Femme libreQui est Mitra Hejazipour, la championne de France qui a défié les mollahs ?

Echecs : Qui est Mitra Hejazipour, la championne de France qui défie les mollahs ?

Femme libreExclue de la sélection iranienne en 2019 pour avoir refusé de porter le voile en compétition, la jeune femme, récemment naturalisée française, participe cette semaine au championnat du monde par équipe en Pologne
Nouvelle championne de France, Mitra Hejazipour participe cette semaine au championnat du monde féminin par équipe en Pologne.
Nouvelle championne de France, Mitra Hejazipour participe cette semaine au championnat du monde féminin par équipe en Pologne.  - Lionel Royet / Fédération Française des Echecs / 20 Minutes
Jérôme Gicquel

Jérôme Gicquel

L'essentiel

  • Naturalisée française en mars, Mitra Hejazipour a été sacrée il y a dix jours championne de France d’échecs.
  • La jeune femme de 30 ans participe cette semaine avec l’équipe de France au championnat du monde par équipes en Pologne.
  • En 2019, la joueuse iranienne avait été exclue de sa sélection pour avoir refusé de porter le voile lors d’une compétition.

Elle rêve de faire résonner La Marseillaise à Bydgoszcz en Pologne où se tient de mercredi à lundi le championnat du monde d’échecs féminin par équipe. Pour sa première compétition sous les couleurs de l’équipe de France, Mitra Hejazipour se sent en tout cas prête à défier les onze autres nations engagées dans la compétition. « Je me sens bien et mes derniers résultats l’ont prouvé », confie-t-elle avant de s’envoler avec ses quatre partenaires. Il y a dix jours, la jeune femme de 30 ans a en effet fait le plein de confiance en décrochant le titre de championne de France d’échecs à l’Alpe-d’Huez.

Un coup de maître pour la joueuse d’origine iranienne qui n’a obtenu qu’en mars la nationalité française. « Sa victoire témoigne non seulement de son excellence personnelle, mais aussi de la force de caractère et du travail acharné qui sont nécessaires pour atteindre un tel niveau », a salué sur les réseaux sociaux François Cuillandre, maire de Brest.

Un palmarès long comme le voile qu’elle a refusé de porter

Car c’est à la pointe bretonne, à plusieurs milliers de kilomètres de son pays natal, que la jeune femme, amoureuse de la France et éprise de liberté, a débarqué au début de l’année 2019, recrutée par le club local d’échecs. Une discipline dans laquelle Mitra Hejazipour excelle depuis qu’elle a six ans. « C’est mon père qui m’a transmis très jeune sa passion », indique-t-elle. Le palmarès de cette grand maître des échecs est en effet impressionnant avec un titre de vice-championne d’Asie chez les enfants puis un titre de championne d’Iran et de championne d’Asie chez les adultes.

Au sommet de la hiérarchie mondiale, son destin va pourtant basculer fin 2019 au championnat du monde d’échecs en blitz (des parties rapides) à Moscou. Défiant le régime des mollahs, Mitra Hejazipour refuse ainsi de porter le hijab et se présente cheveux au vent lors de la compétition, provoquant la colère des autorités iraniennes et son exclusion dans la foulée de la sélection nationale. « J’ai toujours été une femme libre et cela faisait déjà un moment que je réfléchissais à ne plus le porter, raconte la Franco-iranienne. J’en avais marre d’entendre ce qu’on devait porter et j’ai voulu marquer mon opposition. »

« Assez optimiste » sur la situation des femmes dans son pays

Depuis son coup d’éclat, la championne d’échecs n’est jamais retournée dans son pays. « Si je rentre, je pense que j’aurai des problèmes. » Désormais installée à Paris, où elle vient de décrocher un master en ingénierie des logiciels, la jeune femme attend aussi de revoir sa famille. « Je viens d’une famille assez traditionnelle et religieuse, confie-t-elle. Ils n’ont pas trop compris mon geste au début mais ils me soutiennent désormais. »

Contrainte à l’exil, Mitra Hejazipour n’en reste pas moins très attentive aux nouvelles en provenance d’Iran. Et notamment à la situation des femmes qui défient depuis plusieurs mois le régime des mollahs. « J’espère pouvoir être un modèle pour elles, souligne la toute nouvelle championne de France. Je suis en tout cas très fière de les voir se battre dans la rue pour leurs libertés et cela me rend assez optimiste pour mon pays. »