SECURITEQuelles sont les villes qui refusent d'armer leur police municipale ?

Quelles sont les villes qui refusent d'armer leur police municipale ?

SECURITEAprès les violences urbaines liées à la mort de Nahel, le syndicat FO de policiers municipaux de Vénissieux, près de Lyon, réclame l’armement de leurs effectifs. En France, la majorité des communes ont équipé leurs policiers mais certaines résistent
D’après les chiffres du ministère de l’Intérieur publiés fin 2020, 58,4 % des 24.221 agents étaient équipés d'armes à feu (Illustration)
D’après les chiffres du ministère de l’Intérieur publiés fin 2020, 58,4 % des 24.221 agents étaient équipés d'armes à feu (Illustration) - Alain ROBERT/SIPA / Sipa
Elise Martin avec les bureaux en région

Elise Martin avec les bureaux en région

L'essentiel

  • Avec les récents événements survenus après la mort de Nahel, le syndicat FO des policiers municipaux de Vénissieux, près de Lyon, réclame à la maire d’équiper les agents d’arme de catégorie B.
  • D’après les chiffres du ministère de l’Intérieur publiés fin 2021, 58 % des 24.221 agents municipaux sont équipés d’armes à feu.
  • Mais dans certaines grandes communes, les mairies restent fermement opposées à cette mesure malgré un débat qui revient régulièrement à l’occasion d’importants faits divers ou de nouvelles élections.

Jeudi, 100 % des agents de terrain de la police municipale de Vénissieux, près de Lyon, lancent une grève reconductible. Les fonctionnaires réclament à la maire (PCF), Michèle Picard, l’équipement de l’ensemble de ses effectifs (34 agents) d’armes de catégorie B, qui correspond aux revolvers ou aux fusils d’épaule. Selon le syndicat FO, cette demande est « vitale » après les événements survenus dans cette commune de près de 70.000 habitants après la mort de Nahel. Pour l’élue, c’est « non ». Et ce, depuis les premières demandes des syndicats, comme elle l’a répété auprès du Progrès.

Ce mouvement social est l’occasion pour 20 Minutes de faire un petit tour de France des polices municipales (pas toutes, puisque 4.523 communes possèdent un tel service) et de leur armement. D’après les chiffres du ministère de l’Intérieur publiés fin 2021, 58 % des 24.221 agents municipaux sont déjà équipés d’armes à feu. Pour rappel, ils peuvent l’être suite « à une demande motivée du maire […] sous réserve de l’existence d’une convention de coordination en cours de validité », indique le site du gouvernement. Leurs missions restent les mêmes, c’est-à-dire, « assurer le bon ordre, la sécurité, la sûreté, la salubrité et la tranquillité publique ».

Les grandes villes dont les policiers sont armés

La majorité des polices municipales ont donc des agents équipés, notamment dans le sud-est de la France où près de 85 % des effectifs des Bouches-du-Rhône, du Var et des Alpes-Maritimes le sont, d’après La Gazette des communes, où les édiles se situent souvent à droite de l’échiquier politique.

De l’autre côté de l’hexagone, à Toulouse, c’est Jean-Luc Moudenc (ex-LR) qui a décidé d’armer ses policiers, dès 2006, lors de son premier mandat. Au départ, ils l’étaient uniquement la nuit, puis tout le temps depuis 2014, deux ans après les tueries de Mohammed Merah.

L’armement de la police n’étant pas réservé aux municipalités de droite, certaines mairies « de gauche » ont aussi mis en place cette mesure. A Lyon, l’ancien maire (ex-PS) Gérard Collomb, longtemps opposé à cette idée, avait alors sauté le pas après les attentats de Paris, en novembre 2015.

Des maires complètement opposés

Si certains ont cédé, d’autres résistent. C’est le cas à Nantes. Les policiers municipaux n’ont pas de pistolet mais sont munis de pistolets à impulsion électrique, de bâtons télescopiques ou encore de caméras piétons. « Est-ce qu’une arme létale protégerait mieux [les agents] ? La réponse est non », avait répondu l’année dernière l’adjoint (PS) à la sécurité, Pascal Bolo, alors que la question était au cœur d’un conseil municipal à la demande de syndicats et d’élus d’opposition. Depuis des années, la position de la mairie socialiste n’a pas bougé à ce sujet.

Même chose au Nord. Martine Aubry, maire de Lille depuis 2001, avait réaffirmé « son refus absolu » de doter sa police en armes létales, en 2020. Mais les principes peuvent évoluer. L’élue avait toujours refusé la vidéosurveillance… avant de s’y mettre à sa dernière élection.

Une autre socialiste est revenue sur ses décisions. Initialement opposée au projet, Anne Hidalgo a finalement doté la capitale d’une police municipale en 2021. L’effectif actuel de 154 agents est équipé d’un bâton de défense, d’une bombe lacrymogène, d’une paire de menottes et d’un gilet pare-balles. Mais pas de revolver. « Nous considérons que les missions de nos agents de police municipale parisienne ne justifient pas de les doter d’armes létales », avait assuré Nicolas Nordman, adjoint à la sécurité à la mairie de Paris, en novembre 2020.

Des débats de l’armement qui reviennent constamment

D’une manière générale, le débat revient régulièrement après d’importants faits divers ou à l’occasion de nouvelles élections. A Rennes, le syndicat FO réclame ainsi depuis plusieurs années l’armement des agents pour faire face au « climat d’insécurité croissant ». Mais la municipalité a toujours refusé. Les fonctionnaires territoriaux sont toutefois équipés d’un bâton de défense et d’une bombe lacrymogène. Et depuis l’automne 2021, la maire (PS) Nathalie Appéré a accepté de doter chaque équipage d’un pistolet à impulsion électrique.

A Bordeaux non plus, la police municipale n’est pas armée. Malgré une demande récurrente de l’opposition, le maire EELV Pierre Hurmic préfère miser sur la prévention et l’accompagnement social, en amont de la répression. En 2020, fraîchement élu, il avait réaffirmé son positionnement après une série d’agressions à l’arme blanche : « Nos policiers municipaux sont les premiers sur terrain, ils font leur job mais ils ne feront pas tout et ils ne seront pas armés ». La municipalité souhaite surtout augmenter les effectifs et les moyens pour améliorer la sécurité.

Mais pour augmenter les effectifs, encore faudrait-il avoir des candidats. Sur les 8.000 besoins de recrutements comptabilisés, près de la moitié serait encore non pourvue, selon le centre national de la fonction publique territoriale. Et d'après les syndicats interrogés par 20 Minutes fin février, le critère numéro un du manque d'attractivité du métier serait l’armement. Les villes refusant d’équiper leurs agents d’arme à feu auraient davantage de difficultés à séduire…