CYBERHARCELEMENTAprès le GP Explorer, le virage vers le cyberharcèlement contre Manon Lanza

GP Explorer 2 : « Voilà le résultat quand on invite des femmes »… Manon Lanza subit la haine en ligne après l’accident

CYBERHARCELEMENTAprès son accident contre la voiture de Maxime Biaggi au GP Explorer 2, Manon Lanza a reçu de nombreuses remarques parfois sexistes et même des menaces de mort
Quelques commentaires vus sur les réseaux sociaux
Quelques commentaires vus sur les réseaux sociaux - Instagram / Canva
Lina Fourneau

Lina Fourneau

L'essentiel

  • Lors de la deuxième édition du GP Explorer, samedi 9 septembre, la voiture de Manon Lanza a percuté celle de Maxime Biaggi les obligeant tous deux à quitter la course.
  • Alors qu’elle a été transportée à l’hôpital, celle-ci a reçu de nombreux commentaires sur sa conduite et autres remarques aux allures sexistes. « Qu’on se serve de la moindre erreur pour médiatiser du sexisme, c’est inacceptable », a-t-elle réagi lundi dans les colonnes du « Parisien ».
  • Les organisateurs, eux, n’ont pas réellement eu la réaction attendue face à ce déferlement de haine, comme dénonce l’association Nous Toutes.

Une sortie de route, un dérapage et puis le déferlement. Ce week-end, c’était la deuxième édition du GP Explorer organisée par le streameur Squeezie. Outre le record d’audience à 1,3 million de personnes (contre un million lors de la première édition), l’édition 2023 de la course opposant plusieurs créateurs de contenus a également connu un terrible accident entre les Youtubeurs Manon Lanza et Maxime Biaggi. Dans un virage, cette dernière est rentrée accidentellement dans la voiture de son adversaire les obligeant tous deux à abandonner la course.

Immédiatement transportée à l’hôpital, la pilote a finalement annoncé dimanche qu’elle allait bien. Mais sans attendre de ses nouvelles, les internautes se sont directement attaqués à la jeune femme tant sur son action de dépasser dangereusement Maxime Biaggi pendant la course que son manque de compétences… en oubliant sans doute qu’aucun des coureurs n’était réellement des professionnels dans cette course.

Et de fait les quelques remarques se sont très vite transformées en cyberharcèlement. « Grâce au GP explorer de Squeezie, on a la certitude que femme au volant accident au tournant », « Faut retourner à la cuisine Manon », « Pourquoi ils mettent des meufs sérieux », « Bravo d’avoir bousillé la course », « Je fais jamais de F1, je suis probablement moins bon qu’elle, mais p****n cette grosse vache qu’elle n***e sa mère » . Un déferlement de haine qui s’est même transformé en menaces de mort parfois.

« Consternant en 2023 »

Auprès du Parisien, la créatrice du compte « Allons rider » a finalement avoué que même si son état était stable, elle avait tout de même subi un choc thoracique et une hernie cervicale. Mais le plus violent pour elle a sans doute été la réaction des réseaux sociaux. « Il y a une part du monde qui ne tourne pas rond. Qu’on se serve de la moindre erreur pour médiatiser du sexisme, c’est inacceptable. On touche à toute la gent féminine à travers moi. Pouvoir lire encore « Femme au volant, mort au tournant », c’est consternant en 2023. Ils se servent de moi pour remettre une couche de sexisme », a-t-elle regretté auprès de nos confrères. Avant d’ajouter : « J’ai eu toujours l’impression d’être en mission : pouvoir dire au grand public que les femmes ont droit de faire ce qu’elles veulent de leur vie. »

Sur sa page Instagram, la jeune trentenaire a également décidé de prendre la parole pour parler « de l’une des journées les plus intenses » de sa vie et réagir aux remarques sur les risques pris pendant la course. « Il n’y a pas d’ombre sans lumière. Pas de sports extrêmes sans risques. Pas de courses sans imprévus. Pas de femmes sans hommes. Pas d’hommes sans femmes. […] Hommes ou femmes, on prend tous les mêmes risques. On a tous un cœur qui bat et du sang dans les veines. Et on accepte tous, au même niveau, que tout puisse s’arrêter ».

Un manque de représentation

Mais trois jours après la course, un silence assourdissant pèse sur l’évènement, celui des organisateurs du GP Explorer 2. Peu de pilotes présents sur la course ont réagi au déferlement de haine. Seule véritable exception, son coéquipier Depielo, également vainqueur du GP Explorer 2. « Un incident de course ça arrive, c’est généralement deux pilotes qui ne se comprennent pas sur la piste. Je n’ai pas vu toutes les images ni le replay pour le moment. Ce que je sais c’est que Maxime et Manon ont voulu faire de leur mieux, être compétiteurs et faire du spectacle. Et cela fait partie de la course. On ne reste que des amateurs qui ont une chance incroyable. », a-t-il rappelé sur son Instagram. Dans son émission « Open World » diffusée sur Twitch, le streameur et compétiteur Gotaga a également réagi : « Avant même de savoir si elle allait bien, le harcélement était déjà là. Les gars, calmez-vous. Elle s'en veut déjà assez comme ça, pas besoin d'en rajouter ».

Mais du côté de l’organisation, la communication est restée très évasive. Seul un tweet a été publié dimanche sur le compte officiel de l’évènement : « Les insultes envers Manon sont abjectes. Le GP Explorer est une course familiale et ce genre de commentaires qu’elle reçoit sont à bannir au plus vite ». Sollicités par 20 Minutes, les organisateurs n’ont à ce jour pas répondu à nos demandes.

Une réaction qui ne suffit pas pour certaines associations, à l’instar de Nous Toutes ce lundi. « Lorsque vous organisez des événements en ligne, vous devez faire tout ce qui est en votre pouvoir pour empêcher le cyberharcèlement. Faites mieux ! », a invité l’association féministe. Selon l’organisation, lorsqu’un évènement en ligne est créé, il y a soit très peu de femmes invitées [cinq sur 24 dans le cadre du GP Explorer 2] à l’évènement soit au moins une sera cyberharcelée. Cette action passerait notamment par la prévention, ainsi qu’à une tolérance zéro face au harcèlement.