de l’Etat.
  • Alors qu’Emmanuel Macron avait réclamé lors de sa précédente visite la fin des « chicayas locaux », les désaccords entre le maire de Marseille et la présidente de la métropole semblent profonds. Martine Vassal, qui n’exclut pas se présenter aux municipales, accuse Benoît Payan d’aller « droit dans le mur ».

En ce mercredi matin, pour accorder un long entretien à 20 Minutes Marseille, la présidente de la métropole ne donne pas rendez-vous dans son bureau, niché dans un gratte-ciel à l’entrée de la cité phocéenne, mais dans une brasserie du quartier des Réformés, dans le centre-ville. Son nom ? Les Danaïdes. Pour autant, son équipe l’assure : il ne faut pas y voir un message, à une semaine d’une nouvelle visite d’Emmanuel Macron à Marseille pour lancer l’acte II du plan Marseille en grand, qui devrait notamment dessiner les contours d’un futur RER métropolitain. Une visite qui va prendre une tournure éminemment politique sur fonds de tensions actuelles entre l’équipe municipale et Martine Vassal, elle qui n’exclut pas de ravir le fauteuil d’édile à Benoît Payan en 2026.



Un an et demi après le lancement du plan Marseille en grand, pourquoi l’arrivée du tramway a d’ores et déjà pris du retard par endroits, comme l’a révélé Marsactu ?

Si vous parlez de la seconde phase de l’extension du tramway à la phase Nord vers la Castellane, le problème, c’est que sur ce tracé, que la ville a voulu modifier, il manque de la hauteur et de la largeur sous deux ponts de la SNCF pour pouvoir faire passer le tram. J’ai eu les résultats de la SNCF. Ils nous disent que c’est faisable. Ils nous annoncent un montant approximatif de 50 millions supplémentaires et 18 mois de travaux en plus, sans compter le surcoût de la longueur. Le tracé que veut la ville est plus long, donc il est plus cher ! D’autant plus que les prix ont augmenté avec l’inflation.

Qui va payer ces 50 millions ?

C’est la bonne question, et je n’ai pas la réponse. La SNCF m’a dit : « C’est clair, nous, on ne va pas payer ça, car nous, on n’en a pas besoin. » Je vais en parler au président de la République la semaine prochaine, en lui expliquant qu’il y a un coût supplémentaire sur la ligne Nord. Je ne pense pas pour autant qu’il nous annonce les 50 millions, parce que la visite est demain ! Après, je ne vais pas pleurer s’il me donne plus. Si on a besoin de sous en plus, il faut bien le prendre quelque part. La métropole n’a pas une santé financière qui permet de rajouter je ne sais combien de millions. Mais peut-être que la ville de Marseille va aider financièrement puisqu’elle a souhaité un tracé différent ! On verra. Tous les espoirs sont permis. Lors de la prochaine réunion du GIP [qui gère les projets de transports dans le cadre du plan Marseille en grand] en septembre, on donnera les montants exacts.

Avez-vous d’autres attentes concernant cette visite d’Emmanuel Macron ?

J’attends de savoir comment le président de la République voit le RER métropolitain, notamment sur la partie financière de l’Etat. C’est sa volonté et il a raison. Nous, on a une proposition à faire au niveau du maillage, et il l’aura la semaine prochaine. Il y a une étude qui sort normalement fin juillet sur le maillage du réseau ferré, que la métropole a cofinancé avec la région. J’aurai une carte à donner à Emmanuel Macron la semaine prochaine avec les lignes SNCF et les gares. Quand on regarde sur un papier, on se dit : « Bon sang de bonsoir. C’est évident ! » On a 11 gares sur Marseille. Ce maillage, il existe ! Nous, on est d’accord sur le principe du RER métropolitain. C’est déjà ça. Mais on a toujours besoin d’argent.

Et ce projet se heurte à la nécessité de transformer la gare Saint Charles…

Ce que je souhaite, c’est qu’il mette tout son poids pour pouvoir accélérer les travaux de la gare Saint-Charles, qui sont le nœud de l’ensemble du dispositif. Si le président de la République tape un peu du poing sur la table avec les opérateurs pour aller plus vite, ça peut nous aider ! 2035, la gare Saint-Charles, c’est loin !

