LE COMPTE EST BONFaites vos jeux, la saison des 49.3 ne fait que commencer à l’Assemblée

Et cette année, combien de 49.3 au total pour le gouvernement ? Voici nos pronostics

LE COMPTE EST BONMercredi, la Première ministre a dégainé l'article 49.3 pour faire passer à l'Assemblée la partie recettes du projet de budget pour 2024. On en attend beaucoup d'autres
Elisabeth Borne va monter un paquet de fois à la tribune  de l'Assemblée pour annoncer des 49.3 en cette fin d'année.
Elisabeth Borne va monter un paquet de fois à la tribune de l'Assemblée pour annoncer des 49.3 en cette fin d'année.  - Geoffroy Van der Hasselt / AFP
Rachel Garrat-Valcarcel

Rachel Garrat-Valcarcel

L'essentiel

  • Mercredi soir, Élisabeth Borne a déclenché un nouveau 49.3 à l'Assemblée.
  • D’ici à Noël, il y en aura d'autres. Mais combien ?
  • 20 Minutes vous fait son pronostic sur les 49.3 à venir !

La Première ministre a déclenché mercredi soir, le 18 octobre, un nouveau 49.3 à l'Assemblée pour faire passer la partie recettes du budget 2024. A cette occasion, nous vous proposons de (re)lire cet article publié à la fin du mois de septembre (et encore totalement d'actualité...)

Il n’y avait plus beaucoup de suspense depuis que le Conseil des ministres avait autorisé le gouvernement à l’utiliser. Mercredi soir, peu avant minuit, Élisabeth Borne a donc déclenché le 12e article 49.3 depuis qu’elle est devenue Première ministre. Pour rappel, cet article de la Constitution permet au gouvernement de faire adopter un texte sans vote, pour peu que l’Assemblée ne vote pas de motion de censure dans la foulée. Cette fois, il s’agit du projet de loi de programmation des finances publiques. Un texte technique sur la trajectoire de réduction du déficit public demandé par l’Union européenne aux Etats membres, pour qu’ils puissent bénéficier du fonds de soutien européen post-Covid.

En l’espèce, Élisabeth Borne brise une promesse – qui, Emmanuel Macron l’a précisé ensuite, n’engageait qu’elle – faite après la réforme des retraites : ne plus utiliser le 49.3 sur des textes non financiers. Depuis la réforme constitutionnelle de 2008, l’usage du 49.3 est encadré : sur les textes financiers, c’est open bar. Pour le reste, c’est un par session, et il y a une session par an, d’octobre à juin ; parfois une ou deux sessions extraordinaires, en juillet et/ou fin septembre, comme cette semaine. Or, le projet de loi de programmation des finances publiques a beau parler gros sous, il ne s’agit pas d’un texte financier.

L’open bar commence bientôt

L’open bar des 49.3 sur les textes financiers, le gouvernement compte bien en profiter dès la fin du mois d’octobre, avec l’ouverture de la « saison budgétaire » qui va occuper le Parlement toute la fin d’année. La majorité et l’exécutif se sont depuis longtemps convaincus que ces 49.3 là n’étaient pas graves. « Pour moi, c’est très spécifique, explique la MoDem Élodie Jacquier-Laforge. C’est le texte qui dit si vous êtes dans la majorité ou dans l’opposition, et je comprends que les oppositions ne votent pas le budget. Donc, en la matière, le 49.3 ne me pose aucun problème. » Il est vrai que dans une démocratie parlementaire, le budget est le texte le plus important de l’année et fixe la frontière entre les soutiens et les opposants au gouvernement. Il est vrai aussi que ce ne sont pas les 49.3 sur le budget, l’année dernière, qui ont fait sortir les gens dans la rue.

En tous les cas, cette arme dédouane le gouvernement de trouver des compromis avec les oppositions – parfois même avec sa propre majorité. Résultat, le texte - effectivement - le plus important de l’année ne sera pas approuvé par la représentation nationale pour la deuxième année de suite, et il y a de fortes chances que ça dure cinq ans : une totale bizarrerie à l’échelle des grandes démocraties parlementaires, où le vote sur le budget est précisément le seul moment où le gouvernement ne peut pas s’échapper.

Les comptes

Alors, combien de 49.3 cette année ? Il y a deux projets de loi de finance : celui de l’Etat, le PLF, et celui de la Sécurité sociale, le PLFSS. Chacun a deux parties, les recettes et les dépenses. Chacune de ses parties va bénéficier de deux lectures au moins à l’Assemblée. Cela fait donc au moins huit 49.3 d’ici fin novembre. Il y a ensuite une dernière lecture définitive de chaque texte, ce qui rajoute deux autres 49.3. Nous voilà donc à dix, comme en 2022. D’ici la fin de l’année, la loi de programmation des finances publiques va revenir en dernière lecture, avec à la clé un nouveau 49.3.

Il y en a même un peu plus : il est très probable que d’ici à la fin de l’année 2023, le gouvernement ait besoin - c’est très courant – de faire passer un budget rectificatif pour l’année en cours : un PLFR. Même sanction : une partie recettes et une partie dépenses à chaque fois, deux lectures au moins pour chaque partie. Cela rajoute cinq 49.3.

Encore des 49.3 en 2024

Sorti du marathon budgétaire, le début de l’année 2024 devrait être marqué à l’Assemblée par l’arrivée du projet de loi immigration. Pour le moment, chaque groupe se retranche derrière ses lignes rouges. La droite ne veut pas entendre parler des régularisations des travailleurs sans papiers dans les métiers en tension et insiste sur la partie qui durcit les conditions d’expulsion. La gauche, c’est à peu près l’inverse, et la majorité ne veut rien lâcher. Sauf si le gouvernement fini par abandonner le texte ou se risque à un vote au résultat très aléatoire – ce qui n’est pas du tout exclu –, il aura alors besoin de trois nouveaux 49.3 pour faire passer son texte.

Dans le pire des cas d’ici au printemps, le gouvernement pourrait donc avoir à assumer vingt 49.3. Au moins dix-sept d’ici à Noël, c’est en tout cas le pronostic de 20 Minutes. Et le vôtre, c’est quoi ?

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