HOMME DE FERCyril Del Pistoia, rescapé d’une leucémie, greffé et triathlète

« J’ai toujours voulu être un Ironman », Cyril Del Pistoia, rescapé d’une leucémie, greffé et triathlète

HOMME DE FERExpatrié à Los Angeles, ce Niçois, victime d’un cancer dont les médecins pensaient qu’il serait fatal, participe aux Championnat du monde d’Ironman, l’un des plus longs et exigeants formats du triathlon
Cyril Del Pistoia, cette semaine, en entraînement sur la promenade des Anglais à Nice.
Cyril Del Pistoia, cette semaine, en entraînement sur la promenade des Anglais à Nice.  - F. Binacchi / ANP / 20 Minutes / 20 Minutes
Fabien Binacchi

Fabien Binacchi

L'essentiel

  • Dix ans après un cas grave de leucémie, dont les médecins pensaient qu’il ne réchapperait pas, le Niçois Cyril Del Pistoia, 35 ans, prend le départ du Championnat du monde d’Ironman.
  • Malgré les traces laissées par le cancer qui a failli le tuer et par la greffe de moelle osseuse qui l’a finalement sauvé, il espère boucler les 3,8 km de natation, 180,2 km à vélo et 42,195 km de course à pied en douze heures.
  • « En faisant ça, si j’arrive à motiver ne serait-ce qu’une seule personne actuellement dans un lit d’hôpital à se dire qu’on peut revenir à la vie, qu’on peut, malgré un cancer, malgré une greffe, refaire des choses extraordinaires, je serai le plus heureux », dit-il.

C’est l’histoire d’un battant. D’un combattant même. Avant, pendant et malgré la maladie qu’il a vaincue, Cyril Del Pistoia a toujours tout fait « au maximum ». Trois Masters en parallèle, un brillant début de carrière aux États-Unis et des exploits sportifs. Dix ans après un cas grave de leucémie, dont les médecins pensaient qu’il ne réchapperait pas, ce Niçois de 35 ans, expatrié à Los Angeles, continue à déjouer tous les pronostics.

Ce dimanche matin, sur la promenade des Anglais, malgré les traces laissées par le cancer qui a failli le tuer et par la greffe de moelle osseuse qui l’a finalement sauvé, il prend le départ du Championnat du monde d’Ironman, l’un des plus longs et exigeants formats du triathlon, qui se tient pour la première fois dans la capitale azuréenne.

Cyril Del Pistoia, cette semaine, en entraînement sur la promenade des Anglais.
Cyril Del Pistoia, cette semaine, en entraînement sur la promenade des Anglais. - F. Binacchi / ANP / 20 Minutes

« Refaire des choses extraordinaires » après la maladie

Sa participation à cette compétition, qui réunit les meilleurs des meilleurs de la discipline, est un symbole. Emus par son histoire, les organisateurs l’y ont invité. Il n’aurait pas pu s’y qualifier. Il n’est d’ailleurs pas là pour gagner. Mais au moins pour « progresser ». Encore et toujours. C’est son credo. Le trentenaire espère boucler l’incroyable parcours (3,8 km de natation, 180,2 km à vélo, 42,195 km de course à pied, soit un marathon) en douze heures. « Et ce serait déjà exceptionnel, confiait-il avant le grand départ à 20 Minutes. L’an dernier, sur la même distance, après une préparation compliquée par un Covid et une angine, j’avais fait 13 heures et 30 minutes. Les meilleurs, eux, vont pouvoir boucler tout ça en moins de 8 heures et 30 minutes. »

« En faisant ça, si j’arrive à motiver ne serait-ce qu’une seule personne actuellement dans un lit d’hôpital à se dire qu’on peut revenir à la vie, qu’on peut, malgré un cancer, malgré une greffe, refaire des choses extraordinaires, je serai le plus heureux », explique encore Cyril Del Pistoia. Pour lui, ce matin de 2012 à Paris, lorsque le diagnostic tombe à la suite d’une intense fatigue et une douleur dans le haut de la poitrine, les espoirs sont pourtant douchés. « On m’annonce que c’est une leucémie et on me fait comprendre que j’ai très peu de chance de survie. »

