ProcèsDeux gendarmes jugés pour l’accident mortel provoqué par leur collègue ivre

Deux gendarmes jugés pour l’accident mortel provoqué par leur collègue « proche du coma éthylique »

ProcèsLe 26 février 2019, Loïc D. a mortellement percuté à Bourgoin-Jallieu (Isère) la voiture d’un couple après avoir « bu toute l’après-midi avec ses collègues ». Deux d’entre eux sont poursuivis pour homicide involontaire et non-empêchement de délit
Olivier Duron et son avocat Hervé Gerbi. Les enfants du couple Duron, mortellement percuté par un gendarme ivre, ont porté plainte contre ses collègues de travail qui l'ont « laissé prendre le volant ».
Olivier Duron et son avocat Hervé Gerbi. Les enfants du couple Duron, mortellement percuté par un gendarme ivre, ont porté plainte contre ses collègues de travail qui l'ont « laissé prendre le volant ».  - C.Girardon / 20 Minutes / 20 Minutes
Caroline Girardon

Caroline Girardon

L'essentiel

  • Deux gendarmes seront jugés mardi devant le tribunal correctionnel de Grenoble pour homicide involontaire et non-empêchement de délit.
  • L’accusation leur reproche d’avoir laissé l’un de leurs collègues, fortement alcoolisé, prendre le volant.
  • Le 26 février 2019 à Bourgoin-Jallieu, Loïc D., qui avait un taux de 2,54 g d’alcool par litre de sang, a mortellement percuté la voiture de Geneviève et Florencio Duron.

De notre envoyée spéciale à Grenoble (Isère),

« C’était une bombe à retardement. » Quatre ans et demi après la mort de ses deux parents, tués dans un accident de voiture le 26 février 2019 à Bourgoin-Jallieu (Isère), Olivier ne comprend toujours pas comment Loïc D., gendarme, a pu prendre le volant. Ce jour-là, profitant d’une journée de repos, l’homme, attablé au comptoir d’un bistrot de Villefontaine, a « bu une après-midi entière » avec quatre de ses collègues, venus le rejoindre au fur et à mesure. « Dix-huit pintes soit neuf litres de bière, un cocktail, un Get 27 et un verre de vin à quatre », énumère l’avocat Hervé Gerbi, dénonçant l’attitude de la « joyeuse tablée ». « Personne n’a cherché à le retenir malgré son état d’alcoolémie proche du coma éthylique. » L’un d’eux est même monté en voiture avec lui, embarquant leurs enfants à l’arrière du véhicule.

Si le chauffard a été condamné dans la foulée à dix-huit mois de prison ferme et radié de la gendarmerie, les quatre enfants de la famille Duron ont également porté plainte contre ses collègues. Deux d’entre eux seront jugés ce mardi devant le tribunal correctionnel de Grenoble. L’un, le passager, pour homicide involontaire. L’autre pour non-empêchement de délit. « Il faut que le tribunal affiche sa volonté de sanctionner beaucoup plus sévèrement les responsables de violence routière : ceux qui prennent le volant et ceux qui les laissent partir », presse Hervé Gerbi à la veille de l’audience.

Au moment de l’accident, le chauffard avait un taux d’alcool de 2,54 g/litre de sang. Vers 19 heures, il s’est engouffré dans la circulation au volant de son bolide. « Une voiture de 275 CV lancée à 120-150 km/heure qui est venue percuter celle de mes parents. Ils étaient à l’arrêt car il y avait des embouteillages », rappelle Olivier. Et de montrer, photo à l’appui : « L’impact a été tellement violent que les sièges arrière se sont retrouvés devant. Ce n’était plus une voiture mais un tas de ferraille. » Ecrasés à l’intérieur, Geneviève et Florencio, âgés de 69 et 71 ans, ne survivront pas. « On ne peut pas admettre que personne ne se soit rendu compte de son état alcoolique », appuie leur fils.

Le gendarme, passager, « a demandé aux enfants de mentir »

« Non seulement, ils ne l’ont pas empêché de partir mais ils ont menti et ont tenté de se soustraire à la justice », accuse Hervé Gerbi. Et d’étayer : « Ils ont menti sur la vitesse à laquelle roulait leur collègue. Ils ont menti sur son niveau d’alcoolisation. Ils sont gendarmes, ils auraient dû faire face à leurs responsabilités. Au lieu de ça, le passager a quitté les lieux, désertant la scène de l’accident après avoir appelé ses camarades plutôt que les secours. Et il a demandé aux enfants, qui étaient avec eux, de mentir sur sa présence dans le véhicule. »

Même s’ils ne se font « aucune illusion », Olivier Duron et ses frères et sœurs espèrent néanmoins que leur « combat ne sera pas vain ». « Certaines affaires, comme l’accident provoqué par Pierre Palmade, ont hystérisé l’opinion publique. Nous, on espère au moins être entendu par la justice pour avancer dans notre deuil car aujourd’hui, nous sommes encore loin de voir le bout du tunnel. » Les deux gendarmes encourent chacun cinq ans de prison ferme.