com'Quels sont les ingrédients pour réussir sa rentrée politique ?

Université d’été : Quelle est la bonne recette pour réussir sa rentrée politique ?

com'A gauche et à droite, les partis font leur rentrée politique ce week-end
François Hollande aux universités du PS à la Rochelle en 2006.
François Hollande aux universités du PS à la Rochelle en 2006. - HALEY/FACELLY/SIPA / SIPA
Thibaut Le Gal

Thibaut Le Gal

L'essentiel

  • Les responsables politiques font leur rentrée cette semaine avec l’organisation des traditionnelles universités d’été.
  • Ces grands raouts, organisés chaque année, sont souvent émaillés de coups d’éclat et de controverses.
  • Faire parler de soi sans en faire trop et risquer le bad buzz, la recette pour réussir sa rentrée repose sur un subtil dosage.

Après quelques jours de vacances, c’est la rentrée des classes pour les responsables politiques. La gauche est la première sur le pont avec l’organisation des traditionnelles universités d’été. Les insoumis se retrouvent dès mercredi près de Valence (Drôme), les écologistes jeudi au Havre (Seine-Maritime), les socialistes vendredi à Blois (Loir-et-Cher), et les communistes à Strasbourg (Bas-Rhin). Le patron des Républicains, Eric Ciotti, lancera de son côté la rentrée de la droite ce dimanche du côté de Levens (Alpes-Maritimes), tandis que Gérald Darmanin rassemblera le même jour ses soutiens à Tourcoing (Nord). Ces grands raouts, souvent marqués par des coups d’éclat et des polémiques, sont l’occasion de lancer l’année politique à venir. Mais quelle est la recette d’une rentrée politique réussie ?

Un soupçon de provocation

Les universités d’été sont souvent marquées par les controverses. En 2012, Marine Le Pen propose d’interdire le voile et la kippa dans l’espace public, quelques heures avant la rentrée du Front national (devenu RN) à La Baule et provoque un tollé. Deux ans plus tard, Cécile Duflot met le feu aux Journées d’été d’EELV en critiquant dans un ouvrage François Hollande et son Premier ministre Manuel Valls. Des sorties qui permettent de mettre les projecteurs sur leur famille politique. « L’objectif de communication externe est essentiel car les partis doivent créer l’événement pour attirer l’attention, ce qui les conduit à rechercher le buzz », assure Gaspard Gantzer, ex-conseiller en communication du président François Hollande. Mais ce petit jeu peut s’avérer risqué.

Cette année, l’invitation de Médine, accusé d’antisémitisme et d’islamisme, a bien mis les universités d’EELV et de LFI en lumière… au risque d’affaiblir ces deux mouvements dans l’opinion publique. La venue du rappeur a été critiquée jusqu’en interne par certains écologistes, qui ont refusé d’être présents. « C’est une question de dosage : est-ce que le buzz sert le parti ? EELV est bien au cœur de la rentrée médiatique, mais les débats ne portent pas du tout sur les questions écologiques… », relève l’ancien socialiste, un temps proche des macronistes. En 2019, face aux nombreuses critiques, le Medef a ainsi fini par renoncer à inviter l’ex-députée FN Marion Maréchal à ses universités d’été.

De la bonne ambi'

Réussir sa rentrée, c’est mettre en scène la symbiose entre militants et cadres du mouvement. Au plein été, les responsables politiques peuvent se montrer plus décontractés, loin des affrontements houleux dans l’hémicycle ou les médias. « La dimension festive est importante, elle fait partie de la vie d’une famille politique. Pour des partis qui ont très mauvaise presse dans l’opinion, ces moments permettent d’envoyer un message positif, loin des luttes intestines et autres guerres électorales », assure Bruno Cautrès, chercheur CNRS au Cevipof.

L’université d’été, c’est la politique en bras de chemise, la bière entre copains, voire les soirées festives jusqu’au bout de la nuit. On se souvient de la danse déchaînée de Nadine Morano sur le dancefloor avec les jeunes UMP en 2008. « La bonne ambiance est prépondérante. C’est l’occasion de partager un repas, d’aller dans les bars ou de danser jusqu’au bout de la nuit. J’ai fait de sacrées fêtes, des boîtes de nuit improbables à la belle époque du Parti socialiste », ajoute Gaspard Gantzer, qui prévient : « le côté festif se prête peut-être moins au contexte actuel. Avec les réseaux sociaux, les politiques font d’ailleurs plus attention ».

Une dose de com' personnelle

L’université d’été peut aussi être un moment crucial d’un point de vue plus personnel. « C’est l’occasion pour les très bons orateurs de s’illustrer. François Hollande, qui n’était pas toujours très populaire, y faisait un carton car il maîtrisait parfaitement l’art oratoire », avance Gaspard Gantzer, son ancien conseiller. « Ça peut être un tremplin personnel, encore plus lors des années électorales », estime Bruno Cautrès. « C’est le moment de construire son récit personnel, de cultiver une image plus décontractée, loin du costume-cravate, ce qui peut être utile pour des figures politiques souvent perçues comme lointaines par le grand public, poursuit le chercheur. Certaines rentrées ont produit des images iconiques de la vie politique française ». En septembre 2005 à la Baule, le Premier ministre Dominique de Villepin s'offre ainsi un bain de mer très commenté pendant que Nicolas Sarkozy l’attend, la mine sombre, à la table pour déjeuner. Humilié, le patron de l'UMP prendra sa revanche sur son grand rival l'été suivant en s'affichant en plein footing avec un certain François Fillon; qui deviendra son chef de gouvernement quelques mois plus tard.