SUCCESSIONGérald Darmanin est-il déjà en campagne pour 2027 ?

Présidentielle 2027 : Quatre signes montrant que Gérald Darmanin est déjà en campagne

SUCCESSIONLe ministre de l’Intérieur, qui n’hésite plus à exprimer ses ambitions nationales, fait sa rentrée politique dans son fief de Tourcoing ce dimanche
Gérald Darmanin salue la foule.
Gérald Darmanin salue la foule.  - LOIC VENANCE / AFP / AFP
Thibaut Le Gal

Thibaut Le Gal

L'essentiel

  • Pour sa rentrée politique, Gérald Darmanin réunit ses soutiens dans son fief de Tourcoing (Nord), ce dimanche.
  • Le ministre de l’Intérieur, frustré de ne pas avoir été nommé à Matignon, ne cache plus ses ambitions pour la présidentielle 2027.
  • Mais les velléités d’indépendance et les « petites phrases » du ministre commencent à agacer au sein du gouvernement et du camp présidentiel.

C’est l’une des rentrées les plus attendues de cette fin de mois d’août. Gérald Darmanin réunit ses soutiens, ce dimanche, dans son fief de Tourcoing (Nord). Le ministre de l’Intérieur tient sa première grande rentrée politique sur le thème des classes populaires, qu’il juge délaissées par les partis. Le rassemblement est très attendu, et pas seulement pour les « saucisses-frites-bières » prévues. Car l’intéressé, frustré de ne pas avoir été nommé à Matignon, a lancé avec fracas la bataille de succession à Emmanuel Macron. S’il ne cache désormais plus ses ambitions pour la présidentielle 2027, l’ancien protégé de Nicolas Sarkozy est-il pour autant déjà en campagne ? 20 Minutes a mené l’enquête et tente de déceler les indices.

Il n’arrête pas d’en parler

On ne sait pas si Gérald Darmanin y pense en se rasant, mais la présidentielle semble prendre une bonne place dans son esprit. Car le premier flic de France n’en finit plus d’évoquer l’échéance suprême, pas prévue avant quatre ans, lors de ses entretiens. A la mi-août, il évoque déjà cet horizon électoral dans le Figaro : « Ce qui m’intéresse ce n’est plus de regarder ce qu’il s’est passé en 2017 et 2022. Ce qui m’inquiète maintenant c’est ce qui se passera en 2027 », dit-il, avant d’en remettre une couche, ce jeudi, dans La Voix du Nord. « Le fait est que dans cinq ans une victoire de madame Le Pen est assez probable. Face à cela, il nous faudra qu’une ou un candidat », assure-t-il, sans aller jusqu’à confier qu’il est évidemment le mieux placé.

« Il pose progressivement des jalons pour se donner les meilleures chances d’une future candidature. Cela fait penser à des entreprises telle que celle de Nicolas Sarkozy, qui dès 2004 faisait entendre sa voix spécifique », rappelle Olivier Rouquan, chercheur associé au Cersa (Centre d’études et de recherches de sciences administratives et politiques).

Il critique son camp…

Comme un certain Emmanuel Macron en son temps, qui piquait de temps à autre François Hollande et ses amis du gouvernement socialiste, Gérald Darmanin semble s’affranchir, pas à pas, du logiciel macroniste. « J’ai été plutôt minoritaire pour l’instant sur l’importance de la question sociale mais j’espère que la boussole populaire que je propose sera un jour totalement entendue par la majorité », balance-t-il à la figure de ses collègues dans le Figaro. Mettant en avant son passé d’élu local du Nord et ses racines modestes, le ministre dézingue les « techniciens » qui utilisent « des mots que les Français ne comprennent pas toujours » et la « gauche bobo-libérale » représentée au sein du gouvernement.

« Gérald Darmanin a bien conscience des lacunes de la Macronie, notamment sur l’ancrage classes moyennes et populaires, qui permet au RN de prospérer. A tort ou à raison, Emmanuel Macron reste enkysté dans cette image de "président des riches", malgré le quoi qu’il en coûte ou les redistributions », ajoute Olivier Rouquan. « Sur ce volet social, on pourrait toutefois s’interroger sur ce qu’a fait Gérald Darmanin pour les classes populaires lorsqu’il était ministre du Budget », nuance le politologue.

… et agace ses collègues

« On est en 2023, on prépare 2024 et 2027, c’est bien loin », a mollement répondu ce mercredi Elisabeth Borne, pourtant visée par son ministre de l’Intérieur. La cheffe du gouvernement a toutefois insisté sur la nécessaire « unité de la majorité ». Car les ambitions de l’ex maire de Tourcoing commencent à agacer au sein du camp présidentiel. « Les idées doivent passer avant les ego », lance ce vendredi dans Le Parisien le secrétaire général du parti présidentiel Renaissance, Stéphane Séjourné. Piqué, l’intéressé réplique à la sulfateuse dans le même journal. « Je n’ai hérité d’aucune ville, d’aucune circonscription, je ne suis pas élu sur une liste à la proportionnelle. Je suis, c’est vrai, différent : d’origine modeste et issu de l’immigration, cela gêne peut-être ».

« Gérald Darmanin va vite se heurter à la traditionnelle solidarité gouvernementale, car il reste sous l’autorité d’Elisabeth Borne. On se souvient du duel très violent entre Sarkozy et Villepin pour la présidentielle 2007, qui avait duré un moment. La Macronie va être soumise à bien des tensions dans les mois à venir », souligne Olivier Rouquan, alors que le projet de loi immigration, étudié à la rentrée, devrait attiser les frictions.

Il rassemble et prône l’élargissement

Pour son rendez-vous de Tourcoing, le premier de la sorte pour un ministre d’Emmanuel Macron depuis 2017, Gérald Darmanin compte bien montrer qu’il peut rassembler plus largement que sa simple chapelle. Son entourage annonce la présence d’une centaine de parlementaires, dont Laurent Marcangeli, le patron des députés Horizons, mais aussi quelques élus Les Républicains. Une petite dizaine de ministres devrait également être de la partie. Le locataire de Beauvau a également des mots aimables pour le communiste Fabien Roussel ou l’insoumis François Ruffin.

« Il veut montrer qu’il prend de la hauteur, qu’il n’est pas enfermé dans l’image du successeur de Nicolas Sarkozy », relève Olivier Rouquan. « Mais ce sera difficile de trouver l’équilibre, car il sera amené à se repositionner sur les thématiques sécuritaires et n’évitera pas les petites phrases », ajoute-t-il. Sur Twitter, François Ruffin a ciblé le ministre sur sa responsabilité dans la montée du Rassemblement national. « Dix ans de Macron-Darmanin-Philippe-Le Maire […] Quand le problème se présente comme la solution ». Un avant-goût de la future joute présidentielle entre les deux hommes ?

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