science participativeDes plastiques vraiment « biodégradables » ? A vous d’aider à vérifier

Pollution : Les plastiques biodégradables le sont-ils vraiment ? A vos truelles !

science participativeDepuis leur labo de Toulouse, des scientifiques orchestrent une expérience à grande échelle pour tester la biodégradabilité supposée de certains emballages plastiques. Et vous pouvez leur donner un gros coup de main
L'enfouissement d'un échantillon fourni dans le kit de l'expérience.
L'enfouissement d'un échantillon fourni dans le kit de l'expérience. - PlastiZen / CNRS
Hélène Ménal

Hélène Ménal

L'essentiel

  • Le programme PlastiZen, mené par des scientifiques de Toulouse, consiste à déterminer si des plastiques étiquetés « biodégradables » le sont effectivement.
  • Il s’agit aussi d’un projet participatif destiné à donner le goût des sciences aux néophytes.
  • Pour faire partie de l’aventure, il suffit d’enterrer les échantillons du kit fourni dans votre jardin ou sur votre balcon et de vous laisser guider.

A l’heure où la pollution plastique prend des proportions si affolantes qu’elle engendre des continents flottants, comment être sûr que nos efforts ne sont pas vains ? Et que par exemple les sacs en plastique tout fins dans lesquels on emballe nos légumes au supermarché, prétendument biodégradables, le sont vraiment ? Des chercheurs proposent de le vérifier par vous-même. En creusant, pas très profond, dans votre pelouse ou dans la jardinière de votre balcon.

L’expérience de science participative PlastiZen a été lancée en mai 2021 par Camille Larue et Arthur Compin, deux scientifiques du Laboratoire écologie fonctionnelle et environnement* (Lefe) de Toulouse. Le principe est simple : enterrer deux morceaux de plastique – l’un « conventionnel », l’autre censé être biodégradable – dans un même sol et vérifier visuellement leur état une fois par mois pendant trois mois. Mais « La vitesse de dégradation dépend de nombreux paramètres, comme de la température ou la nature du sol », explique Camille Larue. Et pour obtenir des résultats solides, il aurait fallu soit se déployer dans tout l’Hexagone, soit transformer le labo en gigantesque taupinière en y faisant varier la météo. Autant vider l’océan, et les microplastiques qui s’y baladent, à la petite cuillère…

42 % des échantillons intacts au bout de trois mois

L’idée est donc de recruter, partout, des « assistants de recherche » enthousiastes. Et de leur fournir un kit, plutôt simple : les deux morceaux de plastiques dans leur petite poche de nylon, une languette pour mesurer le PH du sol, deux sachets de thé, qu’on laisse enterrés durant toute l’expérience pour mesurer l’activité microbienne du lieu, un tube pour envoyer au labo un échantillon de sa terre, et même une enveloppe prétimbrée pour le retour d’échantillon.

Depuis le départ, plus de 300 kits PlastiZen ont été commandés. « Une centaine de participants sont allés au bout de l’expérience », précise Arthur Compin. Pour l’instant, grosso modo, les résultats montrent qu’un tiers des plastiques biodégradables ont effectivement disparu au bout de trois mois. Mais 42 % des échantillons sont aussi restés intacts ou presque. Par ailleurs, il y a un « biais », comme disent les scientifiques. L’opération s’est propagée par le « bouche-à-oreille » dans l’entourage de l’équipe. Autant dire que les retours viennent davantage de Marseille au Strasbourg. Sur la carte, 47 départements – le Gers, le Var ou le Pas-de-Calais pour ne citer qu’eux – sont encore en « zone blanche ».

Obtenir des résultats scientifiques robustes

Voilà pourquoi PlastiZen passe la surmultipliée. Une chaîne YouTube a été mise en ligne lundi. Et désormais, bien que les participants interrogés trouvent la manipulation facile et peu chronophage, une appli permet « de gérer plus facilement » l’envoi des infos au labo. « Nous prévoyons aussi de distribuer des capteurs d’humidité ou de température dans des classes », ajoute Camille Larue. Car l’un des enseignements inattendus de la première phase est que PlastiZen est un bon support pédagogique, notamment pour les programmes de collège. Profs, simples curieux, écolos dans l’âme… les nouveaux expérimentateurs « sont les bienvenus ! ». Plus ils seront nombreux, plus le projet aura de chances de se transformer en « une publication scientifique appuyée sur des résultats robustes ». Et, qui sait, de faire trembler les industriels adeptes du « greenwashing ».

* CNRS/UT3/INPT

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