Lors de l’annonce du plan Marseille en grand, le président de la République avait réclamé la fin des « chicayas locaux »…

(Elle coupe) Moi, j’ai jamais fait de chicayas ! J’ai passé l’âge.

On a l’impression que cette fin n’est pas trop d’actualité en ce moment

Adressez-vous au Printemps marseillais. Il faut comprendre une chose. Moi je n’ai pas de problème de personnes, avec personne. Moi, je me suis engagée dans la vie politique pour une chose. C’est pour transformer mon territoire. Donc, après, derrière, les problèmes de personnes, ça ne me regarde pas. Je ne suis pas là-dedans. Par contre, le Printemps marseillais, effectivement, n’a pas la même vision que celle que nous avons.

Ils souhaitent mettre la ville dans cet état. Qu’ils le fassent ! Mais j’ai quand même le droit de dire que ça ne me convient pas. Moi, je suis désolée, je suis pour plus de sécurité, plus de logements de qualité. Si on continue comme ça, on va droit dans le mur !

Après le plan Marseille en grand, vous avez soutenu Emmanuel Macron à la présidentielle, sans rejoindre son parti. Où vous situez-vous politiquement aujourd’hui ?

Je suis à droite et je mourrai à droite. Aujourd’hui, je suis pour mon territoire. Bien sûr, Emmanuel Macron nous a bien aidés, et c’est pour ça que je l’ai soutenu.

C’est donnant donnant ?

C’est pas une question de donnant donnant. C’est le seul président de la République qui s’est penché sur notre berceau. Mais il ne m’a jamais demandé de le rejoindre. Aujourd’hui, je suis plus LR. Non, je n’ai pas été exclue. La preuve, c’est que je reçois toujours les documents LR. Mais il ne faut jamais confondre le national et le local. Quand je me suis engagée en politique en 2001, je venais de la société civile. Je me suis encartée pour la première fois en 2002. Pourquoi ? Parce que, enfin, la droite est devenue intelligente car elle a rassemblé tous les courants, du plus libéral au plus dur. Après, c’est plus ce que j’ai retrouvé dans les LR.

Renaud Muselier dit avoir rejoint Renaissance pour les mêmes raisons…

Aujourd’hui, j’ai fait un choix de soutenir le président de la République et non Valérie Pécresse, pour laquelle j’avais pourtant beaucoup d’espoir au départ. Mais le président de la République me paraissait à l’époque la personne la plus apte compte tenu de la situation. On sortait du Covid. On avait Poutine aux portes de l’Europe. A un moment donné, c’était un peu chaud. Aujourd’hui, je suis sur mon territoire, pas sur une élection présidentielle. Après, on aura le temps. 2027, c’est loin.

2026, c’est un peu plus proche…

C’est un peu plus proche. Mais il ne faut pas mettre la charrue avant les bœufs. D’abord, on va rassembler. Ensuite, on verra.

Vous ne dites pas non à une candidature aux municipales ? On a vu récemment que vous avez réuni autour de vous et Renaud Muselier une grande partie de la droite et du centre marseillais…

Je dis pas oui. Je dis pas non. Je dis : « D’abord on rassemble, après on verra. »

Avec quel parti ?

Ça, ça vous plaît, les partis. On a tous nos militants. J’ai des militants qui me suivent depuis des années. Ce n’est pas ça, le problème. D’abord, on se pose. Si c’est pour faire comme en 2020 et se disputer en disant : « Moi, je veux être le chef… », « Moi, je veux être le chef… »… On s’en sortira pas. L’idée, c’est de se rassembler autour d’un projet, d’une vision. Avant de se disputer pour les postes, regardons le projet. Renaud et moi, on a une vision commune sur beaucoup de points. Je ne suis pas d’accord avec ce que propose Benoît Payan, mais je suis d’accord avec ce que Renaud propose. Et cette question du rassemblement, je l’ai dit au président de la République. A toutes les élections, si on se rassemble pas, avec la droite, le centre, tous ceux qui pensent la même chose, on perd. Quand vous êtes sur la même longueur d’onde, il faut se rassembler.

C’est très macroniste comme vision politique…

Je suis plutôt vassaliste (rires).