feux de forêtsEn Grèce, 50.000 hectares partis en fumée, l’écosystème « en danger »

Incendies en Grèce : 50.000 hectares partis en fumée, l’écosystème grec « en danger », selon des experts

feux de forêtsLes incendies sont globalement « sous contrôle » samedi, avec toutefois de nouveaux feux dans le Péloponnèse
Un pompier tente d'éteindre un feu de forêt dans les environs de Volos, en Grèce, le 27 juillet 2023.
Un pompier tente d'éteindre un feu de forêt dans les environs de Volos, en Grèce, le 27 juillet 2023. - Xinhua/Marios Lolos/SIPA / SIPA
20 Minutes avec AFP

20 Minutes avec AFP

Depuis la mi-juillet, la Grèce est en proie à des incendies monstres. Au total, pas moins de 50.000 hectares sont partis en fumée depuis le début de cet épisode de mégafeux, « le pire » mois de juillet en plus de dix ans. Face à cette catastrophe climatique, les experts tirent la sonnette d’alarme : l’écosystème grec est « en danger ».

« L’hiver a été sec et les pluies du printemps n’ont pas été suffisantes pour maintenir l’humidité » dans les racines, constate Charalambos Kontoes, ingénieur agronome à l’Observatoire d’Athènes. La Grèce est frappée par une longue période de chaleur, des vents forts et la sécheresse, des conditions climatiques « extrêmes (qui) attisent les feux », relève de son côté Nikos Bokaris, le président de l’Union grecque des forestiers.

Situation « sous contrôle » mais nouveaux feux

Le bilan provisoire des incendies, surtout en Attique, la région d’Athènes, et sur les îles touristiques de Rhodes, de Corfou ou d’Eubée, s’élève « à environ 50.000 hectares brûlés », déplore Charalampos Kontoes, soulignant qu’à cet égard, il s’agit du « pire juillet » en treize ans.

Environ 660 départs de feu, en grande majorité vite éteints, ont été recensés en dix jours, selon le ministre de la Protection civile Vassilis Kikilias. Les incendies sont globalement « sous contrôle » samedi, avec toutefois de nouveaux feux dans le Péloponnèse, et les pompiers restaient déployés sur tous les terrains.

Trois nouveaux incendies ont éclaté samedi dans la péninsule du sud de la Grèce, suscitant des appels des autorités à évacuer quatre communautés, près de la ville de Pyrgos, dans l’ouest du Péloponnèse, selon les services d’urgence grecs. Plus de cent pompiers luttaient contre ces feux appuyés par sept avions et deux hélicoptères, a précisé le service des pompiers joint par téléphone.

Deux semaines de combat

Après deux semaines de combat contre les centaines de feux qui se sont déclarés dans le pays, plus de 460 soldats du feu sont également mobilisés sur les foyers les plus importants des derniers jours : dans les îles de Rhodes et Corfou, destinations estivales très prisées des touristes du monde entier, ainsi que dans le centre de la Grèce, près de Volos, la préfecture de Magnésie.

« Il n’y a plus de front actif », à Rhodes, Corfou, et en Magnésie, les zones « qui nous préoccupent le plus », avait précédemment précisé samedi le service des pompiers. « Il y a des poches de feu éparses qui sont en train d’être éteintes », mais « il n’y aura aucune réduction des forces (sur le terrain) tant que les gros sinistres n’auront pas été éteints », selon la même source.

Incendies récurrents

La Grèce subit chaque année des incendies de forêt, souvent meurtriers comme en 2007 dans le Péloponnèse et à Eubée (84 morts) ou en 2018 à Mati, une station balnéaire près d’Athènes (103 morts).

Il y a deux ans, les feux, notamment à Eubée, avaient fait pendant l’été trois morts et brûlé 130.000 hectares, dont des oliveraies et des pinèdes produisant de la résine. Des centaines de ruches étaient parties en fumée. Cette année, ils ont jusqu’à présent entraîné cinq morts.

Des « paysages africains »

Les répercussions environnementales seront évaluées après leur extinction, selon l’antenne grecque de la WWF. Mais rien qu’à Rhodes, selon des estimations provisoires de l’Organisme grec d’assurances agricoles ELGA, 50.000 oliviers ont été perdus, en sus d’autres cultures, ainsi que 2.500 animaux et ruches.

Et « les incendies répétitifs mettent en danger l’écosystème, les forêts se transforment en terres agroforestières, les broussailles en garrigue (…) le paysage a tendance à changer et à ressembler à des paysages africains », redoute Nikos Bokaris.

A Rhodes, où les incendies ont éclaté le 18 juillet, « une grande partie de la faune », comme une espèce endémique de dama dama (daim européen), « a été sérieusement affectée ; certains cervidés ont été retrouvés carbonisés », déplore Grigoris Dimitriadis, le président de l’Association locale de protection de l’environnement.

Les feux sont aussi à l’origine de la diffusion de particules polluantes, à des niveaux « record » en ce mois de juillet : « une mégatonne d’émissions de carbone entre le 1er et le 25 juillet, le double presque du record de juillet 2007 », a noté l’observatoire européen Copernicus.

Un changement de stratégie du gouvernement ?

Pour Nikos Bokaris, la situation dans le bassin de l’Attique est problématique parce qu' « il y a peu d’espaces verts et les constructions en béton créent un environnement thermique clos ».

Le gouvernement grec, qui impute les incendies en priorité à la crise climatique, est souvent accusé de ne pas en faire assez pour protéger la biodiversité et entreprendre des actions de prévention des feux.

« Cette année, la prévention a commencé un peu tard mais les zones pare-feu ou d’autres mesures préventives ne sont pas toujours la panacée quand le feu prend des dimensions énormes », remarque Nikos Bokaris selon lequel la Grèce a reçu 55 millions d’euros de fonds européens en 2022 et 86 millions en 2023 pour mieux se préparer. Il préconise de laisser les terres brûlées se régénérer et d’interdire la conversion « des forêts brûlées en zones de cultures ou de construction », comme cela se passe souvent.

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