StupéfiantsOui ou non, le HHC est-il interdit en France ?

Le HHC est-il interdit en France ou non ?

StupéfiantsL’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) avait annoncé, il y a deux semaines, que cette molécule de synthèse dérivée du cannabis serait interdite en France dès le 13 juin. Dans les faits, oui, mais c’est un peu compliqué
Le ministère de la Santé souhaite inscrire le HHC sur la liste des produits stupéfiants (illustration).
Le ministère de la Santé souhaite inscrire le HHC sur la liste des produits stupéfiants (illustration). - Jaap Arriens/Sipa USA/SIPA / SIPA
Mikaël Libert

Mikaël Libert

L'essentiel

  • L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a déclaré que le HHC et ses dérivés sont inscrits sur la liste des produits stupéfiants depuis le 13 juin.
  • Cette liste, détaillée dans l’Arrêté du 22 février 1990, n’a cependant pas été mise à jour avec ces trois nouvelles substances.
  • Pour autant, depuis 2021, c’est bel et bien l’ANSM qui classe les substances sur la liste des stupéfiants et les décisions de l’Agence n’ont plus besoin d’être publiées au Journal officiel.

La confusion dans la clarté. Le 12 juin dernier, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) publiait un communiqué pour annoncer que la production, l’usage et la vente du HHC et de ses deux dérivés seraient interdits en France dès le lendemain. Une décision qui ne sort pas d’un chapeau, le ministre de la Santé, François Braun, ayant déclaré un mois plus tôt son intention d’inscrire ces molécules sur la liste des produits stupéfiants. Nous avions écrit, à tort, que l’interdiction n’était pas encore entrée en vigueur, induits en erreur par une loi censée rendre les choses plus simples, sauf dans ce cas. Explications.

En se basant sur les travaux des centres d’évaluation et d’information sur la pharmacodépendance-addictovigilance (CEIP-A), l’ANSM avait déclaré, le 12 juin, « que le HHC présente un risque d’abus et de dépendance équivalent à celui du cannabis », ajoutant que « la structure chimique de ces produits est proche de celle du delta-9 tétrahydrocannabinol (delta-9 THC), classé comme stupéfiant ». Dans sa logique, l’agence avait décidé « d’inscrire l’hexahydrocannabinol (HHC) et deux de ses dérivés […] sur la liste des produits stupéfiants ». Liste plus connue sous le nom « Arrêté du 22 février 1990 fixant la liste des substances classées comme stupéfiants ».

« Il n’y a aucune base légale pour empêcher sa consommation »

Cet arrêté fait régulièrement l’objet de modifications, la dernière remontant au 23 mai 2021 et qui est la version en vigueur à ce jour. Donc rien depuis la décision du gendarme des médicaments du 12 juin 2023. « L’ANSM n’est pas un membre du gouvernement et le HHC n’est pas considéré comme un médicament, donc aucune saisie ne peut être effectuée sur le HHC », explique Me Veronica Vecchioni, avocate à Nice et spécialiste de la question du CBD. Le fondement juridique pour interdire ces produits doit ainsi venir d’un décret du ministère de la Santé modifiant l’arrêté du 22 février 1990. Sauf que non. En effet, comme le souligne Yann Bisiou, maître de conférences en droit privé et sciences criminelles, « depuis la loi du 7/12/2020 c’est le directeur de l’ANSM qui classe les molécules sur la liste des produits stupéfiants ». Selon lui, donc, la décision publiée sur le site du gendarme du médicament est « valable ».


Contacté par 20 Minutes, notamment pour nous confirmer l’interdiction du HHC, l’ANSM nous a renvoyés vers le ministère de la Santé. Ministère de la Santé qui nous oriente vers… l’ANSM. Toujours-est-il qu’en vertu de la loi de décembre 2020, seule la publication sur le site de l’Agence fait foi puisque la liste en annexe de l’arrêté de février 1990 n’est plus mise à jour. « C’est vrai que pour retrouver l’information, pour des personnes qui ne sont pas spécialistes, c’est assez compliqué », admet Yann Bisiou.

Pour résumer, oui, le HHC et ses deux dérivés sont bel et bien considérés comme des produits stupéfiants depuis le 13 juin et, donc, interdits à la production, à la vente, au transport et à la consommation. Et, outre les considérations purement légalistes, il faut aussi rappeler la mise en garde de l’ANSM sur les dangers de ces molécules et les risques pour la santé que cela implique : « tremblements, vomissements, anxiété, ''bad trip'', confusion mentale, malaise, tachycardie, douleur thoracique, poussée tensionnelle ». Sans oublier la dépendance des consommateurs en cas d’abus.