Capacités pulmonaires perdues et très faible résistance à la chaleur

S’ensuit un mois et demi de soins intensifs et de chimiothérapie « avec la dose destinée aux enfants, beaucoup plus forte, car leur corps peut en supporter davantage », dit-il. Efficace, mais loin d’être suffisant. Ses jours sont comptés. Mais le jeune homme d’alors 24 ans ne baisse pas les bras. Il convainc même les médecins de le laisser utiliser un vélo d’appartement dans sa chambre d’hôpital. Pour continuer à bouger.

« On me parle alors d’un traitement expérimental qui permet de libérer l’activité de nos anticorps. Je signe une décharge. Et en moins d’un mois, les médecins sont incapables de trouver une seule cellule cancéreuse dans mon sang. » Encourageant. Pour permettre sa rémission, il faut envisager une greffe de moelle osseuse et donc procéder à une Irradiation corporelle totale pour prévenir un rejet. L’opération de la dernière chance, mais pas sans conséquence. « Ça brûle tout. J’ai perdu 35 % de capacités pulmonaires à l’effort et j’ai une très faible résistance à la chaleur. »

Mais la greffe fonctionne. Et le cancer disparaît. Quelques mois en isolement, pour prévenir toute infection (son système immunitaire ayant été totalement décimé par la maladie et les opérations) et pour reprendre des forces, puis le retour à la vie. Il entame un nouveau travail en janvier suivant « car il faut payer le loyer ». C’est dur. Très dur. « A l’époque, à Paris [où il s’était installé pour faire une école d’ingénieur], je vivais au sixième étage sans ascenseur. Il me fallait 40 minutes, avec des pauses toutes les dix marches, pour tout monter », se rappelle Cyril Del Pistoia.

Bientôt au « championnat du monde des courses à pied » ?

Mais rien ne l’arrête. Il retrouve progressivement ses capacités. Toujours « au maximum », sans jamais se borner à la facilité, il obtient même des médecins l’autorisation de pouvoir aller travailler offshore sur des bateaux pétroliers, un an seulement après la greffe. Sur place, en salle, il reprend le vélo, tout aussi crescendo, par étapes. D’abord un tout petit peu, puis 5 km, puis 10 km de vélo. La vie retrouve son cours à mesure que la menace d’une éventuelle rechute s’éloigne. Parallèlement, il crée des sociétés, puis intègre, en 2016, un des leaders du marketing sur Internet. L’année suivante, il s’envole pour les Etats-Unis pour toujours plus de responsabilités. Et de nouveautés. Et de défis. Il se forme aussi au pilotage des avions. Rien ne l’arrête.

Les performances sportives s’enchaînent également. Footing, marathon et finalement triathlon. En avril de cette année, il représentait l’équipe de France aux Jeux mondiaux des greffés, remportant le titre dans sa catégorie d’âge. Après l’Ironman, il sait déjà quel sera son prochain objectif : « J’aimerais bien me qualifier pour le marathon de Boston qui est un peu considéré comme le championnat du monde des courses à pied ».

« Depuis toujours, j’ai un énorme appétit de vivre, d’en faire le plus possible, de découvrir le monde. J’ai grandi à Nice dans un quartier populaire et je me suis battu pour intégrer les meilleures écoles grâce à des bourses. J’ai travaillé, beaucoup. J’ai fait du sport beaucoup. Même avant la maladie, explique-t-il. La greffe, ça m’a fait en plus comprendre que cette vie, pour chacun d’entre nous, c’est la dernière, et qu’il faut en profiter au maximum. J’ai toujours voulu être un Ironman alors j’ai tout fait pour y arriver. »