CONSOMMATIONPourquoi la limitation des titres-restaurants a suscité la controverse

Titres-restaurants : Pouvoir d’achat, « malbouffe »… On vous explique la volte-face du gouvernement

CONSOMMATIONLa menace planait : à partir de janvier 2024, il n’allait plus être possible d’acheter des produits non directement consommables à l’aide de ses titres-restaurants. Mais la donne a changé
La première ministre Elisabeth Borne (L) et le porte-parole du gouvernemnet Olivier Véran.
La première ministre Elisabeth Borne (L) et le porte-parole du gouvernemnet Olivier Véran. - Ludovic MARIN / AFP / AFP
Thibaut Le Gal

Thibaut Le Gal

L'essentiel

  • La crainte des salariés était grande : à partir du 1er janvier 2024, les titres-restaurants n’allaient plus pouvoir être utilisés pour acheter des produits alimentaires comme les pâtes, la viande ou les œufs en supermarché. Cela aurait signifié un « retour à la normale », puisqu’une dérogation avait été accordée par le gouvernement à l’été 2022 pour redonner du pouvoir d’achat aux Français.
  • La fin annoncée de cette mesure exceptionnelle a suscité la colère de toutes les oppositions. Et pour le député MoDem Richard Ramos, ne pas maintenir ce dispositif aurait été « une vraie connerie ».
  • Alors que le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, a annoncé en fin d’après-midi que l’idée de prolonger le système actuel était « étudiée », sa ministre déléguée au Commerce, Olivia Grégoire, a confirmé dans la soirée sur M6 que les choses ne changeraient pas en 2024.

La ministre déléguée chargée du Commerce, Olivia Grégoire, a annoncé ce mardi soir sur M6 que la dérogation pour les titres-restaurants serait finalement maintenue en 2024. Pour tout comprendre à ce revirement, nous proposons de (re) lire cet article paru plus tôt dans la journée, avant son annonce.

Sera-t-il toujours possible d’acheter un paquet de pâtes et des steaks hachés avec ses titres-restaurants ? Peut-être pas : à partir de janvier 2024, seuls les produits directement consommables seront concernés par ces tickets papiers et cartes magnétiques. Il s’agit, en réalité, d’un « retour à la normale », puisqu’une dérogation avait été accordée par le gouvernement à l’été 2022 pour redonner du pouvoir d’achat aux Français.

Mais la fin prévue de cet assouplissement suscite la colère de toutes les oppositions. Quel impact sur le quotidien et l’alimentation des Français ? On en parle avec le député MoDem du Loiret Richard Ramos, ancien critique gastronomique et pourfendeur de la malbouffe.

Qu’est-ce qui doit changer au 1er janvier 2024 ?

Le périmètre des titres-restaurants avait été élargi le 1er octobre 2022 dans le cadre de la loi pouvoir d’achat, pour permettre aux salariés d’acheter l’ensemble des produits alimentaires (farine, pâtes, riz, œufs, beurre, lait, poisson, viande…). Mais cette possibilité de les utiliser pour faire ses courses n’était que temporaire : le texte de loi prévoyait la fin de cet élargissement au 31 décembre 2023.

A partir de l’année prochaine, donc, en théorie, les titres-restaurants ne pourront plus être utilisés que pour acheter des produits pouvant être consommés dans l’immédiat, comme les plats préparés, les salades, les fruits ou encore les sandwichs. L’objectif : revenir au principe initial du dispositif, qui permet aux 5 millions de salariés qui en bénéficient de les utiliser sur leur pause déjeuner dans des supermarchés, des boulangeries ou des restaurants.

Pourquoi ça suscite la controverse ?

Parce que l’inflation reste toujours très importante. La France fait désormais figure de mauvaise élève en Europe avec une inflation alimentaire cumulée de 17,9 % entre janvier 2022 et août 2023, selon le baromètre du panéliste NielsenIQ pour le magazine LSA. « C’était une mesure exceptionnelle, ça a fonctionné. L’enlever aujourd’hui serait une vraie connerie, souffle Richard Ramos. On a toujours de l’inflation et des familles à 10 euros près à la fin du mois. Leur permettre d’acheter un peu de nourriture avec des titres-restaurants, même si ce n’était pas prévu pour ça à la base, ça reste utile », poursuit l’élu de la majorité présidentielle, alors que plus d’un Français sur trois s’est privé d’au moins un repas au cours de l’année écoulée, selon une étude Ipsos pour le Secours populaire publiée en septembre.

De nombreux responsables politiques ont réagi à cette fin de dérogation. « Mesquinerie sans fin du gouvernement qui veut empêcher les Français d’utiliser les tickets-restaurants pour acheter des aliments essentiels », a dénoncé sur X (ex-Twitter) le dirigeant communiste Fabien Roussel. « Le gouvernement prend une mesure socialement dramatique pour des millions de Français pris à la gorge par l’inflation. Cette indifférence à la souffrance n’est plus acceptable », a également réagi Marine Le Pen, la patronne des députés RN.

Quel rapport avec la malbouffe ?

Pour le député Richard Ramos, la fin de cette mesure serait également un mal pour la santé des Français. « Les salariés ne pourront plus acheter de quoi se préparer une petite salade ou un plat de pâtes. On va les pousser à acheter des box de pâtes pleines d’additifs, ou des sandwichs triangles dégueulasses avec du jambon nitrité et de la mayo industrielle », critique-t-il. « Cette limitation va donc pousser les gens, notamment les plus précaires, à ne plus cuisiner pour aller vers la malbouffe », regrette-t-il.

Le gouvernement pourrait-il prolonger la mesure ?

Interrogé sur ce sujet lors des questions au gouvernement ce mardi, l’exécutif a préféré botter en touche. Contacté par 20 Minutes, le ministère en charge des Petites et Moyennes Entreprises, du Commerce, de l’Artisanat et du Tourisme nous indiquait dans l’après-midi que « les discussions avec les parties prenantes continuent » pour trouver une solution. Bruno Le Maire a confirmé qu’une prolongation de la dérogation état « étudiée » actuellement. Mais à l’époque de sa mise en place, en septembre 2022, les professionnels de la restauration s’y étaient opposés, craignant de voir les « titres-restaurants devenir des chèques alimentation ».

« J’ai toute confiance en Olivia Grégoire, elle doit trouver un chemin d’équilibre en maintenant quelques produits dans ce dispositif qui permettront aux gens de se faire à manger », proposait un peu plus tôt Richard Ramos. Au final, Olivia Grégoire a donc annoncé ce mardi soir sur M6 que rien ne changera en 2024.