Coup de froidMalgré l’ambition du gouvernement, les ventes de pompes à chaleur en berne

Energie : Malgré l’ambition du gouvernement, les ventes de pompes à chaleur en berne

Coup de froidAprès plusieurs années de forte croissance, le constructeur français Saunier Duval est contraint au chômage partiel en raison d’un retournement du marché depuis cet été
L'entrée du site industriel de Saunier Duval à Nantes où travaillent plus de 900 salariés.
L'entrée du site industriel de Saunier Duval à Nantes où travaillent plus de 900 salariés. - F.Brenon/20Minutes / 20 Minutes
Frédéric Brenon

Frédéric Brenon

L'essentiel

  • Du chômage partiel débute à partir de ce vendredi au sein du site industriel de Saunier Duval, leader français des chaudières et pompes à chaleur.
  • Les ventes de pompes à chaleur diminuent, principalement en raison de la crise immobilière et de l’inflation.
  • Le gouvernement ambitionne pourtant de tripler la production française d’ici quatre ans.

C’est l’une des priorités du gouvernement. Emmanuel Macron avait d’ailleurs lui-même annoncé cet engagement dans sa « planification écologique » présentée le 25 septembre. La France veut tripler le nombre de pompes à chaleur produites sur le sol national d’ici à 2027, jusqu’à grimper à un million d’unités fabriquées par an. Premier constructeur français de chaudières et de pompes à chaleur, Saunier Duval peut se frotter les mains face à de telles ambitions. Mais, pour l’heure, l’ambiance est plutôt mitigée dans ses rangs. Car, malgré des perspectives réjouissantes, la réalité est autre : les ventes de pompes à chaleur sont actuellement en baisse et le volume de commandes ne permet plus de faire travailler l’ensemble des 907 salariés de son site industriel basé à Nantes.

A tel point qu’à partir de ce vendredi du chômage partiel entre en vigueur au sein de l’entreprise, qui appartient au groupe allemand Vaillant. Environ 500 collaborateurs (opérateurs de production, chefs d’équipe, fonctions support) sont concernés par ce repos forcé d’une durée de « douze jours à vingt-deux jours ». Le recours aux intérimaires est également gelé.

Marché de l’immobilier, inflation, subventions…

« Pendant trois ans, on a doublé notre volume de production chaque année. On travaillait 24 h/24, sept jours sur sept et on a embauché en conséquence. Mais, depuis le mois de juin, on observe un retournement du marché, jusqu’à -40 % sur les ventes. C’est une baisse soudaine et significative qui nous oblige à réagir vite », explique Yuna Jossé, directrice de l’usine Saunier Duval.

La crise du marché immobilier est pointée comme l’une des causes majeures. « L’achat d’une pompe à chaleur se fait souvent lorsqu’on s’installe dans un nouveau logement. Le fait que les transactions immobilières aient chuté de 40 % en France, forcément, ça nous pénalise », analyse Yuna Jossé.

La directrice du site industriel nantais, qui fabrique principalement pour la France, l’Allemagne, l’Espagne et l’Italie, avance d’autres explications. « L’inflation a certainement fait douter le consommateur européen ou reporter des décisions d’achat à plus tard. En Italie, le gouvernement a aussi décidé de suspendre les subventions. Les clients nous rapportent également que les aides de l’Etat restent parfois difficiles à comprendre ou à mettre en place. »

« On pense que cette crise est passagère »

Alors que Saunier Duval tablait sur 100.000 pompes à chaleur produites cette année à Nantes, la marque ne devrait finalement pas en sortir plus de 70.000. Soit, tout de même, « 20 % de plus que l’année précédente », précise la direction. Un regain d’activité est désormais espéré à partir du « deuxième trimestre 2024 ». « Nous restons persuadés au sein du groupe que cette crise est passagère. Nous avons confiance dans le produit pompe à chaleur qui est, selon nous, la solution de chauffage à faible émission de CO2 dont le marché français a besoin. On s’inscrit totalement dans la vision d’Emmanuel Macron », justifie Yuna Jossé.

Le coût élevé d’une pompe à chaleur et de son installation pour les particuliers rend toutefois les aides de l’Etat déterminantes. « Comme pour les véhicules électriques, le consommateur a besoin de subventions pour franchir le pas, estime Yuna Jossé. C’est un marché qui a encore besoin d’un coup de pouce. » Les pompes à chaleur sont « déjà très subventionnées aujourd’hui, je ne vois pas ce qu’on peut faire de plus », s’interroge, de son côté, Nicolas Moulin, fondateur de Primesenergie.fr, société d’accompagnement à la rénovation.

Malgré le contexte, quelque 30 millions d’euros d’investissement sont programmés d’ici à la fin 2025 chez Saunier Duval. L’objectif est d’amener le site nantais à une capacité de production de « 160.000 pompes à chaleur par an ».

Environ 170 sites de productions de pompes à chaleur sont recensés en Europe. Trente-deux sont en France appartenant à une dizaine de fabricants. Le leader européen des ventes est le groupe japonais Daikin.

Sollicitée à plusieurs reprises, la CFDT, syndicat majoritaire chez Saunier Duval, n’a pas répondu.