GLOU GLOUBoire plus de deux litres d’eau par jour, c’est dangereux ?

Canicule : Boire plus de deux litres d’eau par jour, c’est dangereux ?

GLOU GLOU« Plus que la quantité d’eau ingérée, ce qui compte, c’est la rapidité à laquelle vous le faites », explique le médecin Philippe Beaulieu
Une femme qui partage ma passion pour l'eau.
Une femme qui partage ma passion pour l'eau.  - Canva / Canva
Lise Abou Mansour

Lise Abou Mansour

L'essentiel

  • S’il est généralement conseillé de boire entre 1,5 litre et deux litres d’eau par jour, ce besoin dépend du niveau d’activité physique, du poids mais aussi de la température ambiante.
  • « Plus que la quantité d’eau ingérée, ce qui compte, c’est la rapidité à laquelle vous le faites », explique le médecin Philippe Beaulieu.
  • Les conséquences d’un binge drinking non alcoolisé, aussi appelé « intoxication à l’eau » peuvent être désastreuses, allant de simples maux de tête à des difficultés motrices, en passant par des vomissements.

«Moi j’adore l’eau, dans vingt ou trente ans y en aura plus. » Si on doit cette phrase culte à Jean-Claude Van Damme, elle aurait pu sortir de ma bouche. Je fais partie des personnes qui n’ont guère besoin de trouver des stratégies pour parvenir à boire le 1,5 litre d’eau recommandé chaque jour. En cas de fortes chaleurs, comme celles que l’on subit actuellement, je dépasse même facilement les 2,5 litres. Face à cette habitude, mes proches ne se privent pas de me faire des remarques, allant de « c’est mauvais pour la santé » à « tu vas abîmer tes reins. »

Ne voulant pas faire de mal à mes chers petits organes, j’ai voulu en savoir plus. Est-ce vraiment dangereux de boire trop d’eau ? Et puis d’abord, ça veut dire quoi trop d’eau ? Eléments de réponse avec Géraldine Pignot, urologue à l’Institut Paoli-Calmettes à Marseille, et Philippe Beaulieu, médecin responsable du département qualité santé au Centre d’information sur l’eau.

Activité physique, poids et température à prendre en compte

« Boire plus de deux litres par jour peut être normal, me rassure d’emblée le médecin Philippe Beaulieu. Tout dépend du niveau de dépenses car, contrairement à l’alimentation, l’eau circule en permanence et ne se stocke pas. Il faut donc que les apports compensent les pertes. »

S’il est généralement conseillé de boire entre 1,5 et deux litres par jour, le besoin en eau de l’organisme est donc directement lié à la quantité que l’on perd, sous forme de transpiration, d’urine, de respiration ou de larmes. Et ces pertes dépendent de trois facteurs : le niveau d’activité physique effectué dans la journée, le poids mais aussi la température ambiante. Plus ces trois critères sont élevés, plus le niveau d’eau requis l’est également. « A l’inverse, dans certaines pathologies cardiaques, il est recommandé de ne pas dépasser un litre par jour », ajoute Géraldine Pignot.

Un risque d’intoxication à l’eau

Si je ne bouge pas de mon canap' mais que je bois plus de 2,5 litres dans la journée, dois-je m’inquiéter ? « Il ne faut pas boire plus de trois litres d’eau par jour, tranche l’urologue. La production d’urines est corrélée à la quantité d’apports hydriques, dès lors qu’on respecte cette limite de trois litres par jour. La règle est de ne pas apporter plus que ce que votre système urinaire est capable d’excréter. »

Le risque, selon la médecin : une « intoxication à l’eau ». « L’eau va s’accumuler dans l’organisme et entrer dans les cellules, car les capacités d’élimination sont dépassées, ce qui entraîne des dysfonctionnements. » Responsable initialement de symptômes tels que des nausées, cette hydratation cellulaire peut engendrer maux de tête, confusion et provoquer à terme un œdème cérébral et le décès.

Une question de rapidité, plus que de quantité

« Plus que la quantité, ce qui compte, c’est la rapidité à laquelle vous l’ingurgitez », considère de son côté Philippe Beaulieu. Que ce soit un défi personnel, un pari ou un bizutage, se gaver d’eau en un minimum de temps est fortement déconseillé. Même fonctionnement qu’expliqué plus haut : les reins ne pouvant drainer suffisamment rapidement l’excès de liquide, les cellules, notamment cérébrales vont se gonfler, entraînant une augmentation de la pression dans le crâne. Les conséquences d’un tel binge drinking aqueux peuvent être désastreuses. « On connaît le coma éthylique mais il existe l’équivalent pour l’eau, un coma hydrique, quand le corps n’a plus les moyens d’éliminer tout ce liquide », explique le médecin.

Potomanie et trouble hypophysaire

Vous me direz qu’il suffit de ne pas se lancer dans ce genre de paris (un peu débiles). Mais les personnes aimant vivre dangereusement (ou ne sachant pas dire non) ne sont pas les seules susceptibles d’être confrontées à potentiel coma hydrique. « Certaines pathologies conduisent à une hyperhydratation mais ont une explication médicale, organique ou psychiatrique », souligne Philippe Beaulieu. C’est le cas du diabète. Au moment du diagnostic, il est souvent associé à une augmentation de la quantité d’urines produites et donc à une augmentation de la sensation de soif et de la quantité d’eau ingérée. « Dans ce cas, il n’y a aucun risque d’intoxication à l’eau car les apports compensent les pertes », tempère l’urologue.

Notre dossier sur la canicule

Mais une autre maladie provoque, elle, un risque important d’hyper-hydratation : la potomanie. Cette pathologie psychiatrique est caractérisée par un besoin incontrôlable de boire de grandes quantités d’eau, souvent accompagnée de troubles du comportement alimentaire, telle que de l’anorexie ou de la boulimie. « Hors situation pathologique, il est rare de rencontrer des gens qui s’hyperhydratent », conclut Philippe Beaulieu.

La rédaction de cet article m’ayant nécessité trois litres d’eau, j’oscille entre franchir la porte du cabinet de mon médecin ou tenter de me convaincre que je fais partie de ces exceptions…

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